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Le moi est-il ce qui se cache ou ce qui se manifeste ?

Dissertation : Le moi est-il ce qui se cache ou ce qui se manifeste ?. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  23 Septembre 2020  •  Dissertation  •  4 316 Mots (18 Pages)  •  1 508 Vues

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Le moi est-il ce qui se cache ou ce qui se manifeste ?

Introduction :

C’est au début des Confessions, que Rousseau affirme vouloir peindre un homme dans toute la vérité de son être et cet homme, dit-il, ce sera moi. C’est pourquoi, le projet des confessions établi, il poursuit par la narration de  savie depuis le  jour de sa naissance, à Genève.  On le sait, toute l’entreprise de Rousseau  a pour fin de   se justifier devant le tribunal des hommes d’avoir successivement abandonné ses cinq enfants à l’assistance publique. Mais en quoi consiste au juste ce projet si ce n’est à faire apparaître le moi dans toute sa vérité (je vais tout dire), de le rendre transparent à lui-même et d’aller jusqu’au bout de cette logique quitte à en dire plus, à inventer si nécessaire pour ne rien laisser dans l’ombre comme dans  le  repli caché d’un vêtement. Dire,  pour rendre le moi clairvoyant à lui-même, supprimer tous les obstacles à l’appréhension de soi, tel pourrait être le projet de toute vie humaine. Reste à savoir si un tel projet est réalisable ou si à l’inverse il est d’emblée voué à l’échec en raison non  de l’absence de volonté, mais de la nature même du moi.  En effet, le moi semble à la fois s’offrir et se dérober à toute appréhension et définition possibles puisque, à chaque fois, que nous pensons le saisir voilà qu’il échappe. Il est à la fois la réalité la plus évidente dont  nous ne doutons pas, pas naturellement en tout cas,  et  l’élément le plus obscure et énigmatique.  Alors comment faut-il appréhender et définir  le moi pour saisir sa nature et déterminer sa vérité. Si cette vérité se dissimule est-ce parce que le moi tend toujours à se cacher derrières toutes sortes de masques, dont l’amour propre, qui est le plus opposé à la vérité de soi,  pourrait être un exemple, ou est-ce parce que le moi ne peut se donner comme un être objectif,   susceptible d’être connaissable et de se révéler à soi-même comme aux autres ? Ce double questionnement exige que l’on considère tour à tour le moi dans l’expérience quotidienne, qu’on circonscrive sa nature  et qu’on s’interroge sur la valeur de l’alternative proposée. Il se pourrait en effet, que le moi ne soit ni ce qui se manifeste, ni ce qui se cache, mais que s’inscrivant dans le temps, il soit  en devenir.

I – L’expérience du moi

A – la manifestation du moi comme sentiment  ou l’évidence du moi

C’est au travers du sentiment de notre existence que l’expérience la plus quotidienne nous donne un rapport à nous même, au travers des sensations les plus élémentaires comme le chaud ou le froid, la soif, la faim.. C’est la  conscience immédiate du moi, conscience dans laquelle le moi saisit son identité simple et où en l’occurrence il se manifeste de manière quasi spontanée sans chercher à aucun moment à se dérober. « Je suis, j’existe », ce propos, détourné du sens que lui attribue Descartes,  peut être jugée vraie  avant tout examen de la conscience. Toute existence humaine  est affirmation d’un moi  qui se manifeste par le simple fait de vivre. Le moi en tant que réalité à laquelle nous sommes le plus immédiatement confrontés, semble être d’une clarté, d’une distinction, d’une évidence qui n’exige aucun examen.  Le moi se manifeste dans l’évidence de la certitude sensible où le moi est moi et se donne comme tel, c’est-à-dire comme un être simple qui, de part en part, adhère à lui-même. C’est pourquoi, nous expérimentons notre existence à chaque moment au travers de ce moi dont nous ne nous distinguons pas. Mais de fait, il se manifeste sans se révéler puisqu’il ne dit rien de ce qu’il est. C’est dans l’évidence sensible que le moi se dérobe à toute connaissance possible. Ainsi la plus grande clarté serait aussi la plus grande obscurité dans la mesure où le moi semble s’offrir tout en se dérobant. Est-ce à dire pour autant que le moi se cache ? Ne faudrait-il pas d’abord  se demander qu’est ce qui se manifeste de ce moi ?

B – la manifestation du moi comme perception

Sortit  du simple sentiment de notre existence,  la manière dont nous nous expérimentons ne semble jamais univoque. Nous ne doutons pas en effet d’exister, pourtant nous sommes dans l’incapacité de dire ce qu’est ce moi. Souvent même, nous avons le sentiment que nous ne correspondons pas vraiment à ce que nous sommes, ou en tout cas, que nos actes ou nos sentiments sont en décalage avec ce que nous pensons de nous même.  Si je ne pensais pas être capable de faire une chose pareille, pour reprendre l’expression courante,  c’est bien parce que je ne me  percevais  pas ainsi. La nature du moi serait donc  une question de perception. Si bien qu’il faudrait alors distinguer le moi tel qu’il est en lui-même de la manière dont il se donne à voir.  Ce qui revient à supposer l’existence d’une duplicité ou tout au moins d’un décalage entre moi et moi, comme si tout en se manifestant, il restait au fond de nous-mêmes un moi enfoui et  insaisissable auquel le moi qui se manifeste se rapporte nécessairement comme à son fondement.  Plus simplement, il faut peut-être distinguer l’opinion que l’on a de soi de la manière dont nous nous manifestons  dans le monde.  En ce sens le moi qui se manifeste ne dit peut-être rien de ce que nous sommes réellement, mais peut-être tout de ce que nous pensons ou désirons être. Le moi qui se manifeste ne serait qu’un moi d’apparat en quelque sorte, un habit toujours prompt à cacher ce que nous sommes réellement. Nous serions donc toujours l’autre de ce moi , à moins de considérer que le moi se résorbant totalement dans sa manifestation, sa nature est  de l’ordre de l’apparence. Ainsi le moi qui se manifeste ne renverrait pas à son double, mais une sorte d’abîme, qui ne serait pas l’abîme d’orgueil définit par Pascal dans les  Pensées[1], mais plutôt cette sorte de fiction décrite par Baudelaire dans ses Ecrits sur l’art lorsque, parlant de la femme,  il comprend que son mystère ne cache rien,  sinon sa vacuité. C’est en ce sens que la femme est inséparable de son costume. Pure apparence donc,  comme l’est peut-être le moi. Néanmoins, si le moi est bien ce qui se manifeste, alors il faut comprendre ce que recouvre l’idée même de manifestation.

C – l’existence du moi caché

Seul peut être dit manifeste ce qui est d’une totale évidence Or qu’est ce que l’évidence sinon le fait de voir[2] (ou d’être vu). Ainsi, le moi ne serait manifeste que pour autant qu’il soit vu ou rendu visible par ses actes ou par l ‘expression de ses pensées ou de ses sentiments. Mais le moi, lui-même,  n’est repérable nulle part, puisque en dehors de ses manifestations visibles,  le moi semble ne pouvoir exister. Ses manifestations constituent le moi  comme un phénomène, ce qui permet son surgissement dans le réel  . En un mot, sans sa manifestation, le moi n’aurait pas le pouvoir d’apparaître à notre  conscience, ni à celle des autres. Il faut que le moi s’affirme, et qu’il marque en quelque manière le réel pour exister. Et a contrario le monde lui-même semble acquérir une réalité que  par la manifestation du moi. Je me manifeste dans un monde dont je saisis la réalité et qui à son tour apparaît à ma conscience. Il y aurait une interaction entre la manifestation du moi et celle du monde. Interaction nécessaire  qui, d        ans la Phénoménologie de la perception  fera dire  à Merleau-Ponty, que « la conscience de soi et celle du monde sont contemporaines ». Il faut penser un rapport de réciprocité. Ainsi un moi caché ne serait rien puisque précisément,  ne se manifestant pas, il ne pourrait  avoir d’existence repérable et le monde n’étant rien pour lui, il ne pourrait exister pour le monde. Si le moi est ce qui se manifeste, il faut dans ce cas que son être se résorbe totalement à la fois dans ses manifestations  et dans ce qui se manifeste c’est-à-dire dans ce dont nous avons conscience, comme si tout ce qui constitue notre conscience serait encore une manifestation du moi. Mais dans ce cas où passe la frontière entre le monde et moi et qu’est-ce qui permet de distinguer la fiction du réel ?

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