Le Roman Inachevé - Louis Aragon
Commentaire de texte : Le Roman Inachevé - Louis Aragon. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Baptiste Pepin • 29 Novembre 2015 • Commentaire de texte • 1 608 Mots (7 Pages) • 8 420 Vues
Commentaire de texte :
Comment le poète s’adresse-t-il à l’être aimé ?
Le texte à l’étude est un poème en vers libre de Louis Aragon extrait de son recueil Le Roman Inachevé parue en 1956. Dans ce recueil, dédié à Elsa Triolet, il se penche sur sa vie passée et lui donne ainsi une forme d’autobiographie poétique où il pèse le poids des rêves et des souffrances, des amours, des déceptions et des échecs. Dans le poème « Je suis venu vers toi », le poète évoque sa vision de l’amour aussi originale que personnelle. Le thème est aussi celui de la passion d’un homme pour sa femme et c’est également celui de la nature qui est omniprésente dans ce poème. Comment le poète s’adresse-t-il à être aimé ? L’étude de la dimension lyrique de ce poème sera suivie de l’analyse de la vision de l’amour donné par le poète dans ce poème.
Avant même d’évoquer les thèmes de ce poème, on trouve tout d’abord une anaphore en « je » qui permet au poète de s’exprimer en son nom propre et de se mettre en scène, cette anaphore nous indique qu’il s’agit ici d’un registre lyrique et donc ainsi d’une dimension lyrique dont nous continuerons de montrer la présence dans la suite de notre développement. Par cette voix singulière, le poète va ainsi pouvoir nous faire part de ses sentiments, de sa vision de l’amour ainsi que de la passion qu’il éprouve pour sa femme.
En effet, les thèmes de ce poème sont très généraux. On trouve tout d’abord le thème de l’amour qui est d’ailleurs omniprésent dans la poésie lyrique, mais, le vocabulaire choisi par le poète nous montre également la présence du thème de la nature : « forêt » ; « pierre » ; … qui est lui aussi très présents dans les poèmes lyriques.
De part une abondance de comparaisons ; « je suis venu vers toi comme va le fleuve à la mer », « je t’ai donné ma mémoire comme une boucle de cheveux » ; le poète nous fait également part de ses sentiments pour sa femme. De plus, tout est dit indirectement ; grâce à une subtile métaphore filée du début du poème, on comprend qu’il a « quitté tout pour » elle, ses « amis », son « enfance » et on apprend ainsi que le poète était fou d’amour pour cette femme, jusqu’à tout abandonné pour elle. Par ailleurs, les sentiments du poète sont également soulignés par le vocabulaire des émotions et des sentiments : « pleure », « amoureux ». Enfin, le dernier vers du poème est d’autant plus frappant qu’il reprend par une comparaison l’expression des sentiments du poète : « Et quand tu sors je suis malheureux comme ton miroir » ; par cette comparaison, le poète nous dit que comme un « miroir » lorsque personne ne se regarde dedans, il est « malheureux » lorsque sa femme n’est pas là ou que tout du moins, il ne la voit pas. Le fait que le poète nous fasse part de ses sentiments nous permet donc une fois de plus de confirmer la présence du registre lyrique dans ce poème.
Le lyrisme d’un poème se ressent aussi dans sa forme et dans sa musicalité. Ce poème étant écrit en vers libres, ce ne sont donc pas les rimes, les strophes ou bien encore la métrique des vers qui donne sa musicalité au poème mais c’est par le langage que le poème crée son propre chant ; les anaphores en « je » scandent le poème et soulignent le caractère obsédant de l’état du poète et de ses sentiments. Ainsi, cette anaphore ajoute au poème un effet de musicalité tout comme l’allitération en « m » qui souligne un effet d’écho de vers en vers tout au long du poème : « mer », « immensité », « comme », « mémoire », « mon » … Enfin, la métrique des vers étant irrégulière, ceci peut également avoir un effet de rythmique désordonnée dans le poème et nous pourrions penser, que ce rythme sans tempo fixe, retranscrive le sentiment d’être perdu et de ne plus vraiment savoir où nous en sommes que pourrait éprouver le poète lorsque sa femme n’est pas là.
Tout au long du poème, nous allons pouvoir relever le champ lexical de la nature avec lequel le poète va chercher à établir une correspondance avec ses sentiments. « Comme un grand vent amoureux d’une forêt », le poète enlace ici son amour pour sa femme dans le « vent amoureux d’une forêt ». De plus, le poète dit même au début du poème avoir « sacrifié » ses « montagnes », un autre rapport à la nature en lien avec l’amour pour sa femme. Aragon utilise donc la nature pour faire passer une partie de ses sentiments tout en permettant au lecteur de comprendre leur nature. Enfin, Aragon se compare à de la « poussière » que l’on « chasse », à une « pierre usée » par le passage de l’être aimée ; on trouve même un parallélisme de construction sur ce thème de la nature entre plusieurs vers : « Je suis la poussière qu’on chasse au matin de la maison », « Le lierre qui croit sans qu’on le remarque », « Je suis la pierre usée à force que tu passes » … On peut également relever des personnifications où l’auteur donne vie à la nature : « un grand vent amoureux ». Il en va même à faire une allusion à la fidélité en parlant du « lierre qui croit sans qu’on le remarque/ Jusqu’à ce qu’on le mutile dans sa fidélité ». La nature est donc bien présente dans ce poème de pleins de nuances toutes différentes.
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