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Victor Hugo, " Crépuscule ", Commentaire Composé

Note de Recherches : Victor Hugo, " Crépuscule ", Commentaire Composé. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  6 Décembre 2014  •  2 391 Mots (10 Pages)  •  4 925 Vues

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Ce poème composé de sept strophes de quatre vers en alexandrins, est extrait des Contemplations, recueil de poésie de Victor Hugo, composé de 158 poèmes rassemblés en six livres, publié en 1856. Hugo expérimente le genre de l'autobiographie versifiée.

Le souvenir prend donc une place prépondérante. Hugo aborde les thèmes de l'amour, de la joie, mais aussi de la mort et du deuil et exprime sa foi.

Dans ce poème qui relève à la fois du registre lyrique et argumentatif, Hugo se fait l'interprète d'un dialogue imaginaire entre un brin d'herbe et un tombeau et conseille au lecteur d'aimer, d'être heureux, de profiter de la vie car, selon lui, "Dieu veut qu'on ait aimé".

Comment s'exprime le sentiment amoureux dans ce poème ?

Nous étudierons dans un premier temps la dimension descriptive du poème, puis sa dimension argumentative et nous analyserons enfin la vision mystique dont témoigne ce poème.

I/ Une description sous forme de « tableaux »

Le poème débute par une description au présent de l'indicatif : "l'étang frissonne", "la clairière apparaît", "les arbres sont profonds, "les branches sont noires". Les deux premiers verbes sont un verbe d'action au sens figuré ("frissonne") et un verbe de perception ("apparaît"), les deux autres des verbes d'état.

L'alternance des verbes d'état et des verbes d'action et de perception préfigure la suite du poème : un paysage statique qui va s'animer et s'éclaircir peu à peu : d'abord un étang dont les eaux mortes ont des reflets moirées, puis une clairière au fond d'un bois profond et ténébreux, puis des chemins bruns peuplés de promeneuses en robe blanches, puis un cimetière plantés d'ifs, puis des couples passant sous des noisetiers et enfin une chaumière sous le ciel étoilé

"Les arbres sont profonds" : ce ne sont pas les arbres qui sont profonds, mais la forêt. On parle d'hypallage : on paraît attribuer à certains mots d'une phrase ce qui appartient à d'autres mots de cette phrase, sans qu'il soit possible de se méprendre au sens. Selon Guiraud, le procédé relève de l'esthétique du vague ; il tend, en supprimant le caractère de nécessité entre le déterminé et le déterminant, à libérer ce dernier. L'hypallage devient ainsi une variété de l'irradiation. (Bernard Dupriez, Dictionnaire des procédés littéraires). "Les arbres sont profonds et les branches sont noires" : l'hypallage évite le cliché "la forêt est profonde", mais permet également de créer par irradiation une atmosphère d'obscurité, de "noirceur".

"Les sentiers bruns sont pleins de blanches mousselines" : la mousseline est une étoffe de coton blanc. Les blanches mousselines désignent à la fois l'étoffe et, par métonymie, les promeneuses portant des robes de mousseline. V. Hugo veut "faire voir" la blancheur des robes ; des couleurs et des formes, plutôt que les promeneuses. Les deux premières strophes brossent un tableau aux dominantes noires, brunes et blanches. On pense à l'Embarquement pour Cythère de Watteau où l'on voit des couples d'amoureux qui s'embarquent pour l'île où la mythologie grecque fait naître Aphrodite, la déesse de l'amour.

Les blanches mousselines" répondent aux "blanches moires" (les reflets changeants, mat ou brillants de certains tissus).

Les deux dernières strophes, comme les deux premières sont des tableaux, des hypotyposes. "L'hypotypose peint les choses d'une manière si vive et si énergique qu'elle les met en quelque sorte sous les yeux, et fait d'un récit ou d'une description, une image, un tableau ou même une scène vivante." (B. Dupriez, Dictionnaire des procédés littéraires). Le lecteur "voit" une chaumière sous le ciel étoilé, un faucheur, un ange aux ailes obscures qui flotte dans le vent.

II/ La dimension argumentative du poème

La première strophe se termine par une question qui sera reprise au début de la seconde strophe, avec une variante : "Avez-vous vu Vénus à travers la forêt ?"/"Avez-vous vu Vénus au sommet des collines ?"

Le poète s'adresse "à ceux qui passent dans l'ombre", c'est-à-dire aux personnages qui peuplent sa vision, mais aussi au lecteur. Vénus désigne par syllepse de sens la planète qui se lève, appelée aussi étoile du soir, étoile du matin, ou "étoile du berger" et la déesse de l'amour.

Le poète se place du point de vue d'un vieillard qui est plus proche du tombeau que du brin d'herbe et s'adresse au lecteur pour lui transmettre la leçon du dialogue entre le brin d’herbe et le tombeau, à travers une vision religieuse romantique, inspirée du Génie du Christianisme de Chateaubriand.

Cherchant à persuader plutôt qu'à convaincre, le poète s'adresse davantage aux émotions et aux sentiments du lecteur qu'à sa raison. Multipliant les interrogations oratoires : "Avez-vous Vénus à travers la forêt ?", "Avez-vous vu Vénus au sommet des collines ?" et les phrases exclamatives : "aimez vous !", "Vivez !", Aimez vous !"... il presse les hommes de profiter de la vie, de vivre l'instant qui passe et d'aimer, plutôt que de songer à la mort. Il va jusqu'à utiliser un argument faisant appel à l'autorité suprême : "Dieu veut qu'on ait aimé."

Ces conseils peuvent sembler paradoxaux. La religiosité moralisatrice du XIXème siècle recommandant plutôt aux hommes de sauver leur âme en menant une vie vertueuse, plutôt que "d'aimer".

"L'herbe s'éveille et parle aux sépulcres dormants" : il s'agit d'une sermocination (sorte de prosopopée) : "Que dit-il, le brin d'herbe ? et que répond la tombe ?" : seul un être humain, un être parlant peut interpréter les "confuses paroles" du monde. Seul un être humain, un être parlant, peut prêter un langage aux choses ; c'est la vocation même

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