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Il Pleut- De Guillaume Apollinaire

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Par   •  21 Juin 2014  •  1 239 Mots (5 Pages)  •  1 889 Vues

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Un texte où la poésie se veut création absolue :

Absolue au sens de détachée, comme chaque mot l’est, à part comme une gouttelette, en échappant même aux apostrophes (cf. cest, avec cette graphie qui n’est pas sans évoquer le démonstratif médiéval), à l’initiale des phrases qui ne présentent pas de majuscules, à l’absence évidente de ponctuation, alors que chaque colonne de lettres, de biais, forme un ensemble, sinon cohérent quant au sens, du moins syntaxiquement correct : si l’on dit, communément : il pleut des cordes, pourquoi pas des voix… De fait, ces lignes verticales – par opposition à la prose horizontale - s’imposent visuellement par la chute des lettres incarnant la pluie. Avec d’ailleurs les mots «gouttelettes» et «bas» en fin de phrase. Détaché visuellement, le texte l’est aussi par rapport à notre réalité banale : nous flottons en pleine ambiguïté : «elles» renvoie-t-il à voix ou à : «femmes». Au reste, une voix ne peut pleuvoir, ce d’autant plus que la comparative conditionnelle procède en fait par allusion, sans renvoyer à quelque chose de tangible. La réalité devient évanescente, et tout a disparu : seul subsiste le texte. Car le «même» souligne le néant dans lequel tout ceci est… tombé : mort, souvenir. L’apostrophe à la ligne… suivante ? obscurcit encore plus le sens, si c’était possible : vous ; le «il» d’il pleut semble même devenir personnel, avec la métaphore superbe et idéalisatrice : merveilleuses rencontres de ma vie… C’est donc bien un souvenir autobiographique, comme rendu charnellement : «rencontre», mais «souvenir» dont nous avons comme palpé l’évanescence . N’est-ce point là «gouttelettes» ? Et le «vous» de s’adresser alors à la pluie elle-même ? Le poète rompt aussitôt ce rapport personnel – qui assure aussi la compréhension, avec l’image : «nuages cabrés» où la métaphore se file sur : «hennir», ce terme amenant à : «auriculaire», alors que le pléonasme : «tout un univers» (déconcertant au demeurant : comment pourrait-il y avoir plusieurs univers ?) amènerait plutôt, chez le poète de zone, l’expression : villes tentaculaires… Pourquoi aussi cet auriculaire ? Par l’organe touché, Apollinaire n’évoque-t-il pas le fracas des «villes» modernes ? La suite vient dénier toute pertinence à la recherche de compréhension globale de cette poésie: à qui s’adressent les deux impératifs : «écoute», après d’ailleurs un : vous, qui perd, après-coup, toute référence ? l’anacoluthe après les deux anaphores («s’il pleut», en une sorte de réponse en interrogative indirecte à une question qui n’a pas été posée, vu la déclarative initiale : «il pleut», puis «tomber» ; l’identité phonique entre «pleut» et «pleurent», l’harmonie des voyelles fermées ou nasales participent à l’impression de nostalgie : «regret», «ancienne», qui perdurent grâce au présent ainsi qu’à la conjonction de subordonnée temporelle durative : «tandis que» ; la demande revient, plus instante : «écoute», comme si l’ordre n’avait pas été accompli, donc ne s’était pas incarné, réalisé. La libération indiquée par : «tomber les liens» semble controuvée et spécieuse : les liens se dressent sous nos yeux, comme des barrières de prison, comme le confirme : «te retiennent» (avec un cod «te» d’interpellation brutale, angoissant) au présent de constatation objective, emprisonnement confirmé par les hiatus : «en haut et en»…Le «bas» est bien la fin du poème, fin en suspens puisqu’il lui manque une vingtaine de caractères typographiques pour toucher le but… final, sans point d’arrêt. Nous sommes donc de prime abord déconcertés – et c’est bien voulu par Apollinaire vu son choix typographique.

Il

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