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Qu’est-ce qui est posthumain ?

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Par   •  5 Mai 2023  •  Cours  •  2 609 Mots (11 Pages)  •  344 Vues

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Qu’est-ce qui est posthumain ?



D'une manière générale,
la technique désigne – ou plutôt désignait – la capacité, pour l'être humain, d'agir sur son environnement et sur la matière. La bombe atomique ou la perspective d'une gelée grise n'échappent pas à cette catégorisation. « Un postulat anthropologique est que les techniques matérielles s’appliquent au milieu: c’est par rapport au monde que l’homme est légitimement homo faber. Par rapport à lui-même, il est légitimement seulement homo loquax » . Cependant, l'une des particularités les plus saisissantes des technologies convergentes – et plus particulièrement les biotechnologies – réside dans le fait qu'elles ne visent plus simplement à agir sur et à transformer le monde qui entoure l'homme, mais aussi à agir sur et à transformer l'homme lui-même. La révolution opérée  est également une révolution anthropologique qui modifie le rapport que l'homme entretient à lui-même. D'un coté, le logos perd le privilège de définir à lui seul la spécificité́ humaine. De l'autre, la main se voit revalorisée comme symbole de la puissance technicienne humaine et se réaffirme comme constituant important de la spécificité humaine. « Ainsi, l'homme se définit autant, et même peut être plus, comme homo faber, que comme homo sapiens » La capacité pour l'homme du XXI siècle d'agir sur son propre corps, de le modifier, de le transformer, de l'altérer et d'en prendre le contrôler est, pour certains, une perspective effrayante . Comme le remarque Gilbert Hottois, les biotechnologies constituent un danger et bouleversent notre rapport au monde en concrétisant « les moyens effectifs d'une auto-invention physique et pas seulement symbolique ». D'une manière générale, l'histoire de la technique est une histoire de transgressions, de ruptures de l'ordre établi. On observe ainsi régulièrement des controverses polarisées entre deux camps. D'un côté́, on trouve des conservateurs dont l'objectif est de préserver l'institution en place, mais surtout de sauvegarder l'idée d'une théodicée. De l'autre côté, on retrouve la figure du savant, du magicien dont l'ambition consiste à élever l'humanité́ au rang de Dieu, voire de faire chuter ce dernier afin d'instaurer une anthropodicée. Le projet transhumaniste menace plus que jamais le Créateur, dans la mesure où les ambitions de la technique sont aujourd'hui, par le biais des anthropotechnies, susceptibles d'être réalisées. L'homme devient omnipotent. Par ailleurs, le transhumanisme a également ceci de particulier qu'il envisage également la fin de l'anthropodicée. Ray Kurzweil prétend ainsi qu'aux environs de 2045, l'humanité́ verra l'avènement d'une Singularité́ technologique. Ainsi, en considérant le développement exponentiel des nouvelles technologies et en particulier de l'informatique, il est probable que « l’homme réussira à créer une machine consciente et dotée d'une intelligence supérieure à celle des humains actuels. [...] La création d'une super-intelligence susceptible également d'améliorer l'intellect naturel humain marquera, selon les prévisions, la fin de la civilisation humaine et le début d'une nouvelle ère » , le début de l'ère post humaine. Si certains considèrent que les nouvelles potentialités techniques sont une réelle menace pour l'humanité́, « d'autres rappellent que "l’espèce humaine a dès le départ été une "espèce technique", c'est-à-dire artificieuse, qui, inlassablement s'invente et se réinvente elle-même". Dans le cadre de cette hypothèse, il n'y a ni post humanisme, ni transhumanisme, mais une simple variation continue de l'humain qui utilise sa neuro plasticité́ et les méthodes feedback dont il dispose pour apprendre et améliorer ses capacités.

Comment distinguer les termes transhumanisme, posthumanisme, posthumain et transhumain ? Une première analyse d'ordre sémantique nous amène à penser que « transhumain » peut signifier « de l'autre côté́ de l'humain », « humain de transition », ou encore « humain transcendé/dépassé ». Il en va de même pour le terme de « posthumain » qui semble néanmoins plus simple, le préfixe « post- » étant plus commun. Littéralement « post humain » est quelque chose qui vient après l'humain. Faut-il alors entendre le transhumain, ou transhumanisme, comme une étape vers un état posthumain? Le transhumanisme pourrait s'entendre comme étant un mouvement s'interrogeant sur la nature de l'humain, de la perspective de son altération ou de son obsolescence.

D'un point de vue anthropologique, certains soulignent le fait que "l'humanité́ change un peu d’espèce à chaque fois qu'elle change à la fois d'outils et d'institutions" » Si les transhumanistes s’intéressent à la thématique de l'homme artificiel et portent un intérêt tout particulier au développement de l'intelligence artificielle, leur souci principal est avant tout d'orienter la médecine thérapeutique vers une médecine méliorative. Dans les deux cas la médecine se positionne en fonction d'une certaine norme de ce qu'est la santé. L'usage thérapeutique consiste à rétablir un état de santé́ supposé normal, tandis que l'usage mélioratif consiste à élever l'individu au-delà̀ de cette norme. L'OMS définit la santé comme étant « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne [consistant] pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité́ » La « proposition systématique de diagnostic » qui peut être interprétée « comme une incitation, une injonction [...] à ne pas donner naissance à un enfant qui serait atteint d'un handicap, [...] à ne donner naissance qu'à des enfants indemnes de toutes La controverse est rude dans la mesure où certains estiment contraire à l'ordre naturel de créer des bébés sur mesure. Cette réticence peut prendre deux formes. La première considère que choisir les caractères génétiques de son enfant (plutôt que de laisser faire le hasard) revient par avance à réduire son autonomie et son autodétermination . La contingence permettrait ainsi de pouvoir se faire auteur de sa vie, tandis que la sélection des caractères génétiques par les parents priverait l'enfant de cette capacité. Il ne serait plus l'auteur de sa vie mais soumis à une hétérodétermination, à des fins qui ne sont pas les siennes. La seconde réticence relève de la justice sociale : à l'instar de la société́ décrite dans Le Meilleur des mondes un maximum d'options génétiques à leurs enfants tandis que les pauvres ne le pourront pas, rendant ainsi un peu plus visible la séparation des classes. « On pourra de plus en plus deviner l'origine sociale d'un individu jeune d'après son aspect et son intelligence ; si quelqu'un n'a pas atteint la classe sociale à laquelle il aspirait, il tendra à incriminer les mauvais choix génétiques de ses parents plutôt que sa propre responsabilité́ » .

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