Peut-il être juste de désobéir aux lois ?
Dissertation : Peut-il être juste de désobéir aux lois ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mhijmhlkgl • 15 Mai 2023 • Dissertation • 4 216 Mots (17 Pages) • 467 Vues
Peut-il être juste de désobéir aux lois ?
Dans Antigone de Sophocle, Antigone désobéit à son oncle Créon, le roi de Thèbes et rend les hommages funèbres à son frère Polynice, malgré l'interdiction formelle de Créon. Se conduit-elle alors de façon injuste en désobéissant à la loi ? Peut-il donc être juste de désobéir aux lois ? Le sujet laisse entendre que certaines des lois juridiques peuvent être brisées. Il semble pourtant à première vue que désobéir aux lois juridiques soit injuste. Ces lois s’inspirent des lois naturelles, du droit naturel qui repose sur les normes et les valeurs idéales propres à la nature de l’homme, indépendamment de toute détermination temporelle ou spatiales. Ainsi, il est même contradictoire d’associer les termes lois et désobéir ensemble. En effet, les lois permettent de maintenir l’équilibre dans les sociétés et donc la cohésion, elles définissent nos droits et nos devoirs et organisent nos sociétés. Produites d’une décision commune, prises par les représentants du peuple, les lois sont des règles partagées. Elles servent de repères communs pour distinguer ce qui est juste de ce qui ne l’est pas. Ainsi pour vivre le plus en paix possible, éviter l'arbitraire et la violence engendrés par la domination d'un groupe ou d'un individu imposant sa volonté en matière de justice, les hommes ont besoin de lois. Pourtant parfois la loi heurte notre sens de la justice. Une loi ou l’application d’une loi semblent injustes au nom de l’idée que nous nous faisons, nous, de ce qui est juste ou pas, en fonction de nos croyances et nos convictions propres. Dans ce cas, obéir à loi n’est pas considéré comme juste. Peut-il alors être juste de désobéir aux lois ? Est-il donc possible d'enfreindre la loi juridique et néanmoins d'être juste ? A priori, on pourrait penser que la loi étant une règle de justice, celui qui la viole est nécessairement injuste. Mais la loi est-elle toujours juste ? La loi découle-t-elle forcément de la morale ? Et quand ce n’est pas le cas, faut-il continuer à lui obéir ou peut-on la transgresser au nom d’une cause supérieure ? Pour répondre à cela nous allons voir dans un premier temps qu’il est nécessaire d’obéir aux lois pour le bien de tous. Ensuite nous verrons que certaines lois peuvent cependant nous paraitre injustes et justifier la désobéissance. Enfin nous nous questionnerons sur les limites de cette dernière.
Il est vrai que désobéir aux lois semble injuste. Il est même interdit d’y déroger et nécessaire de les suivre. On peut aussi dire que c’est la loi qui nous indique ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. Par « juste », que l’on étend au terme justice on reprend ici le sens que Platon donne à ce terme qui se base sur son caractère moral : chacun doit « faire le sien », et ne pas chercher à faire ce qui ne lui revient pas. Ainsi les lois sont issues de la création d’un contrat commun dans les sociétés. Autrement dit, les hommes par le biais de la société et des régimes représentatifs choisissent eux-mêmes leurs propres lois. Ainsi il parait assez illogique de vouloir déroger aux règles que l’on se soit nous-même imposé. C’est comme tricher à un jeu où l’on a nous-même inventé les règles. En tant que membre à part entière de la société et participant à l’élaboration plus ou moins directe des lois, il est évident que les lois que l’on s’impose à soi-même et par extension aux autres sont justes. D’après Jean-Jacques Rousseau : "L'obéissance au seul appétit est esclavage et l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté". Donc dans un régime démocratique, le vote collectif de la loi permet de résoudre le problème en donnant au critère de justice choisi pour norme, une légitimité qui le rend incontestable. Chacun est dès lors obligé de respecter la loi, au risque d’être injuste. Ainsi une loi juste imposera les mêmes restrictions à chacun, donc les mêmes droits et les mêmes devoirs. Pour cela le rôle de la loi est de permettre à chacun d'exercer sa liberté, ce qui exige de poser des limites. En effet, les hommes, ne pouvant se passer les uns des autres, ont donc besoin de règles pour vivre en société afin que la « loi du plus fort » n'y règne pas. C'est « l'insociable sociabilité des hommes » dont parlait Emmanuel Kant. Les lois sont alors des conventions considérées comme justes. De plus, le droit implique l'égalité de tous devant la loi. En garantissant la liberté et l'égalité, la loi fixe les limites entre ce qui est juste et ce qui est injuste. Et plus encore, elles définissent le juste afin de préserver les hommes de leur égoïsme spontané. Ainsi si on se soumet aux lois des hommes, on se soumet à une morale de société. En effet la morale n'est qu'au final rien de plus qu'un ensemble de loi éthique. Et en général cette morale vise le respect d'autrui et de sa propre personne. Les lois sont dans leur fondement inspiré de la morale comme la maxime « Tu ne dois pas voler » et la loi prévoit ensuite des sanctions. Donc si mon voisin empiète sur mon terrain, il ne respecte pas la loi sur la propriété privée et prend alors quelque chose qui me revient. Il crée donc de l'injustice. Dans ce cas, c'est bien la loi qui permet de distinguer entre conduites juste ou injuste. La loi lui imposera par la suite une punition pour avoir déroger à la règle. Sans loi, tout le monde interpréterait à sa manière la justice. Il y aurait autant d'avis sur la justice que d'hommes et cela entraînerait un état de conflit permanent dans lequel personne ne pourrait réellement profiter de sa liberté.
De plus la loi permet d’organiser la paix sociale et doit être respectée pour garantir la stabilité de la société. Autrement dit c’est par la création des nombreuses règles dictées par la loi juridique que la sécurité est garantie. Cette loi juridique renvoie à l’idée de droit positif. C’est le droit créé par les hommes, « posé » par eux. Il est donc juste qu’il y ait des lois. Les lois sont là pour pacifier les rapports sociaux, sans cela menacés par la violence et le cycle de la vengeance. Il est donc nécessaire de s’y conformer. Cela ne peut pas ne pas être et ne peut pas être autrement qu'il n'est. C’est ce que pense notamment le philosophe britannique Thomas Hobbes. Pour Hobbes, la vie en société exige l'obéissance de tous à la loi ; il est juste d'obéir aux lois et il est toujours injuste de leur désobéir. Dans l'état de nature, les hommes sont exposés à la mort car "l'homme est un loup pour l'homme". Tous s'attaquent à la vie des autres et convoitent leurs biens. C'est la "loi du plus fort". Dans l'état de nature où règne un état de guerre permanent, les hommes vivent dans la crainte perpétuelle de perdre leur vie et leurs biens. C'est pourquoi, ils renoncent à la liberté de faire ce qu'ils veulent et acceptent, pour assurer leur sécurité, d’obéir aux lois incarnées par le Souverain. Ce mythe exprime bien la raison d'être des lois : sans les lois, chacun déciderait de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas et les intérêts des uns entreraient sans cesse en conflit avec ceux des autres. Les règles du droit définissent donc ce qui est permis et défendu, en sorte de permettre à chacun d’exercer sa liberté sans entraver les autres. Étymologiquement le terme « droit » vient du latin rectus, nous renvoyant à la rectitude, c’est-à-dire à l’honnêteté et au bien. Alors que nous serions enclins à agir égoïstement en négligeant autrui, la loi nous aide à savoir ce qui est juste. On observe cette tendance clairement lorsque les guerres éclatent. Les lois et le droit international ne sont alors plus respectées entrainant le chaos dans le pays. Ainsi les lois permettent donc l’ordre et la sécurité. De plus si les lois ne sont pas respectées, cela provoquerait un désordre, amplifiant ainsi l’injustice présente, pouvant même aller jusqu’au chaos.
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