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Le respect est-il toujours hypocrite ?

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Par   •  25 Mai 2023  •  Guide pratique  •  5 461 Mots (22 Pages)  •  358 Vues

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La technique de la dissertation par l’exemple

Sujet : « Le respect est-il toujours hypocrite ? »

REGLE N°1/ Après avoir consacré 10mn à examiner la forme du sujet (prêtez attention aux adverbes), ce qu’il évoque (prenez des exemples concrets) et ce qu’il implique, clarifier et problématiser les notions jusqu’à dégager le problème qui se cache derrière l’intitulé.

REGLE N°2 : Commencez toujours par clarifier, problématiser et illustrer la notion secondaire de l’intitulé (celle qui n’a pas été développée en cours)

Par exemple, dans l’intitulé « Le bonheur est-il un luxe ? » la notion secondaire est celle de « luxe ». La notion principale est « le bonheur » et elle a fait l’objet d’un cours.

 

Récapitulatif du travail effectué durant la séance :

Nous avons tout d’abord clarifié la notion d’hypocrisie. « Attitude consciente de dédoublement qui produit de la confusion », avions-nous dit. L’hypocrite est l’acteur, l’homme du masque qui désunit dans sa conduite la pensée et le dire. L’hypocrite ne pense pas ce qu’il dit, il ne dit pas ce qu’il pense ! L’hypocrisie ne saurait constituer une valeur sociale puisque la reconnaître en droit conduirait à rendre caduque toute forme de contrat qui présuppose au contraire la confiance. Une société dans laquelle chacun saurait l’hypocrisie de son voisin et se saurait hypocrite serait tout simplement impossible. Un minimum de croyance et de confiance est requis pour que nous vivions ensemble. Mais nous avons aussi remarqué qu’en fait l’hypocrisie apparaissait comme nécessaire à ce même lien social. Quiconque vit selon la vérité et bannit le mensonge par omission se retrouve très vite marginalisé, voir sacrifié par les siens ! L’hypocrisie s’oppose ainsi à la sincérité de l’homme authentique en quête de vérité.

Or le respect n’est-il pas d’abord la forme la plus éminemment sociale de la relation qui nous unit à notre prochain ?

Pour répondre à cette question nous avons en second lieu clarifié la notion de respect : « attitude ou sentiment qui institue une distance préservant l’intégrité », avons-nous dit ! L’étymologie est venue compléter notre enquête en ajoutant une idée témoignant de la valorisation sociale du respect : « respecter quelqu’un, c’est ne pas le juger et se remettre en question face à lui, bref le considérer ! »

Nous avons alors envisagé une fausse piste qui révèle notre ignorance historique et anthropologique en posant la question : « Y-a-t-il des objets respectables universellement en eux-mêmes ? », si bien que les respecter révèlerait notre authenticité. La leçon à tirer de ce parcours infructueux réside dans le fait que l’orientation du questionnement sur l’objet conduit toujours vers une impasse. En effet, l’objet (ici l’objet du respect) varie en fonction des époques et des cultures. Ce qui est respectable dans une époque ou dans une culture, ne l’est pas à une autre époque ou dans une autre culture.

Afin de problématiser la notion de respect que l’étymologie nous indique comme nécessairement authentique, nous avons décliné cette notion relativement aux motivations à l’œuvre dans notre conduite (besoin, désir, amour, volonté) pour découvrir les différentes formes que celui-ci prend dans la vie des hommes.

Que nous a appris cette enquête ?

Produit d’un rapport de force, dans sa forme la plus bestiale, il repose sur la menace de mort et engendre une nécessité de se soumettre pour avoir la satisfaction de rester en vie. La relation entre maître et esclave dans la traite négrière illustre cela à merveille mais on pourra également s’appuyer sur le syndrome de Stockholm. La question de l’hypocrisie se pose à ce niveau puisque la nécessité ne fait pas droit et que le consentement éphémère obtenu par le rapport de force n’ouvre pas sur la conviction sincère de son bien-fondé.

Produit d’un rapport de persuasion, dans sa forme la plus socialisée, le respect ainsi établi présuppose une conviction et met en jeu un intérêt personnel bien compris dans le cadre d’un contrat tacite. Pascal parlera de « valeurs d’établissement » dans son Discours sur la condition des grands. Le plaisir de la reconnaissance est ici le moteur du respect et la relation entre maitres et vassaux caractérise cette forme dans le féodalisme. Il s’agit bel et bien d’une soumission librement consentie, attendu que le vassal renonce à l’exercice de sa liberté (la souveraineté) au profit de sa sécurité (l’intégration). La question de l’hypocrisie se pose à ce second niveau puisque la reconnaissance ne fait pas droit, tant que son bien-fondé n’est pas établi en raison. Or, il y aura toujours une raison de critiquer le souverain car la reconnaissance ainsi obtenue n’est jamais suffisante et la reconnaissance acquise peut à tout moment être perdue. En dérivant le rapport de persuasion du rapport de force économique, Karl Marx caractérisera le contrat ainsi établi comme « un contrat de dupe ». Plus près de nous, l’idolâtrie et le fétichisme des enfants en mal de reconnaissance témoignent de la force que peut exercer l’angoisse de l’exclusion ; pourquoi suivre religieusement la mode sinon ?

Produit d’un rapport de séduction, dans sa forme la plus dévastatrice, le respect repose alors sur le divertissement inhérent au jeu et engendre une jouissance narcissique de se soumettre pour n’avoir à répondre de rien. La jouissance narcissique, qui résulte de l’impression subjective (mais fausse objectivement) d’être au centre de tout, parce que n’étant plus personne en particulier, est ici le moteur du respect. La relation entre maitre et disciple, ou idole et fans caractérise cette forme qui culmine dans le fascisme. A l’encontre du rapport de force et d’intérêt, la seule limite réside dans le décentrement qui conduit le disciple ou l’adepte à se retrouver aux marges du jeu et à devoir répondre comme Eichmann de ses actes. La question de l'hypocrisie se pose à ce troisième  niveau puisque la jouissance, par sa normalisation, abolit l’exercice de la raison mais la raison de jouir n’en reste pas moins  verbalisée quand on se retrouve en marge. Autrement dit, parce qu’il n’est pas possible de demeurer éternellement dans le divertissement et d’être à la fête du matin au soir, des moments de lucidités adviennent qui ruinent la bonne foi affirmée du touriste de l’existence, de l’insouciant.

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