Ana mendieta siluetas
Commentaire d'oeuvre : Ana mendieta siluetas. Recherche parmi 301 000+ dissertationsPar lolimopi • 15 Mars 2025 • Commentaire d'oeuvre • 2 422 Mots (10 Pages) • 32 Vues
Ana Mendieta est Née en 1948 à La Havane, à Cuba. Elle est issue d’une famille appartenant à la classe dirigeante. Après la révolution castriste, mené par Fidel Castro contre la dictature de Batista à Cuba, aboutissant à l'instauration d’un régime communiste en 1959, Le père de Ana mendieta rejoint les forces contrerévolutionnaires anticastriste. Celle-ci sera exfiltrer de cuba avec sa sœur Raquelin, en 1961 alors qu’elle n’avait que 12ans lors de l’opération Pedro Pan. Son père lui est resté à Cuba et à été emprisonné pour collaboration avec les États Unis. À leur arrivée aux États-Unis, les deux sœurs sont placées dans un camp de réfugiés puis, quelques semaines plus tard, dans un orphelinat catholique à Dubuque dans l’Iowa. Ana Mendieta a vécu son exil comme un véritable arrachement au pays de son enfance qui va marquer ces œuvres par la suite. Elle est sensibilisée à l’art lorsqu’elle est au lycée, mais elle commence réellement à étudier la peinture à l’Université de l’Iowa en 1966. Elle s’inscrit également en français au cas où l’art ne marcherait pas. Elle obtient sa licence en 1969, puis son master en 1972. On conserve de cette période une trentaine de toiles représentant pour la plupart des corps féminins, y compris le sien, inspirés de l’art précolombien et de l’art mésoaméricain. En 1972, elle intègre le programme novateur Intermedia créé en 1968 par l’artiste allemand Hans Breder à l’Université de l’Iowa, « conçu (…) non pas comme une fusion interdisciplinaire de différents domaines en un seul, mais comme un entrechoquement permanent de concepts et de disciplines». Mendieta se détache alors de la peinture pour se tourner vers des formes plus expérimentales, plus éphémères, impliquant son corps qui devient le support de ses performances. Celles-ci sont documentées par des diapositives, des photographies, des films. En découle alors une première oeuvre Glass on Body Imprints, ou l’artiste presse son corps nu contre une plaque de verre. La vision de ses traits déformés véhicule un sentiment d’aliénation. Elle en fait un commentaire contre les préjugés qu’elle avait vécus en tant qu’artiste cubaine-américaine. La série est l’une de ses premières expérimentations de l’art corporel. Elle poursuit ses recherches autour du corps qui se fond dans la nature, teste le devenir animal dans « Bird Transformation” où elle applique des plumes sur un modèle, mais elle va aussi s’intéresser au devenir végétal dans la série des « Siluetas ». Elle va fusionner avec la nature et conceptualise la notion de « corps paysage ».
Comment Ana Mendieta dans les Siluetas, utilise-t-elle son corps et la nature pour interroger son identité exilée, la mémoire collective et les enjeux politiques et féministes de son époque ?
Plan :
I. Un art en fusion avec la nature : entre body art et land art
1. L’empreinte corporelle comme marque éphémère
Ana Mendieta a produit plus de 200 œuvres dans le cadre de la série Siluetas entre 1973 et 1978, c’étaient des performances sculpturales (qu’elle appelait « earth-body works »). Elle utilisait son propre corps comme matrice pour créer des empreintes dans des éléments naturels comme la terre, le sable, la neige ou encore l’herbe. Ces œuvres appartiennent au land art et au body art, dans la mesure où elles fusionnent la nature et le corps humain dans une relation intime et spirituelle, nous sommes en plein dans l’écoféminisme. Son œuvre s'inscrit dans une vision où la femme et la terre sont intrinsèquement liées, c’est une célébration des liens profonds entre la femme et la nature. Le corps devient à la fois outil et sujet de l'œuvre.
« L’acte obsessionnel de réaffirmer mes liens avec la terre est une objectivation de mon existence. » – Ana Mendieta
On peut nottament evoquer cette oeuvre faites en 1976 dans laquelle l’artiste a creusé sa silhouette dans le sable avant d’y ajouter du pigment rouge. La performance est documentée en plusieurs photographies qui capturent la détérioration progressive de la forme : les vagues emportent le sable, dissolvent la silhouette et finissent par effacer toute trace de la présence de l’artiste. Cette disparition progressive symbolise à la fois l’éphémérité de l’existence humaine et le retour inéluctable du corps à la terre.
2. Une pratique entre performance et photographie
Mendieta considérait son art comme un processus temporaire et éphémère par nature, souvent réalisées en plein air et soumises aux éléments. Ses Siluetas étaient souvent exécutées en privé ou devant un public restreint. Cependant, la documentation photographique et vidéo était essentielle à son travail, permettant aux œuvres de survivre à leur propre disparition. Cette dualité entre l'instantanéité de la performance et la permanence de l'image fixe ou animée enrichit la profondeur de son travail.
Certaines œuvres, comme Anima (Firework Piece) (1976), illustrent cette notion de temporalité et de transformation. L’artiste utilisait parfois des forces destructrices comme le feu pour animer ses silhouettes et créer un spectacle éphémère. D’autres fois, elle laissait les éléments naturels agir seuls, comme dans Untitled (Snow Silueta) (1977), où la silhouette était progressivement recouverte par la neige.
Ainsi, Mendieta ne cherchait pas à créer des objets artistiques durables, mais plutôt à capturer des moments de transformation et d’impermanence. Elle expliquait d’ailleurs que ses œuvres étaient conçues pour disparaître, afin d’être absorbées par la terre qu’elle vénérait. Son art met en tension la présence et l’absence du corps dans l’espace.
II. Une quête identitaire et spirituelle à travers l’exil et la mémoire
1. Un lien perdu et retrouvé avec la terre
Cette séparation forcée de sa terre natale, du a son exil a profondément influencé son travail, Ce sentiment d’être déracinée ou, selon ses mots, « chassée du ventre de sa mère » a donc marqué ces oeuvre ce qui exprime une quête d’enracinement et de connexion spirituelle avec la nature. En effet elle n’a pas pu retourner physiquement à Cuba avant 1979. Cependant elle a essayé de se rapprocher le plus possible de l’héritage de sa patrie perdue puisqu’elle passait chaque été au Mexique entre 1973 et 1980, où elle réalisait une grande partie de ses Siluetas. Ces œuvres s’inspirent des croyances indigènes et de la Santería, est une religion afro-cubaine issue du syncrétisme entre le catholicisme et les traditions spirituelles des Yoruba (Afrique de l’Ouest). Elle est apparue à Cuba à l’époque coloniale, lorsque les esclaves africains, contraints d’adopter la religion catholique, ont dissimulé leurs divinités (orishas) sous l’apparence des saints chrétiens. Dans la Santería, les rituels impliquent souvent un contact direct avec les éléments naturels (terre, eau, feu, plantes), qui sont considérés comme des manifestations des Orishas (divinités). Les adeptes de cette religion réalisent des offrandes et des cérémonies où le corps joue un rôle central, en tant que canal entre le monde spirituel et le monde terrestre. Mendieta reprend cette idée dans ses Siluetas, où son propre corps ou son empreinte dans le sol devient un intermédiaire entre l’humain et la nature. Elle réalise des performances dans lesquelles son corps est recouvert de fleurs, de sang ou de feu, évoquant des pratiques rituelles de purification et de transformation similaires à celles de la Santería.
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