L'étrange Rapport Entre Le réel Et Le Faux Au Cinéma
Mémoires Gratuits : L'étrange Rapport Entre Le réel Et Le Faux Au Cinéma. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar OSEROR • 19 Juillet 2013 • 6 558 Mots (27 Pages) • 1 035 Vues
L'ETRANGE RAPPORT ENTRE
LE REEL ET LE FAUX
AU CINEMA
une intervention d'Olivier SEROR
1- Introduction
Mon but est de vous donner quelques outils de réflexion autour de la représentation du réel au cinéma : vous allez vous retrouver à accompagner des groupes de jeunes gens dans leur découverte du cinéma, notamment documentaire, que ce soit sous forme pratique avec des groupes qui ont pour but de faire un film, soit en leur parlant de films et en leur montrant des images, et je voudrais vous donner quelques clés pour les guider.
Ça passe certainement par une connaissance de ce qui a déjà été fait, donc de l’histoire des images, de l’histoire du cinéma et on va se pencher là-dessus en survolant les 100 ans de création d’images.
Et puis, puisque tout ce qui touche la création est éminemment subjectif, je vais vous montrer comment différents réalisateurs ont pu nous donner sur le réel des points de vue tout à fait différents, et nous allons en étudier plusieurs.
La question de point de vue est fondamentale quand on s’intéresse aux images : c’est une question qui peut paraître théorique mais qui est en vérité très pratique, c’est à la fois ou est-ce qu’on met la caméra, qu’est-ce qu’on filme, qu’est-ce qu’on montre, qu’est-ce qu’on ne montre pas, qu’est-ce qu’on cache, qu’est-ce qu’on dit, qu’est-ce qu’on fait dire, qu’est-ce qu’on fait sentir, avec la lumière, avec la musique, tous les outils que le cinéma met à notre disposition… C’est une question de sensation, qui mène au sens. Le point de vue au cinéma, qui est une notion assez difficile à comprendre, c’est donc au fond, on va le voir, ce qui va lier une sensation (une esthétique) à un sens (une éthique).
Pour finir, je vous expliquerai comment j’envisage mon travail dans les ateliers que j’ai pu encadrer (et je vais vous montrer le résultat d’un de ces ateliers).
2- Qu’est-ce que le réel ?
Mais pour commencer, je crois que s’intéresser à la notion de réel au cinéma doit d’abord nous faire nous pencher sur la question du réel tout court. Vaste notion, philosophique, presque… Qu’est-ce que le réel ?
Est-ce synonyme de « quotidien » ? de « établi » ? de « évident » ? de « incontestable » ? de « vrai » ?
Certainement. Mais on va aussi voir que c’est certainement plus compliqué.
Posons nous alors la question du contraire : le contraire du réel, ce serait quoi ? L’iréel…
L’imaginaire? L’artificiel ? Le rêve ? le virtuel ? Le faux ?
Moi, je ne suis pas sûr… Mais disons pour l’instant que ce qui s’oppose au réel, puisqu’on va s’intéresser au cinéma, c’est la fiction.
Alors je propose une définition du réel. Si on dit par exemple : le réel, c’est ce qui résiste. Par exemple, cette table est réelle parce que quand je pose ma main dessus, elle exerce une force en retour, une force de résistance qui empêche ma main de passer au travers…
Mais alors, si on fait maintenant le tour de ce qui résiste, on a bien sûr la table, le mur, tout ce qui est concret, les autres êtres humains, etc. mais aussi tous ces pans de la vie qui nous accablent, tout ce qui nous empêche : le marasme gluant qui nous englobe résiste à mes désirs… de conquête, de pouvoir, de gloire, tout ce qu’on veut…
Mais on a aussi d’autres choses : mon propre désir est réel lui aussi, puisqu’il résiste au monde ambiant, il me fait me lever le matin, il me fait me battre toute la journée pour que le monde, mon monde ressemble à ce que je souhaite. Ce que je rêve d’être, et pour lequel je me bas, ça aussi, c’est le réel.
Un autre exemple : vous, dans une certaine acception de ce qu’est le réel, vous êtes assez loin du cinéma, de cette pratique. Et pourtant, certains vont encadrer des films, vous allez vous emparer de cet outil, vous allez vous donner les moyens pour pouvoir le faire même si c’est encore virtuel…
Alors on voit que la notion de réel devient plus compliquée, plus intéressante aussi, parce que tout à coup du rêve, de l’artifice, de l’imaginaire, du faux entre dans la définition du réel.
Donc : Réel = ce qui résiste. Pour moi, c’est une définition possible du réel.
3- Au cinéma : le réel est reconstitué
On oppose à la fiction, une catégorie de programmes appelés documentaires.
Littré : Documentaire : « qui a un caractère de document »
Document : « Chose qui enseigne ou renseigne »
Le documentaire serait donc du côté de l’information ou du côté de la science historique voire de la science tout court.
Au 19 ème siecle, Adolphe Thiers, évoque cette conception de l’historicité : « être simplement vrai, être ce que sont les choses elles-mêmes, n’être rien de plus qu’elles, n’être rien que par elles, comme elles, autant qu’elles. »
C’est le rêve du discours scientifique sur l’histoire : une transparence parfaite entre le langage, nettoyé de ses artifices rhétoriques, et le réel. Cette transparence, le cinéma semble la réaliser. Ce rêve du XIX eme siècle, le cinéma semble l’accomplir : la reproduction fidèle, mécanique (et donc non corrompue par la subjectivité de l’œil humain). On peut croire que dans le documentaire, les événements sont là pour eux-mêmes, que nous voyons la réalité elle-même.
Mais cela suppose que les vérités historiques existent par elles-mêmes, contrairement aux autres qu’il faudrait découvrir. Or le fait historique lui-même est une construction de l’esprit.
En littérature comme au cinéma, la construction d’un monde, qu’il soit fictionnel ou non fictionnel, est avant tout une construction littéraire. Ce sont les mêmes codes de narration qui bien souvent s’appliquent à l’un ou à l’autre.
Le cinéma est certes une machine d’enregistrement, mais le réel est forcément reconstitué. Pensé en termes esthétiques, idéologiques, conceptuels, etc. (angle, cadrage, montage, commentaire, etc.c’est ce qu’on apelle le point de vue). Ce qui est grave aujourd’hui c’est que le reportage télévisé tend
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