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Les chefs d'orchestre servent-ils à quelque chose ?

Étude de cas : Les chefs d'orchestre servent-ils à quelque chose ?. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  3 Janvier 2016  •  Étude de cas  •  4 294 Mots (18 Pages)  •  921 Vues

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1.

ELEMENTS D'INTRODUCTION

Dans le cadre de ce cours de sociologie de la musique, nous devions étudier l'influence de la famille sur les pratiques musicales des individus. Il s'agissait dans un premier temps de dé-mysthifier les pratiques artistiques et/ou de réception individuelles en menant un effort de recontextualisation de ces dernières. Cet effort de recontextualisation correspond à la nécessité de situer la pratique musicale dans l'espace et dans le temps de manière à la dénaturaliser. En effet , la majorité des pratiques musicales sont, au-delà de leur caractère strictement artistiques, des pratiques sociales mettant en jeu des interactions entre des individus et des institutions au caractère contraignant pour l'action individuelle, ces ensembles étant eux-mêmes historiquement et géographiquement – donc culturellement et socialement - situés (un contre exemple serait celui d'une personne vivant sur une île, fabricant un instrument singulier dont l'idée même lui soit propre et apprenant à en jouer de manière autodidacte – et encore, exclure toute dimension sociale d'une telle pratique nécessiterait que l'individu en question n'ait jamais été mis au contact de la musique par un tiers).

A ce titre, de telles pratiques peuvent faire l'objet d'une démarche à la fois compréhensive (relative à une description détaillée auquel est attaché un caractère scientifique) et explicative (faisant intervenir un raisonnement causal mettant en jeu des mécanismes explicitement définis). Une telle démarche vise à mettre en exergue les mécanismes sociaux qui sous-tendent et activent un des processus dans un espace social complexe, à savoir la sphère des activités musicales - entendues au sens large, c'est à dire tant dans la démarche pratique que dans celle de réception et d'accoutumance. Les pratiques constitutives de cet espace – apprentissage avec professeur, auditions, pratique à domicile, écoute d'oeuvres chez soi ou en extérieur, accompagnées ou non... -, bien que pouvant sembler "naturelles" aux individus qui composent cet espace, sont en réalité le résultat d'un processus permanent de construction social de la réalité (pour une remise en cause de ce cadre fondamental, voir les synthèse évocant le retour du naturalisme dans les sciences sociales, par exemple R. Keucheyan & G. Bronner (dir.), 2012.). La dimension construite socialement de la pratique et de l'écoute musicale doit par conséquent être dévoilée et déconstruite, dépouillée du vernis du sens commun (nous reprenons ici un terme polémique de Gramsci, qui nous semble néanmoins fécond dans l'analyse des pratiques artistiques, en ce qu'elle souligne le décalage entre les pratiques objectives des individus et les représentations qu'ils se font de ces pratiques) et analysée au-delà des mythes du génie inné ou d'une quelconque aura liée à une harmonie inexplicable à l'aide des catégories de l'entendement.

Dans cette optique, et dans le prologement de l'étude menée au premier semestre sur l'utilité des chefs d'orchestre, nous nous sommes interessés aux pratiques d'orchestre, en nous demandant dans quelle mesure il serait possible d'appliquer des modèles sociologiques et anthropologiques,

issus principalement des courants structuraliste et fonctionnaliste antérieurement utilisés en sociologie de la famille, afin de comprendre les logiques qui permettent de produire collectivement des oeuvre implicant un certain nombre de musiciens, un chef d'orchestre et éventuellement d'autres intervenants.

1. CADRE CONCEPTUEL ET PROBLEMATIQUE

Comme indiqué ci-dessus, afin de mener a bien cette enquête, nous nous sommes inspirés des modèles structuralistes et fonctionalistes concurrents dans l'après guerres au sein des institutions académiques des deux côté de l'océan atlantique (incarnés par C. Lévi-Strauss et T. Parsons notamment). En effet, de tels cadres théoriques ont pour avantage de permettre une compréhension fine des mécanismes à l'oeuvre dans des groupes au sein desquels des individus poursuivant à la fois des objectifs singuliers et un ou des but(s) propre(s) doivent coordoner leurs actions – ici le production d'un répertoire, dont on suppose qu'elle donnera lieu à une représentation au moins en publique (ou le simple fait de dépasser le cadre individuel d'une pratique musicale). En effet la pratique d'orchestre suppose un dépassement du caractère individuel de la pratique instrumental qui redouble la dimension sociale de cet pratique, à la fois résultat d'une socialisation à la musique de la part de chacun des membres de l'orchestre et effort de mise en commun des résultats de cette socialisation.

Comme nous développerons ultérieurement, il apparaît que l'orchestre comme la famille correspondent en premier lieu à des entitées composées d'individus et de groupes d'individus (les musiciens, le chef d'orchestre). Ces individus et groupes sont à la fois différenciés et intégrés de diverses manières (partition de l'orchestre par familles d'instruments, partition des instruments par pupitres, existence de solistes...). Ce double mouvement d'intégration et de différenciation se produit lors de certains moments clefs de la pratique de l'orchestre et de son organisation. Il s'exprime en effet à la fois lors des instants où un ou des individus décident de "monter" un orchestre, lors de la pratique musicale elle-même, et dans les moments qui permettent cette pratique (demande de salles de répétition, négociations de dates de concert...). L'ensemble des acteurs impliqués dans ce processus ainsi que leurs actions sont contraints par une structure qui vise des objectifs spécifiques (les coordinations nécessaires à une pratique de l'orchestre s'incrivant dans la durée) mais sur laquelle chacun de ses éléments peut s'appuyer pour poursuivres leurs objectifs propres (par exemple en terme réputationnel) en mettant en oeuvre des stratégies spécifiques et différenciées. Ces stratégies spécifiques mises en place sous contraintes (notament celle du jouer ensemble) peuvent être fonctionnelles ou dysfonctionnelles pour l'orchestre dans son ensemble et peuvent conséquemment être l'objet de sanctions positives ou négatives émanant d'autres parties du groupe.

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