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Pauline d'Alexandre DUMAS

Commentaire d'oeuvre : Pauline d'Alexandre DUMAS. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  18 Octobre 2013  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 302 Mots (10 Pages)  •  1 274 Vues

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Texte A : Alexandre DUMAS, Pauline, 1838.

[En Inde, lors d'un dîner, des officiers anglais manifestent de façon moqueuse leur peu d'estime pour le jeune comte Horace de Beuzeval, du fait de son apparence fragile. Pour les détromper, le comte décide d'affronter seul, le lendemain, sous leurs yeux, une tigresse.]

Il regarda donc circulairement autour de lui, et dans un enfoncement pratiqué dans l'herbe et pareil à une voûte de quatre ou cinq pieds de profondeur il aperçut la tigresse couchée à moitié, la gueule béante et les yeux fixés sur lui; ses petits jouaient sous son ventre comme de jeunes chats.

Ce qui se passa dans son âme à cette vue, lui seul peut le dire; mais son âme est un abîme d'où rien ne sort. Quelque temps la tigresse et lui se regardèrent immobiles; et, voyant que de peur de quitter ses petits, sans doute, elle ne venait pas à lui, ce fut lui qui alla vers elle.

Il en approcha ainsi jusqu'à la distance de quatre pas; puis, voyant qu'enfin elle faisait un mouvement pour se soulever, il se rua sur elle. Ceux qui regardaient et écoutaient1 entendirent à la fois un rugissement et un cri; ils virent pendant quelques secondes les roseaux s'agiter; puis le silence et la tranquillité leur succédèrent : tout était fini.

Ils attendirent un instant pour voir si le comte reviendrait; mais le comte ne revint pas. Alors ils eurent honte de l'avoir laissé entrer seul, et se décidèrent, puisqu'ils n'avaient pas sauvé sa vie, à sauver du moins son cadavre. Ils s'avancèrent dans le marais tous ensemble et pleins d'ardeur, s'arrêtant de temps en temps pour écouter, puis se remettant aussitôt en chemin; enfin ils arrivèrent à la clairière et trouvèrent les deux adversaires couchés l'un sur l'autre: la tigresse était morte, et le comte évanoui. Quant aux deux petits, trop faibles pour dévorer le corps, ils léchaient le sang.

La tigresse avait reçu dix-sept coups de poignard, le comte un coup de dent qui lui avait brisé le bras gauche, et un coup de griffe qui lui avait déchiré la poitrine.

1. Il s'agit des officiers anglais.

Texte B : Émile ZOLA, La Débâcle, 1892.

[La défaite de l'armée française à Sedan dans les Ardennes conduit à la capitulation de la France devant la Prusse le 2 septembre 1870, et marque la fin du Second Empire de Napoléon III. Zola retrace la bataille de Sedan dans son roman La Débâcle.

La ville est assaillie, la défaite déjà certaine. Le soldat français Gaude vient d'être abattu alors qu'il tentait un ultime geste de résistance face à l'ennemi. Son camarade Rochas est en danger.]

Cela ne lui1 entrait pas dans la cervelle, que ce fût la défaite encore. On changeait tout, même la façon de se battre .. Ces gens n'auraient-ils pas dû attendre, de l'autre côté du vallon, qu'on allât les vaincre ? On avait beau en tuer, il en arrivait toujours. Qu'est-ce que c'était que cette fichue guerre, où l'on se rassemblait dix pour en écraser un, où l'ennemi ne se montrait que le soir, après vous avoir mis en déroute par toute une journée de prudente canonnade2 ? Ahuri, éperdu, n'ayant jusque là rien compris à la carnpagne3, il se sentait enveloppé, emporté par quelque chose de supérieur, auquel il ne résistait plus, bien qu'il répétât machinalement, dans son obstination :

- Courage, mes enfants, la victoire est là-bas !

D'un geste prompt, cependant, il avait repris le drapeau. C'était sa pensée dernière, le cacher, pour que les Prussiens ne l'eussent pas. Mais, bien que la hampe4 fût rompue, elle s'embarrassa dans ses jambes, il faillit tomber. Des balles sifflaient, il sentit la mort, il arracha la soie du drapeau, la déchira, cherchant à l'anéantir. Et ce fut à ce moment que, frappé au cou, à la poitrine, aux jambes, il s'affaissa par minces lambeaux tricolores, comme vêtu d'eux. Il vécut encore une minute, les yeux élargis, voyant peut-être monter à l'horizon la vision vraie de la guerre, l'atroce lutte vitale qu'il ne faut accepter que d'un cœur résigné et grave, ainsi qu'une loi. Puis, il eut un petit hoquet, il s'en alla dans son ahurissement d'enfant, tel qu'un pauvre être borné, un insecte joyeux, écrasé sous la nécessité de l'énorme et impassible nature. Avec lui, finissait une légende.

1. « lui» : il s'agit de Rochas.

2. « canonnade » : tir de canons.

3. « campagne» : campagne militaire.

4. « hampe» : manche en bois auquel est fixé le drapeau.

Texte C : André MALRAUX, La Condition humaine, 1933.

[En 1927, en Chine, Kyo, leader communiste, considéré à cause de ses actes révolutionnaires comme un terroriste, est jeté en prison. Il se trouve dans une vaste salle commune où gémissent de nombreux autres opposants politiques, pour la plupart blessés. Il risque, de manière imminente, d'être torturé et jeté vif dans une chaudière. Pour éviter de parler et de trahir sa cause, il prévoit d'avaler l'ampoule de cyanure dont il s'est muni.]

Et une rumeur inentendue prolongeait jusqu'au fond de la nuit ce chuchotement de la douleur : ainsi qu'Hemmelrich1, presque tous ces hommes avaient des enfants. Pourtant, la fatalité acceptée par eux montait avec leur bourdonnement de blessés comme la paix du soir, recouvrait Kyo, ses yeux fermés, ses mains croisées sur son corps abandonné, avec une majesté de chant funèbre. Il aurait combattu pour ce qui, de son temps, aurait été chargé du sens le plus fort et du plus grand espoir; il mourrait parmi ceux avec qui il aurait voulu vivre; il mourrait, comme chacun de ces hommes couchés, pour avoir donné un sens à sa vie. Qu'eût valu une vie pour laquelle il n'eût pas accepté de mourir ? Il est facile de mourir quand on ne meurt pas seul. Mort saturée de ce chevrotement fraternel, assemblée de vaincus où des multitudes reconnaîtraient leurs martyrs2, légende sanglante dont se font les légendes dorées ! Comment, déjà regardé par la mort, ne pas entendre ce murmure de sacrifice humain qui lui criait que le

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