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Meret Oppenheim, Déjeuner à La Fourrure

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Par   •  31 Mars 2015  •  2 433 Mots (10 Pages)  •  4 315 Vues

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Meret Oppenheim, Déjeuner en fourrure, 1936, Tasse, soucoupe et cuiller couvertes de fourrure, tasse : 10,9cm ; soucoupe : 23,7 cm ; cuiller : 20,2 cm ; hauteur 7,3 cm, New York, The Museum of Modern Art.

Plan de l'exposé :

Introduction

I – De l'objet réel à l'objet surréaliste

A) La transfiguration de l'objet réel

B) Un jeu entre le texte et l'objet

II – Une ambivalence entre onirisme et érotisme

A) Objet révélateur du subconscient

B) Une allusion érotique

III - Un objet témoin de la singularité de l'artiste dans le groupe des surréalistes

A) L'oeuvre dans son contexte

B) L'affirmation de la femme-artiste

Conclusion

Née en 1913 à Berlin, en 1930, elle étudie quelques semaines à l’Ecole des Arts et Métiers de Bâle ou elle rencontre Irène Zurkinden qui lui inspire l’idée de venir à Paris. En mai 1932, elle s’installe dans une petite chambre d’hôtel, rue d’Odessa à Paris et fréquente l’Académie de la Grande Chaumière. La découverte de l’œuvre de Max Ernst et la rencontre avec Alberto Giacometti qui en 1933 lui présente Hans Arp l’introduisent, alors qu’elle est seulement âgée d’une vingtaine d’année, au cœur du milieu surréaliste. Elle expose en 1933 au Salon des Surrindépendants et fréquente à partir de cette période le cercle d’André Breton qui se réunit chaque fin d’après midi au Café de la Place Blanche. Célèbre par les photographies de Man Ray, elle devient la muse du mouvement surréaliste. Au cours des années trente, Meret Oppenheim bénéficie alors de cette émulation artistique faite de publications, d’expositions (Copenhague, 1935 ; Paris, 1936, 1938 ; Londres, New York, 1936) et d’échanges internationaux. Elle n'a que vingt-trois ans lorsqu'en 1935, elle réalise l'oeuvre le Déjeuner en fourrure, auparavant intitulée "Tasse, soucoupe et cuillère revêtus de fourrure", qui comme le titre premier l'indique est une tasse, une soucoupe et une cuillère habillés de fourrure. L'idée de cette oeuvre vint à Meret Oppenheim lors d'une conversation avec Dora Maar et Picasso, qui admira les bracelets que Meret avait recouverts de fourrure et émis la conviction que n'importe quel objet pouvait être recouvert de fourrure, ce à quoi Meret Oppenheim répondit : "Même cette tasse et la soucoupe". Dès sa première présentation en 1936 à l' "Exposition surréaliste d'objets" à la galerie parisienne Charles Ratton, puis, à New-York lors de l'exposition "Fantastic Art, Dada, Surrealism" se déroulant au Museum of Modern art (dont le directeur Alfred Barr fit son acquisition) , l'oeuvre obtint un succès de scandale. On peut alors se demander comment à travers le Déjeuner en fourrure, Meret Oppenheim réalise un objet surréaliste et subversif à la fois, témoin de sa singularité au sein de son groupe artistique?

Nous étudierons dans une première partie comment le Déjeuner en fourrure devient un objet surréaliste, puis dans un second temps les ambivalences entre rêve et érotisme de cet objet et enfin dans une dernière partie, le questionnement de la singularité de cette artiste au sein du groupe des surréalistes.

I – De l'objet réel à l'objet surréaliste

Nous observerons à travers cette première partie comment Meret Oppenheim transforme cet objet usuel en un objet surréaliste.

Le Déjeuner en fourrure est composé d'une tasse, d'une soucoupe et d'une petite cuillère que Meret Oppenheim a recouvert de fourrure de gazelle. Avec cette intervention plastique de l'artiste, une mutation du rôle de l'objet s'opère. La couleur beige de la fourrure animale et sa texture mouchetée créent une référence naturelle, en contradiction visuelle avec la forme industrielle, usinée de la tasse, soucoupe et cuillère. Avec cet habillage de fourrure, l'usage "premier" de cet objet, boire du thé, devient difficile sinon impossible. Le spectateur peut alors ressentir une certaine frustration face à cet objet, car la fourrure accentue l'aspect tactile de l'oeuvre, engendrant une envie de toucher ou prendre l'objet, mais paradoxalement, son usage en devient impossible, créeant ainsi un sentiment de malaise et d'absurdité que recherchent les surréalistes. Ainsi l'objet réel, courant, n'est plus fonctionnel et prend la forme d'un objet surréaliste car notre perception sur celui-ci change. On peut ainsi dire qu'en détournant la fonction de l'objet par une intervention plastique, Meret Oppenheim fait de son Déjeuner en fourrure un objet de contemplation qui peut générer un certain malaise, des interrogations chez le spectacteur. On appréhende alors cet objet différemment, car on l'envisage plutôt comme un objet "muséal", une oeuvre d'art. Dans son essai Crise de l'objet paru peu de temps après l'exposition de cette oeuvre à la galerie Ratton, André Breton parlera de "traquer la bête folle de l'usage" pour décrire le détournement de la fonction des objets usuels et de leur présentation cryptée. Par ailleurs, Meret Oppenheim opéra le même habillage de fourrure avec son oeuvre Gants de fourrure (1936).

Après avoir opéré une intervention plastique, l'objet fut rebaptisé avec humour, créeant ainsi un jeu sur le titre. En effet, à l'origine le titre n'était pas Déjeuner en fourrure, Meret Oppenheim l'avait sobrement nommé "Tasse, soucoupe et cuiller revêtus de fourrure". C'est André Breton qui lui trouva un nouveau titre, clin d'oeil au célébre Déjeuner sur l'herbe de Manet. On retrouve ici le jeu caractéristique des surréalistes, mais il ne s'agit pas ici de seulement rebaptiser l'objet avec humour, le titre de l'oeuvre est plus implicite si l'on prend en compte que le Déjeuner sur l'herbe précedemment évoqué fit à l'époque scandale de par la représentation d'une femme nue entre deux bourgeois. Il a été également évoqué un possible lien avec le livre paru en 1870 du romancier

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