Le relief dit 'de l'adoption" / Autel Parthique

Relief dit « de l’adoption »

Autel parthique

Dans les bâtiments de la Hofburg, le Kunsthistorisches Museum - Ephesos Museum de Vienne abrite depuis 1978 une collection exceptionnelle issue des fouilles menées par les archéologues autrichiens en Asie Mineure au XIXe s, notamment à Éphèse. C'est là que sont conservés l'ensemble des reliefs provenant de l'Autel Parthique érigé à Éphèse sous la dynastie Antonine. Bien qu'on le désigne, hâtivement, sous le terme d'autel, il s'agit en réalité d'un monument - raison pour laquelle les Autrichiens l'ont intitulé "Partherdenkmal" : conformément à son étymologie latine (monumentum >monere), un monument commémore un événement important. Le relief dit "de l'adoption" s'inscrit parfaitement dans cette ambition mémorielle, puisqu'il conserve dans la pérennité du marbre de Thasos, le souvenir d'un événement dynastique majeur qui a eu lieu en 138 ap. J-C. En effet, si l'on en croit l'historien Dion Cassius (Histoire romaine, LXIX, 20-211), Hadrien, sans enfant et fort malade, décide d'adopter cette année-là Antonin le Pieux, lui-même chargé d'adopter Marc-Aurèle (17 ans) et Lucius Verus (8 ans). C'est précisément cet événement de l'adoption qui se trouve mis en scène sur le relief étudié. Fidèle à la gravité de l'événement représenté, ce relief se distingue par son hiératisme. Selon une composition paratactique / en frise se trouvent représentés les quatre protagonistes de l'événement dynastique de 138. C'est la domus augusta qui est ici réunie, c'est-à-dire - de gauche à droite - Marc-Aurèle, Antonin le Pieux, Lucius Verus et Hadrien. Si l'identification de ce dernier procède par déduction étant donné l'état très dégradé de son portrait, les trois autres princes en revanche correspondent à des types parfaitement attestés. Cécile Evers a, par exemple, très bien étudié les différents types de portrait d'Antonin le Pieux : celui du relief correspond précisément au type qu'elle a désigné comme celui de l'adoption. On rappellera en effet que, à l'époque impériale, les portraits des empereurs étaient très normalisés, correspondant à des types, en général élaborés à Rome, puis diffusés dans l'ensemble de l'empire. Chaque événement important, notamment politique / dynastique (une adoption par ex), donnait lieu à la conception d'un nouveau type. De même, on reconnait parfaitement le petit Lucius Verus au centre, dont le portrait reprend également le type de l'adoption, comparable à l'exemplaire conservé au Louvre (à droite).

1 Mes amis, la nature ne m'a pas accordé d'avoir un enfant ; vous m'avez accordé par une loi d'en adopter un. La différence entre l'un et l'autre cas, c'est que l'enfant à qui on donne le jour naît tel qu'il plaît aux dieux, tandis que celui qu'on adopte, chacun le choisit à son gré ; de telle sorte que, si souvent la nature donne à un homme un enfant estropié et dépourvu d'esprit, le jugement en fait choisir un qui réunisse la bonne constitution du corps à celle de l'esprit. C'est pour cela que j'avais d'abord choisi entre tous Lucius, qui était tel que je n'aurais même pas pu souhaiter avoir un fils pareil né de moi ; mais, puisque les dieux nous l'ont enlevé, j'ai trouvé pour le remplacer auprès de vous un empereur que je vous donne, d'une naissance illustre, doux, d'un caractère facile, prudent, également incapable de se laisser aller à aucune précipitation par jeunesse, ou à aucune négligence par vieillesse, se gouvernant d'après les lois et ayant gouverné d'après les coutumes de nos ancêtres, de sorte qu'il n'ignore rien de ce qui a rapport à l'autorité souveraine et qu'il peut en user honnêtement. Je parle d'Aurèle Antonin que voici ; bien que je le connaisse pour un homme ayant, s'il en fut, aversion des embarrais des affaires et fort éloigné d'un pareil désir, je crois qu'il ne refusera ni à moi ni à vous de se charger d'un pareil fardeau, et qu'il voudra bien, quoique contre son gré, accepter l'empire». 21. Voilà comment Antonin devint empereur : comme il n'avait pas d'enfants mâles, il adopta Commode, fils de Commode, et, en outre, Marcus Annius Vérus, voulant désigner pour longtemps les successeurs à l'empire

Nous pouvons faire exactement la même remarque à propos du portrait de Marc-Aurèle, en le comparant à un exemplaire également conservé au Louvre (à gauche). Un dernier protagoniste, surgissant derrière l'épaule d'Hadrien, s'ajoute à la composition : il s'agit vraisemblablement du genius de Lucius Aelius Verus, père de Lucius Verus et mort la même année, quelques mois avant l'adoption. Cette hypothèse est corroborée par la présence d'un flambeau, visible au second plan de la composition. Les quatre princes sont représentés en pied, dans un accoutrement particulier : conformément à leur statut de citoyen, ils portent la toge, reconnaissable au large pli ( sinus ) qui se déploie depuis l'épaule jusqu'aux genoux. Néanmoins, ils ne sont pas de simples citoyens : on remarque en effet qu'un pan de leur toge vient recouvrir leur tête, selon une iconographie topique ( capite velato ). La représentation des empereurs capite velato ("la tête couverte") est bien connue depuis l'époque augustéenne -

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