La complainte du progrès
Commentaire d'oeuvre : La complainte du progrès. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Marguerite MC • 24 Mars 2019 • Commentaire d'oeuvre • 1 080 Mots (5 Pages) • 3 498 Vues
La complainte des progrès
L’artiste :
Boris Vian est né le 10 mars 1920. Il est connu pour être un artiste complet : écrivain, poète, parolier, chanteur et trompettiste de jazz. Il a fait des études d'ingénieur à l’Ecole centrale, ce qui lui permet de créer un nombre impressionnant d'objets dans ces œuvres.
Il est également célèbre pour ses écrits sulfureux (J'irai cracher sur vos tombes), écrits sous le pseudonyme de Vernon Sullivan et qui l’ont amené à de nombreux procès.
Il meurt le 23 Juin 1959 à l’âge de 39 ans d'un arrêt cardiaque, lors de la projection de l'adaptation cinématographique de son livre « J'irai cracher sur vos tombes ».
Le contexte historique :
Composée en 1956, « La complainte du Progrès » est une critique très drôle de la société de consommation et ses dérives. Nous sommes alors dans la période des « Trente Glorieuses » (1946-1975), marquée par une croissance économique soutenue et ininterrompue, ainsi que par une amélioration générale des conditions de vie. Il faut se rappeler que 5 ans plus tôt les Français n'avaient accès à la nourriture qu'avec les tickets de rationnement. Ceux-ci ont été supprimés en 1951.
Qu’est-ce qu’une complainte ?
- Une complainte est une lamentation (vif regret, douleurs) chantée comportant plusieurs strophes, de caractère narratif racontant les malheurs d’un personnage. = Chanson de geste (exploits des héros...)
- Le terme de complainte donné à cette chanson est ironique car il contraste avec le caractère très enjoué de la mélodie et des paroles humoristiques.
La musique
- Formation vocale : Une voix masculine soliste chantée, parfois proche de la voix parlée.
- Formation instrumentale : Jazz band avec section rythmique (batterie, piano, contrebasse) et section mélodique (flûte traversière, trompette, clarinette, saxophone, xylophone.)
- Rythme de danse latino-américaine, temps faibles accentués.
- Tempo allegro (rapide)
- Tonalité Mi mineur : Le mode mineur pour exprimer la tristesse, les affres de l’amour (angoisse) et des dérives du monde moderne.
- Le titre constitue un oxymore (association de 2 mots de sens opposé). En effet le mot « complainte » évoque une chanson populaire de ton plaintif et portant sur des sujets tragiques. Le mot « progrès » pourtant évoque une notion positive : amélioration, évolution, avancée. Cette association laisse sous-entendre que l’auteur se « plaint » des avancées technologiques.
Une parodie d’une chanson d’amour
- Boris Vian oppose « autrefois » et « maintenant », pour bien insister sur le changement de société et de comportement ainsi que sur les nouvelles modes.
- Ici, en échange d’un baiser, la jeune fille courtisée se voit proposer toute une série de produits dernier cri (= champ lexical des appareils ménagers développés dans la seconde strophe). Ceci produit un effet comique puisque la relation matérielle tient lieu de relation sentimentale.
- L’emploi de termes familiers « godasses, patates... » accentue la trivialité (= vulgarité/ grossièreté) de ce discours amoureux.
- Boris Vian joue sur les mots (Gudule, prénom rarissime, anachronique et ridicule qui renforce l’effet comique de la chanson), il en invente également (cire-godasses, ratatine-ordure...) et l'aspect énumératif des équipements à la pointe du progrès renforce l'idée de l'inutilité de tous les objets.
- Auparavant le jeu de la séduction reposait sur le jeu de l’amour courtois : « faire sa cour, amour, prouver son ardeur » maintenant ce n’est plus le cas, effectivement « ça change, ça change »
- Les 2 interlocuteurs évoqués dans le texte peuvent représenter n’importe quel couple d’amoureux :
- emploi du pronom personnel indéfini « on » = tous les hommes
- « le cher ange » (vers 7), « la belle » « une tendre petite » = n’importe quelle femme à séduire.
Cette chanson est une parodie de chanson d’amour (=imitation moqueuse d'une œuvre littéraire ou artistique). En effet, il n’est pas question d’amour, mais d’objets ménagers que l’on donne ou que l’on reprend.
La dénonciation de la société de consommation
- L'énumération (= suite de noms juxtaposés) est la figure de style qui domine dans l'ensemble du texte. En listant ainsi les objets, l’auteur donne à voir l’abondance qui caractérise la société de consommation. Ducoup ces objets perdent toute valeur utilitaire. Le bonheur est réduit au plaisir de posséder : « et nous serons heureux ».
- Dans la deuxième partie de la chanson, le poète devient lui-même créateur de nouveaux produits en inventant des mots composés qui n’ont plus aucun sens :
- néologismes (création de mots nouveaux) : « mon repasse-limaces/Mon tabouret-à-glace et mon chasse-filous. »
- mots- valises (association de 2 mots) : « atomixeur »
- Puis les objets cités suivent l’évolution du rapport amoureux (= une gradation) et expriment toute la violence de la rupture : « Au chauffe-savates, au canon à patates/À l’éventre-tomate, à l’écorche-poulet !».
- La répétition des 3 derniers vers suggère un temps cyclique qui ne s’arrête jamais, celui de la consommation : acheter, jeter, acheter... Ainsi la femme devient-elle un objet de consommation parmi tant d’autres, que l’on remplace lorsqu’il n’apporte plus de satisfaction.
Conclusion :
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