L'art Pour L'art
Commentaire de texte : L'art Pour L'art. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar buster • 9 Janvier 2014 • Commentaire de texte • 3 577 Mots (15 Pages) • 806 Vues
Au milieu du XIX siècle, des poètes, auteurs et théoriciens tentent de penser l’art autrement. L’art doit, pour eux, être débarrassé de sa visée militante, et de son caractère utile, son unique but étant alors de rechercher le beau. C’est le mouvement dit des Parnassiens. Cent ans plus tard, cette idée va connaître un renouveau.
« L’art pour l’art » dans les années soixante ne se limite plus seulement à l’esthétique pour elle seule. Viennent s’ajouter au refus de l’engagement idéologique et politique, plusieurs autres conditions.
Tout d’abord, nous parlerons de l’art comme témoignage de l’instant. C’est Pollock, et les expressionnistes abstraits qui sont les précurseurs de cette idée. En effet, le peintre américain utilisait la technique du « dripping », qui consiste à jeter, littéralement, de la peinture sur une toile. Ainsi, chaque trait, marque, tache, de peinture était l’expression d’un mouvement de l’artiste. En France, dans les années 60, on assiste à des performances similaires. Klein, par exemple, met en place la technique des Femmes-pinceaux. Il enduit effectivement de peinture un modèle qui s’appuie, comme un tampon, sur le support pour laisser une trace. L’intérêt du procédé se trouve dans l’unicité de la femme qui participe au projet, avec ses particularités anatomique, elle va jouer le pinceau d’une certaine façon, s’appuyant peut-être, naturellement, plus sur certains endroits du corps que sur d’autres. L’artiste crée un moment privilégié, à un instant donné, avec une personne donné, une rencontre entre toile, corps, peinture et état d’esprit. Et le seul témoin de cet évènement est l’œuvre, mais l’œuvre n’est art que parce qu’elle est une preuve de l’action. Ainsi, c’est dans l’action que se trouve véritablement l’art : car elle exprime le vivant.
On retrouve cette théorie dans une forme tout à fait nouvelle à l’époque : les Happening. Cette conception de l’art apparaît aux Etats-Unis à la fin des années cinquante, avec Allan Kaprow. Mais d’autres artistes français, comme Niki de Saint-Phalle avaient déjà anticipé sur cette pratique. Elle avait, en effet, déjà mis en place dès le tout début des années soixante, la peinture au fusil. Elle accumule, sur un panneau de bois divers objets et détritus qu’elle recouvre de plâtre, ce support est ensuite proposé lors de séances où elle et ses amis artistes y projettent des sachets de peinture. Elle parle de cette expérience de la façon suivante :
« La peinture était la victime, qui était la peinture ? Papa ? Tous les hommes ? Les hommes de petite taille ? Les hommes grands ? Les grands hommes ? Les gros hommes ? Les hommes ? Mon frère John ? Ou est-ce que la peinture c’était moi : tirais-je sur moi-même au cours d'un rituel qui me permettait de mourir de ma propre main et de renaître ? J'étais immortelle ! Je tirais sur moi-même, sur la société avec ses injustices. Je tirais sur ma propre violence et la violence de l'époque. En tirant sur ma propre violence, je n'avais plus à la porter en moi comme un fardeau. »
Ici c’est bien le geste qui donne ici une signification à l’œuvre. C’est parce que l’acte de tirer est violent, et que cette violence à un sens, que l’objet devient une œuvre, qu’il prend une dimension artistique.
Lorsque le Happening arrive en France, il est tout de suite adopté par divers mouvements, comme le Fluxus, un courant international mêlant musique, image, installation et littérature. Il se manifeste surtout à Nice, et est essentiellement représenté par George Brecht, Ben et Robert Filliou. Ces artistes évoluent dans l’idée d’une création permanente, en mouvement. Et le happening, c’est justement l’art du mouvement : le plus important, l’action, se passe sous les yeux du spectateur, et par sa seule présence il participe à cette action. Les niçois virent alors l’artiste Ben se brosser les dents en public, habillé en costume et coiffé d’un chapeau melon. Le but de cette performance était d’ériger des actes quotidiens hors contexte au rang d’art. On retrouve ici l’une des thématiques principales du Fluxus, à savoir explorer les frontières entre l’art et la vie, opérer une fusion entre les deux.
La barrière entre ce qui est « Art » et ce qui ne l’est pas devient floue et la difficulté pour le spectateur de trouver un sens évident aux œuvres des adeptes du concept de « l’art pour l’art » ne facilite pas les choses. Ce qui nous amène vers le deuxième point que l’on se doit de traiter lorsqu’on aborde ce sujet : l’art comme témoignage de l’idée.
On peut penser à la Nouvelle Vague : des jeunes réalisateurs français qui réinventent le cinéma et développent de nouvelles façons de filmer. On assiste alors à des films loufoques, tournés caméra au poing dans un style réaliste, avec un budget restreint. Les scènes et les dialogues de Godard, par exemple, peuvent paraître tournés vers un seul but, l’esthétique. Il suscite la surprise et l’incompréhension chez le spectateur face à certaines scènes. Les couleurs et les mots qu’il choisit de montrer à l’écran alimentent ce sentiment. Le jeu sur les mots est effectivement crucial dans son cinéma, lui et Truffaut sont les deux réalisateurs les plus littéraires de la Nouvelle Vague. On se souvient, dans « Une Femme est une Femme », la scène du dialogue par livres interposés, les personnages utilisant les titres des œuvres pour se faire comprendre. Le goût de la littérature chez Godard témoigne des passerelles entre les différents arts qui vont devenir de plus en plus courantes dans les années soixante. Il s’agit de rompre avec les codes du « Cinéma à la papa », un cinéma qui leur paraît obsolète, et trop loin de ce à quoi ces jeunes cinéastes aspirent. Mais c’est aussi une manière de faire descendre le film dans la rue, la rue avec son langage, la rue point de départ du réel pour atteindre le merveilleux. Ces critiques qui passent derrière la caméra sortent pratiquement tous des Cahiers du Cinéma, ils ont une culture cinématographique
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