Qu'est-ce Qui Distingue Une œuvre D'art D'un Objet Quelconque ?

Depuis l'apparition de l'homme, il a toujours ressenti le besoin de s'exprimer lui et ses émotions à travers des créations que l'on peut qualifier d’œuvres d'art. Nous commencerons, dans une première partie, par identifier les traits propres à l’œuvre d'art qui la rende différente d'un simple objet quelconque. Cependant penser qu'il y a des différences implique nécessairement que nous reconnaissions des similitudes Nous avons donc des raisons de supposer qu'une œuvre d'art n’est peut-être pas si différente d'un objet quelconque. Dans une seconde partie nous allons donc essayer de déterminer dans quels cas l’art se distingue d’un objet du quotidien. Enfin, dans une dernière partie nous verrons, si, de nos jours, une œuvre d'art peut se confondre avec un objet du quotidien.

Tout d'abord, qu'est-ce qu'une œuvre d'art ? Une œuvre d’art est une réalité, matérielle ou non, artificielle, c’est-à-dire qui résulte d’une production humaine. A la différence de la réalisation technique en général, elle est le plus souvent unique et dépourvue d’utilité purement pratique. Cette originalité et ce désintéressement lui donnent un prestige supérieur à celui de l’objet technique « banal », prestige qui s’étend à son créateur, l’artiste. L’art lui-même est considéré comme une forme de culture. L'artiste crée des œuvres qui plaisent seulement par leur beauté comme nous l'explique Friedrich Hegel « Le beau n'est vraiment que quand il participe de l'esprit et est crée par lui », (Esthétique, 1818). Un tableau ou une statue n'ont aucune utilité précise. L'objet beau a donc sa fin en lui-même et procure un plaisir désintéressé. Nous le constatons avec évidence lorsque nous contemplons une peinture représentant une nature morte : les fruits, les poissons, les volailles représentés ne se mangent pas. En revanche le propre de l'artisanat, comme de la technique, est de produire des objets qui ont pour fin l'utilité et qui, de ce fait, plaisent comme moyen de satisfaction intéressée. Une table, une chaise servent toujours à quelque chose. Seulement, l’œuvre artisanale n'a pas pour fonction première de procurer un plaisir esthétique ni même d'exprimer la personnalité de son créateur. Elle tire plutôt son sens d'une activité « mercenaire » : la recherche du gain est en effet ce qui motive l'artisan. C'est pourquoi l'artisanat est, comme l'affirme Kant, considéré comme un travail, c'est-à-dire : « comme une activité qui est en elle-même désagréable (pénible) et qui n'est attirante que par ses effets (par exemple le salaire) » (Critique de la faculté de juger, 1791). Indifférent au principe du gain, l'art apparaît, au contraire, comme une activité agréable. L’œuvre s'impose apparemment par ce qu'elle a à « dire » ; même si elle n'est pas un langage au sens strict, elle semble être un moyen d'expression de significations. Elle serait une représentation en image de quelque chose. Nous disons par exemple qu'une musique exprime des sentiments ou des idées par ses tonalités, gammes, rythmes, mélodies, etc. La preuve apparente qu 'elle touche notre sensibilité. Nous remarquons que l'art est alors bien spécifique en lui-même mais pouvons-nous le considérer comme une exception?

Le but de l'invention technique est de mieux adapter l'homme au monde ; l'art repose au contraire sur une créativité soumise à aucune autre norme que les règles qu'il se donne pour rendre une matière spirituelle, et il provoque ainsi notre capacité à inventer. Certes, l'art, comme toute production exige des règles, mais celles-ci ne préexistent pas à l’œuvre. L'artiste n'obéit donc qu'aux règles qu'il se donne à lui-même. Une autre conception voit dans l'art l'expression d'une vérité : approche des idées, pour Platon ; expression de l'esprit d'une époque ou d'un peuple, pour Hegel ; expressions des intérêts de classe, pour Marx ; expression de l'inconscient, chez Freud. De nos jours beaucoup de personnes dépensent des sommes astronomiques pour une simple toile qui parfois, selon  d’autres, ne ressemble pas

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