Commentaire - La Place
Dissertation : Commentaire - La Place. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Maddy Steggall • 23 Mars 2020 • Dissertation • 843 Mots (4 Pages) • 1 912 Vues
La Place d’Annie Ernaux est une autobiographie intime, consacré à son défunt père. L’histoire nous dévoile sa vie et sa trajectoire sociale de la classe ouvrière à la classe moyenne ; ce passage se situe vers la fin du livre et donc de son parcours. Au cœur du roman est la honte qu’éprouve Ernaux, d’une part envers l’infériorité sociale de ses parents, d’autre part envers elle-même pour les avoir trahis en transgressant de classe sociale. Après avoir examiné cela, j’étudierai les effets de sa transgression sur un autre thème clé : la fierté. Finalement, je m’intéresserai sur la relation père-fille, et comment cet extrait explique la distance émotionnelle et sociale entre eux.
Réfléchissons d’abord au thème clé de la honte. Il manifeste ici sous deux formes : la gêne et la frustration que ressent Ernaux quant au statut social de ses parents et puis ‘la honte de la honte’, c’est-à-dire la culpabilité qu’elle éprouve pour avoir franchi une frontière sociale, entrainant un sentiment qu’elle n’appartient pas chez elle. Tout au long du livre, le langage est une marque de classe puissante, quelque chose qui suscite des jugements et de la honte ; on voit cela clairement à travers la phrase « au loin, j’avais épuré mes parents de leurs gestes et de leurs paroles » (l.6-7), indiquant qu’Ernaux avait essayé de construire une fausse image idealisée de ses parents pendant son absence pour s’echapper de la gêne que la realité de leur milieu social lui apportait. En effet, plus tôt dans le livre elle admets que « tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancœur » (pp45) ; le mot ‘rancœur’ signifie la colère et frustration qui proviennent de cette honte, ce qui est reflété par son « envie de pleurer » (l.13) et la crudité émotionnelle de sa parole « ‘il ne changera donc jamais !’ » (l.13) Le ressentiment que ses parents demeurent « tels qu’ils avaient toujours été » s’explique aussi par la honte d’Ernaux d’avoir changé dans une telle mesure qu’elle a créé une distance définitive entre eux. En dépit de tout, elle aime son père et ça la dérange qu’elle ne lui connaisse plus ; il apparait manifeste ici dans la façon brusque dans laquelle elle dénonce la « scène ridicule de mauvais cadeau » (l.12-13).
Considérons maintenant comment cette transgression touche la fierté de ses parents ; dans la gare, la ligne « elle me prenait de force ma valise, ‘elle est trop lourde pour toi, tu n’as pas l’habitude’ » (l.2) en particulier ‘de force’ indique sa volonté de pouvoir aider sa fille, de récuperer l’autorité maternelle qu’elle a perdu quand Ernaux est devenu superieur d’eux en ce qui concerne la classe sociale. « Tu n’as pas l’habitude » fait reference au fait qu’Ernaux ne connait pas le travail manuel comme ses parents; sa mère essaie de montrer qu’elle peut faire quelquechose que sa fille ne peut pas, et donc garder sa fierté. Selon son père, la fierté se manifeste différément puisqu’il cache ses sentiments pour lui proteger. Ernaux utilise cette phrase idiomatique en italiques, « fierté de ne rien laisser paraître, dans la poche avec le mouchoir par-dessus » (l.20-1) pour souligner qu’au contraste du monde intellectuel et verbale d’Ernaux, dans le monde masculin et physique de son père, les sentiments ne sont pas toujours exprimés.
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