Vérité et politique
Cours : Vérité et politique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Riiim1 • 8 Janvier 2016 • Cours • 5 471 Mots (22 Pages) • 1 114 Vues
Vérité et politique
On peut considérer que l’art de bien gouverner un peuple n’exige pas nécessairement la transparence des décisions. Peut-être même que savoir taire ou falsifier certaines vérités est le gage d’une politique responsable. Se pose ici la question de la légitimité du secret d’Etat, notamment à l’âge démocratique.
On peut par ailleurs estimer que la vérité elle-même ne peut s’affranchir des intérêts du politique. Il s’agit cette fois de comprendre comment se lient le savoir et le pouvoir. Si ce lien est indissoluble, cela implique-t-il que toute vérité est idéologique. Sinon comment la vérité peut-elle échapper à sa politisation ?
Le mensonge est moralement condamné, car il contient une duplicité trompeuse à l'égard d'autrui. « Est donc menteur celui qui pense quelque chose en son esprit, et qui exprime autre chose dans ses paroles, ou dans tout autre signe », selon saint Augustin. Le mensonge pèche contre la transparence de chacun à chacun qui, gage de la confiance, est le socle de la morale dans les rapports humains.
Le mensonge est il légitime en politique ?
La vérité est elle une vertu politique ?
Pourquoi le mensonge est-il considéré comme nécessaire en politique ?
Pourquoi la vérité impuissante serait-elle méprisable ?
En politique, la fin justifie-t-elle les moyens
Le droit de mentir existe il en politique ?
Machiavel : le mensonge, une nécessité politique ?
Entre Fortuna et vertu, primauté de la vérité effective :
La politique, dans son but primordial, semble partager les mêmes objectifs que la morale : la gestion des groupes et de leurs intérêts. Toutefois, chez Machiavel, il apparaît une nette séparation entre les vertus morales et les vertus politiques. La réalisation de la sagesse politique s'en gardera d'être éternellement sous emprise de la morale. Le prince doit jouer selon l'opportunité. Au-delà de la mesure d'action qu'exige l'objectivité morale, le prince discernera plutôt la validité de son action en conformité avec la nécessité d'Etat.
La scission entre les exigences de la morale et de la politique est nette avec M, avec qui le devoir de véracité disparait pour laisser place à la nécessité de tromper. Mais comment justifier un tel retournement . Pour M la vérité tend à se confondre avec la réalité qui elle permet de justifier le mensonge.
Il écrit dans le chapitre 15 du prince qu’il refuse de penser le politique à partir d’une cité idéale comme Platon et dit « Il m’a paru plus convenable de suivre la vérité de la chose plutôt que l’imagination qu’on a d’elle » Cette vérité effective c’est la vérité intuitive que l’homme d’Etat tire de sa démarche quotidienne lorsqu’il suit la Fortune ou lorsqu’il lutte contre elle.
Vérité effective : la vérité est dans les faits et non pas dans l'imagination. Il faut réfléchir sur ce qui est et non pas sur ce qui doit être. Se débarrasser de l'imaginaire illusoire (comme croire que l'ordre du monde est voulu par Dieu) permet alors de prendre les moyens nécessaires pour mater la fortune.
Cette vérité porte sur les moyens de l’action politique qui sont la force et la ruse. Les hommes sont méchants. Et la méchanceté humaine conduit à la violence. Puisqu'il faut agir en conséquence avec le milieu où l'on se trouve, la méchanceté des hommes fait en sorte que, pour survivre, tous doivent être durs et prêts à lutter. Et dans tous les cas où une force violente doit être utilisée, Machiavel recommande d'agir vigoureusement et rapidement. Il importe surtout d'être toujours méfiant.
Force : en quoi la violence est nécessaire en politique ? Sans elle que la loi soit juste ou non elle reste sans effet.
Ruse : La dissimulation est nécessaire car les gouvernés ont besoins de croire en la bonne foi du gouvernant
- Les hommes sont méchants et pas dignes de confiance
- Permet de conserver le pouvoir en se faisant craindre d’autrui tout en donnant confiance aux siens.
Le réalisme politique de Machiavel s'appuie sur une vision pessimiste de l'homme : les hommes sont méchants, inconstants et déraisonnables, incapables de tenir leurs engagements. S'ils étaient raisonnables, il serait possible de les gouverner par les lois, mais parce qu'ils ne le sont pas, le Prince doit "faire la bête" : "être fort comme le lion et rusé comme le renard".
Deux concepts philosophiquement importants par lesquels Machiavel explique le cours de l'histoire. Dans la tradition philosophique le concept de vertu a été souvent pensé en rapport avec le bien moral et partant en rapport avec le bonheur de l'homme. Avec Machiavel la vertu (en italien virtù), cesse d'être un concept moral. Elle est désormais un concept politique désignant premièrement les qualités qui rendent un homme propre à l'exercice du pouvoir politique. La vertu chez Machiavel se confond alors avec la force du caractère entendue comme une grande énergie mise au service d'une grande ambition. Elle est aussi le talent politique voire le bon sens politique, mieux une aptitude à bien évaluer et à savoir exploiter une situation politique qui peut être l'oeuvre de la fortune.
Prince :
L'image du politique machiavélien se résume fort bien en la personne du prince. En effet, le prince machiavélien accède au trône par deux moyens, à savoir le moyen de la fortuna ou celui de la virtù. De ces deux manières la préférence ne semble plus être que du côté de la virtù. La fortune est trop capricieuse pour maintenir pendant longtemps un prince au trône s'il n'a pas appris par lui-même à lui donner la forme nécessaire par ses talents.
Dès lors, le politique machiavélien est appelé à cultiver (en lui), l'idée d'une recherche continuelle du sens de la mesure. C'est dans la dialectique entre virtù et fortuna que le politique machiavélien peut désormais quêter le but qui lui revient en sa qualité d'homme
Parce que ceci est digne d'être connu et d'être imité par d'autres, je ne veux pas le laisser de côté. Comme le duc avait pris la Romagne et qu'il trouvait qu'elle avait été dirigée par des seigneurs impuissants, lesquels avaient dépouillé plutôt que dressé leurs sujets et leur avaient donné matière à désunions, non pas à union, au point que cette province était pleine de vols, de querelles et de toutes autres sortes d'insolences, il jugea nécessaire de lui donner un bon gouvernement pour la réduire à être pacifique et obéissante au bras royal. C'est pourquoi il en chargea monsieur Ramiro de Lorca, homme cruel et expéditif, à qui il donna plein pouvoir. Celui-ci, en peu de temps, la réduisit à être pacifique et unie, avec une très grande réputation. Plus tard, le duc jugea qu'une autorité si excessive n'était plus nécessaire, parce qu'il craignait qu'elle ne devienne haïssable ; il en chargea un tribunal civil au milieu de la province avec un président très excellent, où chaque cité avait son avocat. Puis, sachant que les rigueurs passées avaient engendré de la haine contre lui, pour purger les coeurs des gens du peuple et se les gagner tout à fait, il voulut montrer que si quelque cruauté avait eu lieu, elle n'était pas venue de lui, mais de l'âpre nature de son ministre. Ayant saisi l'occasion à ce sujet, un matin à Cesena, il le fit mettre en deux morceaux sur la place, avec un billot de bois et un couteau sanglant à côté de lui. La férocité de ce spectacle fit que les gens du peuple demeurèrent à la fois satisfaits et stupides. |
On voit que César Borgia avait besoin d'utiliser la cruauté pour mettre de l'ordre dans sa principauté. Il ne voulait toutefois pas en abuser afin d'éviter que cela lui nuise. Il fit en sorte de se donner une apparence d'homme bon en instituant un procès et en accusant un autre à sa place comme source de l'oppression du peuple. Et il conçut une spectaculaire mise en scène : l'exposition du cadavre sanglant de son ministre fut si impressionnante que les gens du peuple cessèrent de penser, trouvant que César Borgia est si sévère qu'il ne faut pas risquer de l'irriter. Notons également que Machiavel mentionne que César Borgia " saisit l'occasion ", cela a rapport avec la conception machiavélienne de la fortune qu'il est possible de mater pour celui qui agit audacieusement sans laisser passer sa chance |
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