Que peut la mémoire face au temps ?

Que peut la mémoire face au temps ?

Intro

Selon Diderot, la mémoire, c’est cette propriété qu’a le vivant de transcender le temps. Elle assure à la fois la survivance du passé et la persistance du présent dans l’avenir. Mais que peut la mémoire face au temps ?

Le temps

• Grandeur mesurable, susceptible d’ordonner des expériences.
• Il est constitué de trois parties distinctes : passé présent et avenir.
• Le temps crée donc une continuité entre ces 3 phases.

Mémoire :

• Aussi bien la faculté de représentation du passé que la représentation elle-même
• Se rapporte au passé via les souvenirs
• Un vécu. Donc elle change (souvenirs refoulés, d’autres sélectionnés et fantasmés)

Mémoire et temps sont fondamentalement liés puisque l’un ne peut exister sans l’autre. En effet le temps permet à la mémoire de voir le jour et inversement puisque sans mémoire on ne pourrait avoir conscience de notre passé donc du temps qui passe.
La mémoire en tant que référence directe au passé semble pouvoir nous en donner une représentation fidèle MAIS elle est mouvante puisque certains souvenirs sont refoulés, d’autres fantasmé et d’autres encore sont tout simplement oubliés donc cette représentation du passé ne peut être fiable.

En particulier, l’oubli peut avoir une cause temporelle (on oublierait à cause du temps qui passe et des nouveaux souvenirs qui se créent) donc le temps détruirait aussi la mémoire.

PB :

La mémoire est-elle un moyen d’accès direct au passé et donc assure-t-elle un retour dans le temps ou bien est-elle fondamentalement un obstacle à ce retour dans le passé ? Et si la mémoire est un obstacle au temps passé, l’est-elle aussi pour le présent et l’avenir ?

Nous verrons d’abord que la mémoire est une fenêtre sur le passé mais qui ouvre sur un passé incertain ou inexact et enfin qu’elle est peut-être le moyen de mieux appréhender le présent et envisager l’avenir

1. La mémoire comme fenêtre sur le passé

1. Les 3 présents

Le temps n’existe que parce qu’on en a conscience et qu’on se souviens du passé.

Saint-Augustin propose l’hypothèse des trois présents pour contourner l’aporie du temps. Dans le 11e livre des Confessions il dit : « Il y a trois temps : le présent du passé, le présent du présent, le présent du futur... Le présent du passé, c'est la mémoire ; le présent du présent c'est l'intuition directe ; le présent de l'avenir, c'est l'attente »

• Le passé n’existe plus mais le présent du passé existe en tant que mémoire
• Le présent comme instant présent est si éphémère qu’il ne peut véritablement être, il devient directement passé. Mais Saint Augustin définit tout de même le présent du présent.
• Le futur n’existe pas encore, mais il existe tout de même sous la forme de présent du futur, par les projets et l’imagination.

Saint-Augustin change de perspective : le temps n’est plus une chose extérieure à l’homme mais n’existe que par la conscience que l’homme en prend.

• Le passé n’existe donc que si nous nous en souvenons. La mémoire est donc fondamentale pour accéder au passé.

1. Les souvenirs

Le passé peut revivre grâce aux souvenirs. Le souvenir est une trace mnésique, une empreinte, une expérience vécue dans le passé dont on se rappelle à cause d’un élément déclencheur (souvent une sensation), c’est une image mentale que l’on se représente. La faculté de mémoire a donc le pouvoir de faire revivre le passé, de le rendre présent à ma conscience. Selon Hume, dans le Traité de la nature humaine, les idées de la mémoire se distinguent de celles de l’imagination puisqu’elles sont plus vives et qu’elles nous frappent plus puisque les souvenirs sont déclenchés par des impressions et des sensations.

• Par la mémoire, le passé revit dans le présent.

1. L’histoire

L’histoire est aussi un moyen de revivre le passé. En effet,

L’histoire retrace les évènements passés donc la mémoire, en tant que faculté de convoquer ou de retrouver des images du passé est indispensable à la construction du récit historique.

L’histoire n’existe donc que grâce à la mémoire. Les historiens peuvent retranscrire des évènements passés parce qu’ils disposent de témoignages et d’archives qui eux-mêmes ne peuvent exister sans effort de remémoration.

L’histoire donc la mémoire est une trace du temps passé.

Mais il ne faut pas oublier qu’il y a une limite puisque l’histoire est subjective et déforme toujours un peu la réalité des évènements et leur exactitude. La mémoire semble être l’outil indispensable pour pouvoir accéder au passé et le faire revivre dans le présent. Mais la mémoire peut donc parfois être elle-même un obstacle au retour dans le passé comme le montre la subjectivité de l’histoire.

1. La mémoire est certes une fenêtre mais qui ouvre sur un passé incertain, inexact et incomplet

1. Inexactitude des souvenirs

Dans le Traité de la nature humaine, Hume distingue le souvenir de l’imagination. Mais cela ne veut pas dire qu’il s’agisse d’une représentation fidèle du passé. Il est sans cesse altéré, modifié et fantasmé.

1. Le refoulement

De plus certains souvenirs ne parviennent pas à notre conscience. Ces souvenirs dits archaïques sont refoulés et constituent un fonds mnésique originaire. Pour Freud, ce fonds mnésique originaire est la mémoire. C’est une mémoire oubliée mais non effacée car elle est bloquée dans l’inconscient.
Elle cherche sans cesse à s’exprimer via les rêves, les lapsus, les psychoses ou les névroses.
Donc la mémoire originaire s’exprime partout sauf dans le souvenir conscient qui déforme et travestit le véritable contenu mnésique.

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