Les positions religieuses de Pierre Bayle

LA PENSÉE DE PIERRE BAYLE

 1- Ses positions religieuses

Malgré les apparences, ce n’est pas parce que Pierre Bayle parle beaucoup d’athéisme qu’il fut lui-même athée. Il est en vérité protestant, d’un protestantisme classique en Hollande  à l’époque, un protestantisme calviniste (qui laisse un rôle à jouer à l’individu dans l’obtention de son salut contrairement au protestantisme de Luther où le salut ne dépend pas des actes de l’individu mais de la grâce divine).

D’autre part, ce qui va caractériser son protestantisme, c’est un protestantisme non dogmatique, libéral. C’est en cela qu’il s’oppose à Jurieu (ce pasteur français enseigna à Sedan avant de s’exiler en hollande où il devient professeur de théologie à Rotterdam) et autres théologiens auxquels il reproche leur dogmatisme, leurs certitudes, leur intolérance.

Mais attention, Pierre Bayle ne remet jamais en cause la religion chrétienne. Ce qu’il critique ce sont les comportements de ses coreligionnaires  ou de l’Eglise, ce n’est pas la religion en tant que telle. Il n’y a pas chez lui de remise en cause des éléments fondamentaux de la religion. Il critique les comportements des mauvais chrétiens au nom de même de la religion.

 Il critique ces  hommes qui se disent croyants, protestants et catholiques, dont la moralité est largement en deçà de celle des païens de l’Antiquité (ou même de certains athées car l’on peut être vertueux sans passer par la foi religieuse parce que la raison nous montre l’intérêt collectif que peut avoir telle ou telle vertu).

Ce qu’il essaye de faire, c’est de développer la foi religieuse dans le sens d’une rationalisation, ce qu’il recherche, c’est une foi mise en accord avec la raison, mais non pas dans le sens où la raison viendrait éliminer la religion ou même Dieu mais dans le sens où la raison viendrait éliminer les superstitions, les éléments irrationnels de la religion.

         Nous ne somme pas encore dans la posture des Lumières qui repenseront les contenus fondamentaux de la religion à partir exclusivement de la raison ce qui amènera notamment au déisme, voire à l’athéisme. Pierre Bayle se distingue donc en cela des philosophes des Lumières puisque lui-même n’est pas athée ni même déiste.

Ce qu’il condamne, ce sont ces gens qui se disent chrétiens et qui ne suivent pas les préceptes de la morale chrétienne mais obéissent à leur cupidité et à leurs passions égoïstes. Quand donc on voit des hommes commettre des violences abominables au nom de leur religion (guerres de religion) il y a alors, dit-il, deux interprétations : ou bien c’est la religion qui est un facteur direct de cette violence et donc responsable de cette violence ou bien ce sont les hommes, leurs passions qui sont responsables de cette violence.

 Pour Pierre Bayle la responsabilité des guerres de religion qui déchirent l’Europe depuis le XVIe siècle ne tient pas aux principes fondamentaux de la religion mais à l’interprétation, à l’utilisation qu’en font les hommes. D’où son effort pour dissocier d’un côté les comportements humains et d’un autre côté la morale religieuse à laquelle les gens adhèrent. Leur adhésion à telles ou telles valeurs morales ne veut pas dire qu’ensuite leurs comportements seront à la hauteur de leurs valeurs morales. Ce n’est pas parce qu’on adhère à des valeurs qu’on aura les comportements au niveau.

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