L'art a-t-il besoin de règles ?

L’art est la production de belles choses ou de formes esthétiques, par définition, l’art est donc une création originale sans utilité précise. Cependant derrière cet aspect de liberté offert par l’art, des règles et des techniques viennent structurer et encadrer les œuvres d’art. En effet, l’art recouvre deux domaines la « technê » issu du grec, qui désigne le savoir-faire, la technique des métiers de l’artisanat et les Beaux-Arts, qui au 18ème siècle viennent controverser cette définition de l’art.  Ils semblent opposés car la technique ne peut se soustraire aux règles alors que l’art semble, de son coté, échapper à toute contrainte.

Cette définition controversée nous amène à nous demander si l’art est un processus de création spontanée ou s’il est inéluctablement soumis à des règles ?

Dans un premier temps, nous assimilerons l’art comme étant la liberté et la spontanéité de création. Puis, en un second lieu nous proposerons une antithèse, à savoir qu’il n’existe pas d’art sans règles et enfin nous verrons un nouvel art qui tend à s’émanciper des règles.

Au 18ème siècle, l’apparition des Beaux-Arts apporte l’idée que l’artiste peut s’affranchir des règles pour réaliser une œuvre d’art. En effet, nul besoin de suivre des règles si nous voulons simplement créer du « Beau » et susciter une réaction agréable chez un spectateur. Selon Kant, « est beau ce qui plait universellement, sans concept ». Cette idée implique donc une certaine liberté de création. Les règles peuvent venir entraver ce sentiment de liberté. Il est donc important de distinguer l’art affranchie des règles à l’artisanat comme le fait Kant en différenciant bien les deux : l’un est dit « art libéral » et l’autre « art mercantile ». En effet, l’un est une production libre, muée par aucun intérêt et ne vise pas la satisfaction de nos besoins. L’autre, l’artisanat, est une production contrainte, muée par l’utilité. Selon Kant, l’artisanat implique donc un certain savoir-faire, des techniques et donc une fin différente de celle de la création spontanée du Beau. Finalement, Kant oppose l’art et l’artisanat car l’un se veut affranchi de toutes règles tandis que l’autre est soumis à la technique et donc à la connaissance parfaite d’une chose.

Une autre idée selon laquelle l’art n’aurait pas besoin de règles est celle du Génie. Toujours selon Kant , le génie signifie « l’esprit particulier qui a été donné à un homme à sa naissance, qui le protège, le dirige et lui inspire des idées originales. » Le Génie serait donc un talent inné offert à certains à la naissance qui réfuterait donc l’idée que l’art est une habileté obtenue à partir de règles. Kant pense que ni le talent, ni le génie ne peuvent s’enseigner.

Or, si tout cela est vrai, pourquoi les écoles d’art existent-elles ? Peut-être ne peut-on pas apprendre à se passer de règles, peut-être que l’acquisition de connaissances et de techniques semble inévitable.

        Cette transition nous amène donc à penser que la thèse selon laquelle l’art serait une totale absence de règles ne pourrait pas être défendue.

Il faut rappeler qu’avant le 18ème siècle, l’art désignait toute activité humaine qui visait à produire des objets ainsi l'art s'opposait à la nature, qui elle,  est l'ensemble de tout ce qui se fait sans que l'homme ait à intervenir. L'art est donc toujours soumis à des règles : il y a des règles à observer lorsque l'on est ébéniste, comme lorsque l'on est peintre. Cela renvoie donc au terme  téchnê, cité dans l’introduction, c’est à dire à la technique, qui est l'ensemble des règles qu'il faut suivre dans un art pour produire un objet donné. Par ailleurs, selon Aristote l’art est la production accompagnée de règles. Ainsi, il divise la production humaine en quatre causes : la cause matérielle, la matière dans laquelle un objet est fait,  la cause formelle, c’est à dire la forme qu’on va donner à cet objet, la cause finale, ce à quoi l'objet va servir et la cause efficiente à savoir l'artisan qui travaille l'objet. La technique est donc l'ensemble des règles permettant d'ordonner ces causes dans un art donné.

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