Inconscient psychique et liberté

Esther TEILLARD

L’hypothèse de l’inconscient psychique rend-elle vaine toute aspiration à la liberté ?

« L’inconscient est une méprise sur le Moi, c’est une idolâtrie du corps. » a dit Alain dans les Éléments de philosophie, insistant sur l’aspect liberticide de l’inconscient comme élément mécanique voire instinctif dans lequel uniquement le corps s’exprimerait. On serait donc poussé à opposer la notion d’inconscient psychique, soit tout ce qui est inconnu à la conscience réfléchie, à la liberté, c’est-à-dire à la capacité d’agir selon ses choix, donc d’agir en conscience. Ainsi, ces deux notions sont conceptuellement opposées étant donné qu’être libre est synonyme de maîtrise de soi et que le propre de l’inconscient psychique est justement d’échapper au contrôle. Doit-on en déduire que l’inconscient psychique vient opérer un frein à la liberté de l’individu ? L’existence de l’inconscient psychique nous empêche-t-elle d’accéder à notre liberté ? Doit-on nécessairement opposer inconscient psychique et liberté ?

L’inconscient psychique et la liberté semblent être incompatibles car avec la notion d’inconscient rentre en jeu l’idée de déterminisme psychique sur lequel l’individu n’aurait aucune emprise. En nous faisant agir à notre insu, l’inconscient nuirait à notre liberté, à notre libre-arbitre, et tout cela sans que nous en ayons conscience. Mais opposer ces deux notions revient à adopter une vision conceptuelle de l’inconscient psychique et de la liberté. On pourrait alors se questionner sur la pertinence de leur définition respective, et percevoir l’inconscient et la liberté sous un autre prisme que celui de Freud. Si l’on conçoit l’inconscient comme autre chose qu’une causalité physique et la liberté possible autrement qu’avec une conscience pleinement maîtresse d’elle-même, ces deux notions peuvent en réalité se rejoindre.

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