Dans quelle mesure l’objet du discours influence-t-il l’usage que l’on fait de la parole ?

EDS – Philosophie

Question de réflexion philosophique

• Dans quelle mesure l’objet du discours influence-t-il l’usage que l’on fait de la parole ?

        « La passion est l’âme de la parole », disait Fénelon. Ce diplomate du XVIIe siècle voulait dire par là que pour qu’un  discours fasse de l’effet, il fallait y mettre de la passion, de la vie, penser sincèrement ce que l’on dit pour parvenir à séduire l’auditoire, ce que les Grecs appelaient le « pathos ». Ainsi, suivant le sujet sur lequel on va discourir, on ne va pas forcément chercher à convaincre, à raisonner, à persuader, ou encore à concevoir. Cela est variable selon le discours que l’on va produire. Mais le discours, qu’est-ce que c’est ? Le discours est un développement oratoire sur un sujet déterminé, dit par un orateur devant un public. Il en existe trois genres : le genre délibératif, qui renvoie à un discours dont la fonction est de persuader ou de dissuader, et il renvoie par conséquent au futur, puisqu’il s’efforce d’amener l’auditoire à prendre une décision qui engage l’avenir. Puis il y a le genre démonstratif, qui renvoie à un discours dont la fonction est de louer, blâmer, ou plus généralement d’instruire. Il est parfois aussi appelé genre épidictique. Enfin, il y a le genre judiciaire. Celui-ci renvoie à un discours dont la fonction est d’accuser ou de défendre, sous couvert des valeurs du juste et de l’injuste. Il renvoie plus particulièrement au passé, puisqu’il s’agit de juger des faits, qui se sont par définition déjà écoulés. Ainsi, nous nous demanderons comment le sujet sur lequel on va discourir va influencer la fonction de notre parole, le but de pourquoi on l’utilise. En premier lieu, nous verrons comment la persuasion amène à faire changer d’avis l’auditoire, au travers du genre délibératif. En deuxième lieu, nous verrons comment l’argumentation et l’art de convaincre font changer d’avis l’auditoire en le convaincant, au travers du genre judiciaire. Et en troisième lieu nous verrons comment le discours démonstratif fait réfléchir l’auditoire en produisant sur lui une réflexion approfondie.

        « L’art de persuader à un rapport nécessaire à la manière dont les Hommes consentent à ce qu’on propose, et aux conditions des choses qu’on veut faire croire », disait Blaise Pascal, dans son livre De l’Esprit géométrique et de l’Art de persuader, (1657). Pour lui, la persuasion vise à obtenir de l’autre qu’il fasse quelque chose ou s’abstienne de le faire, sans faire usage de la force, ni de menace,… Chacun se trouve confronté, de temps à autre, au désir conscient ou inconscient, et parfois même à la nécessité, de persuader son interlocuteur. Éduquer un enfant, solliciter un emploi, faire admettre quelque chose à un ami ou à un supérieur hiérarchique, faire changer quelqu’un d’avis ou justement le faire adhérer à son idée, tout cela requiert la capacité de persuader. Or, gagner l’adhésion de quelqu’un ne va pas de soi, car « On peut convaincre les Hommes par ses propres propres raisons, mais on ne les persuade que par les leurs », disait Joseph Joubert et Paul Raynal dans Pensées, essais, maximes et correspondances de J.Joubert. C’est un exercice complexe, qui demande du savoir-faire et de l’empathie, puisque ce qui persuade n’est pas toujours ce que l’on croit soi-même. Il cherche à créer des émotions ou un lien émotionnel avec le public, à le prendre par les sentiments. Donc persuader quelqu’un fait en sorte de le faire changer d’avis, puisque l’on parvient à imposer son idée ou sa manière de penser, et ainsi à annihiler celle de l’autre. Ainsi, c’est pourquoi on l’utilise dans les discours délibératifs, quand on va s’adresser à une assemblée, à un conseil, ou même encore à un Parlement. Mais voilà, on ne parvient pas toujours à  persuader l’autre, c’est pourquoi on peut utiliser une autre technique, celle de convaincre.

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