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Mythes et imaginaires de la Méditerranée ancienne

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Par   •  21 Mai 2018  •  Cours  •  21 337 Mots (86 Pages)  •  1 131 Vues

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Mythes et imaginaires de la Méditerranée ancienne

Cours 1: Introduction générale sur le mythe

Le contenu du cours

  • Les mythes sont aussi des objets d’histoire. Produits dans des contextes donnés, issus de modes de pensée différentes des nôtres, mis en forme selon des procédés spécifiques, ils sont des façons de penser le monde et constituent un savoir partagé à une époque donnée. Leur richesse, leur polyvalence a en outre contribué à ce qu’ils soient « recyclés » dans des contextes postérieurs à l’Antiquité, très variés.

Qu’est-ce qu’un mythe?

  • Mircea Eliade, Aspects du mythe, 1963
  • « D’ailleurs, est-il même possible de trouver une seule définition susceptible de couvrir tous les types et toutes les fonctions des mythes, dans toutes les sociétés archaïques et traditionnelles? Le mythe est une réalité culturelle extrêmement complexe, qui peut être abordée et interprétée dans des perspectives multiples et complémentaires. »
  • Mythe vient du grec muthos qui signifie « récit », « histoire »
  • J.-P. Vernant (1974): Mythe et société en Grèce ancienne
  • Mythe est un mode de pensée archaïque qui s’est peu à peu opposé au logos
  • Émergence d’une pensée rationnelle au VIe siècle avant J.-C.:
  •  logos: un savoir démonstratif, étayé par des arguments et stable
  • muthos: un savoir narratif, instable (des variantes et de l’imaginaire) sorte de « fable », de « récit inventé »
  • Les grandes caractéristiques
  • Un récit:
  • Il s’inscrit dans un temps et un espace
  • Une histoire qui appartient à la mémoire d’une communauté
  • Une performance:
  • Il est raconté devant un public
  • Il est partagé dans des contextes d’énonciation précis (concours, fêtes…)
  • Il obéit aux conventions du genre dans lequel il est formulé: épopée, poésie, tragédie…
  • Un objet de réappropriation:
  • Expression à travers des traces (orales, écrites, figurées) qui donnent à écouter, lire ou voir une manière de penser le monde qui diffère selon les lieux, les époques et les sociétés
  • La réception des mythes dans notre société (BD, cinéma, musique, art…)
  • Le mythe comme « objet d’histoire » complexe et pluriel
  • Pas de forme « canonique », fixée, éternelle
  • Les mythes ont leur propre histoire car ils évoluent comme tout mode de pensée
  • Les mythes ont aussi plusieurs sens, plusieurs interprétations possibles
  • Structuralisme (Claude Lévi-Strauss): une logique classificatoire dieux/hommes, cru/cuit, permis/interdit…
  • Penser les mythes et non le mythe.
  • Idée que les mythes révèlent des structures de pensée (la « pensée sauvage », Mythologiques en 4 volumes 1964-1973).

« Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes? » P. Veyne (1983)

  • Fausse question car c’est une « vision » largement fictionnelle mais riche d’enseignements sur la représentation que se font les sociétés du monde dans lequel elles évoluent (d’où l’importance des liens de famille, de la question du destin des hommes…)
  • Dans l’Antiquité, les mythes sont des récits à portée fondatrice ou étiologique (explicative): les origines, les parentés, les événements…
  • Ils révèlent des « réseaux de sens », des relations entre les humains et les animaux, les dieux, les objets, la «nature »

Quand un érudit du IXe siècle après J.-C. lit les mythes: Photius, Bibliothèque, 186, 142a-b

  • « Dans le même volume, j’ai lu un petit ouvrage de l’érudit Apollodore; il s’intitule Bibliothèque. Il contenait les plus anciens récits des Grecs (ta palaitata ton Hellenon) : tout ce que le temps leur a donné à croire sur les dieux et les héros, les noms des fleuves, des pays, des populations, des villes, leur origine et, de là, tous les faits qui remontent aux époques anciennes. Il descend jusqu’aux événements de Troie; il passe en revue les combats que certains héros se sont livrés, leurs hauts faits et certaines pérégrinations de ceux qui revinrent de Troie, et en particulier celle d’Ulysse, avec qui se termine cette histoire des temps anciens. Le livre est en majeure partie un sommaire qui n’est pas sans utilité pour ceux qui attachent du prix à avoir en mémoire les vieux récits (ta palaia). Il porte cette suscription qui n’est pas sans élégance : «La succession des siècles, tu peux la puiser de mon érudition et tu peux connaître les fables anciennes. Ne va pas voir dans les pages d’Homère, ni dans l’élégie, ni chez la Muse tragique, ni dans la poésie mélique et ne cherche pas dans l’œuvre sonore des cycliques, mais regarde en moi et tu trouveras en moi tout ce que contient le monde.»

Un exemple: le mythe de Prométhée

  • Aujourd’hui une « figure positive » car il renvoie l’image du bienfaiteur de l’humanité
  • Il appartient aux Titans (son père est le frère de Chronos); lutte contre les Olympiens (Zeus)
  • Il a plusieurs frères, dont Epiméthée et Atlas
  • Prométhée (pro-; -mathein)= « celui qui réfléchit avant », « le prévoyant » // Epiméthée = « celui qui réfléchit après », « l’imprévoyant »
  • Le mythe apparaît dans l’un des plus anciens textes antiques: le poète Hésiode avec la Théogonie et Les Travaux et les jours (VIIe siècle)
  • Hérodote, L’Enquête (Historiè), II, 53:
  • « De quels parents chacun des dieux naquit, ou si tous existèrent de tout temps, quelles sont leurs figures, ils l’ignoraient jusqu’à une date récente, jusqu’à hier, peut-on dire. J’estime en effet qu’Hésiode et Homère ont vécu quatre cents ans avant moi, pas davantage; or, ce sont eux qui, dans leurs poèmes, ont fixé pour les Grecs une théogonie, qui ont attribué aux dieux leurs qualificatifs, partagé entre eux les honneurs (timai) et les compétences (technai), dessiné leurs figures. »
  • il faut dire qu’au jour où se réglaient les différends entre dieux et humains, ​ À Mékônè, ce jour-là, donc, après avoir, d’un grand bœuf, fait de bon cœur​ les parts, il [Prométhée] les déposa devant tous en cherchant à berner l’esprit de Zeus:​ pour l’un, la viande et les abats riches en graisse – mais...​ il les disposa dans la peau de la bête, enveloppés, cachés dans la panse du bœuf; ​ pour les autres, les os blancs du bœuf – mais... (c’est le savoir-faire rusé)​
    il les disposa de belle façon, enveloppés, cachés dans la graisse luisante.​

Alors le père des hommes et des dieux lui dit :​

«Ô fils de Japet, remarquable entre tous les maîtres et seigneurs,​ quelle partialité, mon bon, dans ta répartition des lots !»​
Ainsi parlait, d’un ton railleur, Zeus qui ne connaît que desseins impérissables.​

Mais, de son côté, Prométhée aux pensées retorses répliqua, ​ avec un petit sourire et sans oublier le savoir-faire rusé: ​«Ô Zeus très glorieux, le plus grand des dieux éternels,​ mais choisis donc, de ces deux lots, celui que ton cœur dans tes entrailles, te dit de prendre !»​ Voila ce qu’il disait, n’ayant que ruse en tête. Zeus, qui ne connaît que desseins impérissables,​ reconnut – il fut loin de la méconnaître ! – la ruse; et il prévoyait en lui-même les maux qui attendaient les humains mortels : ceux qui, justement, allaient se réaliser.​
Mais, à deux mains, il souleva et prit pour lui la blanche graisse​
– et la rage lui serra les entrailles, la bile de la colère envahit son cœur,​
quand il vit les os blancs du bœuf (et le savoir-faire rusé).​
C’est depuis lors que, pour les immortels, les tribus des humains de la terre​
font brûler les os blancs, sur les autels odorants." ​
Théogonie, v. 536-557

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