Un livre peut-il influencer un destin?
Dissertation : Un livre peut-il influencer un destin?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar arnaudarnaud • 4 Juillet 2018 • Dissertation • 2 140 Mots (9 Pages) • 1 491 Vues
DISSERTATION : UN LIVRE PEUT-IL INFLUENCER UN DESTIN ?
« J’appelle un livre manqué, écrivait André Gide dans les Cahiers de Walter, celui qui laisse intact son lecteur ». Ainsi, le prix Nobel de littérature nous amène à penser que le but d’un ouvrage est de marquer, de frapper son lectorat voire de l’influencer. En effet, certains livres peuvent influer le lecteur et l’amener à de graves conséquences pour lui et pour autrui. C’est pour cela que Chateaubriand a déclaré qu’il n’aurait jamais écrit René (1802) si ‘il avait su que cette ouvrage « infesterait » la jeunesse. De même, de nombreux jeunes se sont suicidés après avoir lu le Werther de Goethe (1774) du fait de sa triste fin. Dès lors, nous demander si la littérature peut avoir une influence négative sur les personnes ? Nous verrons que certes, la littérature peut influencer par la négative un individu en proposant un modèle d’existence. Néanmoins un livre est un recueil stylistique ouvert à l’interprétation. De ce fait, l’on doit se servir des lectures comme inspiration pour s’élever.
La littérature peut influer péjorativement son lectorat car, de par le récit, l’auteur nous dévoile un mode de vie avec ses propres règles. Ainsi, l’ouvrage peut nous corrompre car il présente un mode de vie détaché de la réalité. De plus, il est facile de s’identifier au protagoniste principal et ainsi de s’inspirer de lui. Enfin, la littérature idéalise et donc déçoit, comme peut l’illustrer le bovarysme.
La littérature est un monde dégagé de ce qui est vrai. Tout est mensonge dans les belles-lettres et tout ce qui paraît juste n’est rien de plus que le fruit de l’imagination de l’auteur. Ainsi, les récits nous présentent un univers où les conséquences des actions ne reflètent en rien celles qu’elles devraient avoir dans la vie. Les situations sont caricaturales et les retournements de situation ont plus vocation à être cocasses, voire surprenantes, plutôt qu’à dépeindre ce qui se passerait dans la réalité. En effet, dans Le Tour du monde en 80 jours de Jules Verne, le personnage principal, Phileas Fogg, parvient à garder sa fortune grâce à une erreur de date alors qu’il est en prison. Ainsi, il s'aperçoit qu'il a gagné vingt-quatre heures sur le calendrier en voyageant d'ouest en est, rallongeant alors son délai de 24 heures. Cette facilité scénaristique porte le nom de « Deus ex Machina », soit un coup du sort ne faisant aucunement parti de la situation initiale. Par conséquent, le lecteur ayant fait de telles lectures ne cesserait d’attendre un « geste divin » au lieu de prendre ses responsabilités au sérieux. Pourtant c’est souvent au personnage principal qu’on s’associe, plus qu’au monde qui l’entoure.
C’est pour cela qu’il est dangereux de s’associer au héros car c’est souvent le personnage qui prend le plus de risques inconsidérés. Cependant il est souvent difficile de s’identifier à ceux-ci justement par leur caractère héroïque. En effet, ils incarnent des qualités difficilement atteignables par le commun des mortels comme la bravoure en toute circonstance ou la passivité constante. C’est pour cela qu’un lecteur peut plus facilement s’identifier à l’anti-héros. C’est un personnage ne respectant aucunement les standards classiques de cette figure et se présentant sous les traits d’une personne lambda, donc avec des qualités et des défauts banals. Donc, il est plus aisé de s’identifier à cet individu car il peut nous ressembler sous de nombreux angles. Néanmoins, il ne prends pas moins de risques qu’un héros classique et c’est pour cela que la projection facile dont il fait l’objet peut-être dangereuse. En effet, dans « L’Etranger » d’Albert Camus, le personnage principal, Meursault, finira par se faire guillotiner, en grande partie à cause de son incapacité à faire des choix, caractère pourtant commun à de nombreuses personnes. Ici, l’identification à ce personnage nous pousserait à adopter le même caractère que celui-ci et ainsi à répéter les mêmes erreurs de part l’attachement à ce personnage si invisible qu’il en devient tout le monde. Ainsi, nous avons la preuve que si un roman donne des illusions et que nous transposons ces idées dans le monde réel, le retour à la réalité est souvent difficile car un véritable fossé existe entre le monde romanesque et la vie réelle.
Ainsi, chaque œuvre littéraire véhicule une vision du monde qui lui est propre. Pourtant aucune d’entre-elle n’atteint la même exactitude que le réel car ce concret est la retranscription de qui est vu par l’auteur. Ainsi, les ouvrages, en nous donnant une vision souvent méliorative du monde, déçoivent dès que le livre est clos. Ici, ce n’est non pas l’association de la réalité au récit qui est dangereuse, mais bien le désespoir engendré par la révélation de cette réalité. Le critique Jules de Gaultier donnera à cette pathologie le nom de bovarysme, découlant du personnage d’Emma Bovary dans le roman de Gustave Flaubert. Dans cet ouvrage, celle-ci finit par se suicider du fait de son désespoir amoureux, causé par la confrontation entre ses lectures romanesques et ses échecs amoureux. C’est justement cette même confrontation qui a poussé ces jeunes à se suicider à la suite de la lecture du roman de Goethe. Ainsi, l’illusion que véhiculent tous les romans est dangereuse pour chacun des lecteurs car le syndrome que représente le bovarysme est renforcé aujourd’hui du fait de la modernité. En effet, à cause des nouvelles technologies, les relations amoureuses n’ont plus rien a voir avec des livres piliers comme Roméo et Juliette ou Orgueils et préjugés. Cependant, il incombe à chacun de ne pas sur-interpréter les différents ouvrages car l’on risquerait d’interpréter un message à notre guise.
C’est pour cela qu’un livre n’est donc qu’un recueil stylistique à interpréter et on ne pourrait nullement accuser un ouvrage de délivrer un mauvais message car : chaque texte possède une marge interprétative plus ou moins grande, c’est plus l’auteur qui, en faisant figure d’autorité, influence, plus que ses ouvrages et car l’on peut considérer la théorie de l’art pour l’art comme s’appliquant à tout les livres.
Dans l’introduction de Paludes, André Gide déclarait : « Avant d’expliquer aux autres mon livre, j’attends que d’autres me l’expliquent. Vouloir l’expliquer d’abord c’est en restreindre aussitôt le sens ». Ainsi, un livre tout comme un texte n’a pas d’interprétation unique et il convient au lecteur de se faire sa propre image de l’ouvrage selon sa culture et ses expériences. Ainsi, chaque texte doit être lu de façon dialogique ou polysémique afin d’en saisir toutes les nuances et d’avoir au final une meilleure compréhension de celui-ci. Une personne peut très bien avoir une vision complètement différente d’une autre sans que cela choque. C’est pour cela que même si Le Misanthrope de Molière est vu aujourd’hui comme une tragédie, l’auteur, quand à lui, considérait cette pièce comme une comédie. De plus, dans le théâtre, le metteur en scène a le pouvoir de donner une autre dimension, et ainsi une autre interprétation au texte originel de par le choix des accessoires, des décors et des acteurs. Donc, l’auteur n’est pas responsable d’une interprétation unique de ses écrits. D’ailleurs, c’est plus souvent celui-ci qui influence plus que ses récits.
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