Rhinocéros, Ionesco

Rhinocéros Eugène Ionesco

Lecture Analytique 3 : La résistance de Béranger

Béranger est désormais tout seul sur scène. C’est donc son monologue qui clos la pièce. Tout le monde s’étant transformé en Rhinocéros, il est lui aussi tenté un temps par le rhinocérisme. Mais après un long cheminement fait de doutes et d’incertitudes il prend la décision de résister et de défendre son humanité.

I) La solitude radicale et tragique de Béranger

a) Le monologue

Le recours au monologue est ici justifié par l’évolution de la pièce qui a conduit à la métamorphose de tous les personnages. Béranger est le dernier homme il n’a plus d’interlocuteur. La présence du miroir accentue le reflet de la solitude. Béranger est désormais son propre interlocuteur : « il se parle à lui-même dans la glace », « il retourne vers la glace », « il va vers la glace », « il contemple sa poitrine dans la glace ».

Privé de tout interlocuteur Béranger tourne en rond dans sa propre parole. La faillite de la communication est constatée de façon tragique par Béranger : « Je suis tout à fait seul maintenant ». Le miroir devient ainsi comme la projection du désir inconscient de Béranger de retrouver les semblables.

La disposition scénique nous permet de souligner la place particulière occupée par le public. Le procédé de la double énonciation nous force à inclure le public dans la conversation entre Béranger et lui-même. Finalement on peut se demander si le public n’est pas le véritable destinataire des propos de Béranger. La portée argumentative de son discours lui compère des allures polémiques. En effet Béranger ne cherche-t-il pas à provoquer la réaction des spectateurs afin de les sensibiliser dut au phénomène rhinocérique ? Mais ce public n’est-il pas qu’une masse anonyme de ces rhinocéros ? En fin de compte le défi final que tente Béranger au rhinocéros semble lui être adressé directement.

b) Béranger et les autres

La dichotomie entre Béranger et le reste du monde est signalé pas l’opposition des pronoms personnels : «je » à « eux » ; « je » et « tout le monde ».

Cette scène consacre aussi un renversement de valeurs. Puisque Béranger est désormais le seul être humain il devient l’anormal, le marginal qui dérange la norme de référence (être rhinocéros).

Béranger se considérant lui-même d’ailleurs comme un monstre se compare à son désavantage aux rhinocéros. Les rhinocéros sont connotés positivement. Le contraste de la beauté et de la laideur (« je ne suis pas beau » opposé à « ce sont eux qui sont beaux » dit Béranger ) est dupé à travers 3 formes d’opposition : la forme «corne » différent de « front plat » « traits tombants » la texture : « moite » opposé à « rugueux » ; « flasque » opposé à « dure » ; « sans poil » opposé à « poilu » la couleur «trop blanc » opposé à « magnifique couleur vert sombre » même les barrissements lui apparaissent comme des « chants » qu’il oppose à la faiblesse de sa propre voix humaine. Ce dupe alors un véritable éloge des rhinocéros qui accentuent encore plus sa solitude et le conduit à un véritable constat tragique : il est difficile d’assumer sa différence, d’être sois. Le sentiment qui anime Béranger est donc la honte « j’ai trop honte », « comme j’ai mauvaise conscience », « j’ai eu torts ». Ce monologue exprime la douleur de Béranger qui est d’abord d’être humain. On relève une ponctuation expressive qui souligne avec lyrisme cette souffrance psychologique (registre pathétique). Les phrases exclamatives, les interjections, les répétitions désespérées révèlent les doutes profonds de Béranger qui finit par se demander s’il ne vaut pas mieux à être rhinocéros.

II) Les tentatives de Béranger

a) Devenir rhinocéros

Bien qu’ayant répété : « je suis un être humain » il finit par se demander si la

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