Madame Bovary analyse
Commentaire de texte : Madame Bovary analyse. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Georges Sarkis • 25 Novembre 2019 • Commentaire de texte • 1 414 Mots (6 Pages) • 918 Vues
La scène est perçue à travers le regard d’Emma, qui profite de cette brève intrusion dans le monde de ses rêves pour observer attentivement ce qui l’entoure : les deux premiers paragraphes sont centrés sur la description des invités, leurs vêtements, leur allure générale, le troisième est consacré aux conversations qu’Emma entend en se promenant parmi les groupes, et le quatrième évoque un événement particulier : les domestiques brisent une fenêtre pour permettre une entrée d’air frais. Flaubert s’efface et nous entrons directement dans la conscience d’Emma. Il s’ensuit une description fragmentée, qui est à mettre au compte de la focalisation interne.
Le regard d’Emma, avide de détails, passe d’un élément à un autre sans organisation précise : les «habits», les «cheveux», le «teint», le «cou», la « cravate », les « favoris », les « cols », les « mouchoirs brodés » (l. 1 à 7), l’attitude (l. 8 à 13). Le modalisateur « semblaient » (l. 1) témoigne des limites engendrées par cette focalisation interne; la précision «À trois pas d’Emma » (l. 14) montre qu’elle est susceptible d’entendre la conversation proche, ce qui est confirmé avec humour ligne 17 « Emma écoutait de son autre oreille une conversation pleine de mots qu’elle ne comprenait pas.»
2� La perception que Madame Bovary a des personnes qui l’entourent traduit son admiration pour elles. La focalisation interne est tout aussi révélatrice des aris- tocrates que d’Emma qui les regarde.
On remarque :
– la répétition des déterminants possessifs : « leurs » (l. 1, l. 5), qui renvoie à ces quelques invités. Emma se met en tête d’isoler des particularités au sein d’un groupe, de mettre en relief une spécificité ;
– tout un réseau de termes de supériorité, de com- paratifs, auxquels il manque le complément, qui est implicite (c’est le reste du groupe) : «mieux faits», « plus souple », « plus fines » (l. 1-2). Cette absence de comparatif démarque encore davantage ces hommes, et exprime leur supériorité absolue, totale ;
– des termes sont laudatifs en eux-mêmes : «souple» (l. 1), «fines», «lustrés» (l. 2), «blanc» (l. 3), «exquises» (l. 5), «suave» (l. 7)... Ces termes de connotation positive renvoient à l’aisance sociale. Ainsi l’allure et le maintien définissent selon Emma une sorte de supériorité faite d’élégance, d’aisance. Le «large chiffre» (l. 7) renvoie à l’initiale nobiliaire. Cette distinction est associée à un niveau social, symbolisé par une série d’éléments eux-mêmes qualifiés par des compléments du nom qui assi- milent richesse et luxe : « la pâleur des porcelaines, les moires du satin, le vernis des beaux meubles », « un régime discret de nourritures exquises » (l. 2 à 5). À noter la présence d’une allitération en p et l dans l’expression « pâleur des porcelaines » qui ajoute à la poésie de l’évocation. Tous ces éléments consti- tuent le réseau lexical du luxe, décliné en mobilier et accessoires ; le domaine culinaire est également concerné, avec l’adjectif « exquises », au sens parti- culièrement positif. Cette série indique la définition qu’Emma se fait de la richesse, qu’elle assimile au luxe, distinctif de l’aristocratie. Ainsi, pour elle, il existe un rapport, un déterminisme entre l’être et le milieu. Elle intègre des stéréotypes à ce qu’elle pense être la vie aristocratique.
Emma analyse deux aspects fondamentaux pour elle :
– d’abord, cet air qui ne correspond pas à leur âge : « Ceux qui commençaient à vieillir avaient l’air jeune, tandis que quelque chose de mûr s’étendait sur le visage des jeunes. » (l. 8-9) le chiasme traduit une osmose qui lie les hommes jeunes et les plus âgés. Tous ces hommes paraissent sans âge réel, comme si le temps n’avait pas sur eux le même poids que sur les autres. Cela semble s’expliquer par un rapport particulier aux passions : leur air indifférent constitue leur particularité ; ce sont des regards de possession, de domination, non de désir. Leur vie affective est aussi riche que leur vie matérielle. Cette panoplie de
CHAPITRE 1 Le roman et le récit du Moyen Âge au xxie siècle | 21
signes permet à Emma de croire que les héros de ses romans existent réellement ;
– ensuite, l’analyse se fait plus
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