Les droits de la femme / Olympe de gouge

Étude 1

La littérature XVIe au XVIIIe siècle

EL6 / Extrait 1 : « Les droits de la femme / Exhortation aux hommes », page 17, lignes 1 à 19

Introduction :

- La Révolution française de 1789 est l’aboutissement d’un siècle entier tourné vers la revendication de davantage de droits accordés à tous les citoyens. Par la rédaction de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, cette révolution signe le passage de l’Ancien Régime vers une République plus juste, par l’abolition de tous les droits et privilèges. Cette Déclaration anticipe la rédaction de la « Première Constitution française », qui a été adoptée le 3 septembre 1791. Les années 1789 à 1791 ont été marquées par de profonds bouleversements politiques, juridiques et sociaux, qui ont malheureusement eu tendance à évacuer la question des femmes, malgré la part importante que les femmes ont prise lors des manifestations révolutionnaires. (pour cette mise en contexte historique, voir la chronologie dans votre livret, à la page 48)

- A travers la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, rédigée puis publiée dans l’urgence le 5 septembre 1791, Olympe de Gouges, née Marie Gouze, appelle ses concitoyennes à réclamer les mêmes droits que les hommes, et à dénoncer les inégalités dont elles sont victimes, en dépit de la promulgation de la « Première Constitution française ». Son texte constitue un geste politique considérable : en réécrivant la Déclaration de 1789 du point de vue des deux sexes, Olympe de Gouges veut parachever la promesse d’égalité de la Révolution française.

- Pour faire bouger les lignes initialement fixées par la Déclaration de 1789, Olympe de Gouges s’adresse successivement à la Reine, aux hommes, à l’Assemblée nationale, puis aux femmes. Les trois premiers sont des interlocuteurs privilégiés, dans la mesure où ils incarnent le pouvoir et bénéficient d’une position privilégiée par rapport aux femmes ordinaires. Dans cette œuvre qui n’obéit à aucune norme littéraire connue jusque là, le cœur de l’ouvrage est constitué par un Préambule et 17 articles de lois, qui sont une réécriture au féminin du Préambule et des 17 articles de lois de la Déclaration de 1789. Précédé d’une dédicace à la Reine Marie-Antoinette, puis d’une exhortation aux hommes, ce cœur de l’ouvrage est suivi d’un Postambule qui pousse les femmes à se soulever, puis d’une proposition intitulée « Forme du contrat social de l’homme et de la femme », sorte de nouveau contrat conjugal.

- Dans l’exhortation aux hommes, notre extrait d’étude, Olympe de Gouges incite les hommes sur un ton satirique voire pamphlétaire, à prendre conscience de leur comportement inégalitaire envers les femmes.

- Nous verrons par quelle stratégie argumentative Olympe de Gouges tente de sensibiliser les hommes à la cause des femmes, et d’obtenir ainsi leur soutien concret dans son combat pour l’égalité entre tous les citoyens, sans discrimination sexiste.

Après une remise en cause musclée de l’homme, représentant le sexe masculin, privilégié par la société (l.1-6), l’autrice invite l’homme à observer la nature pour mieux constater les erreurs de son comportement (l.7-13), puis elle décrit de manière péjorative les aberrations et les paradoxes que présente ce comportement, dans une société transformée par la pensée des Lumières (l.14-19)

Développement :

I / [La remise en cause musclée de l’homme, représentant le sexe masculin, privilégié par la société (l.1-6)]

=> Dans le premier mouvement de l’extrait, Olympe de Gouges remet tout d’abord les hommes en cause, de manière très musclée, pour leur faire constater qu’ils sont les représentants d’un sexe privilégié par la société.

• L’adresse aux hommes débute par une invective directe, qui met immédiatement en opposition le sexe masculin et le sexe féminin :

- cf. apostrophe mise en apposition en tête de phrase, au masculin singulier « Homme » / « tu »

=> le destinataire est ici l’« homme » au singulier : mais adresse élargie à tous les hommes : ce singulier a pour effet de viser le destinataire de manière plus ciblée et plus personnelle que le pluriel. Aucun homme ne pourra ainsi échapper à son argumentaire.

=> « homme » à comprendre comme « appartenant au sexe masculin », et non pas comme « humain » : car mis en opposition avec « une femme » dans la phrase suivante

=> le déterminant indéfini « une » met en valeur la locutrice, Olympe de Gouges, comme une représentante « des femmes en général »

=> référence ici à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, où « homme » est entendu au sens générique de l’humanité entière, contrairement à « homme » dans ce contexte

- cf. tutoiement : pronom personnel 2ème pers du singulier « tu » : met sur un pied d’égalité homme et femme

- cf. phrase interrogative directe, de registre soutenu : invective musclée qui oblige à une réponse + tournure qui souligne le niveau de langue d’Olympe de Gouges, « une femme », capable elle aussi de s’exprimer de manière éloquente et littéraire

- cf. interrogation qui porte sur la capacité à être « juste » : justice = préoccupation primordiale pour l’autrice, qui se bat pour chaque être humain

- cf. interrogation totale : les seules réponses possibles = oui, non, ou peut-être…

=> il va falloir argumenter sérieusement pour répondre à cette question fondamentale, vu les prétentions des hommes qui ont supervisé la rédaction de la « Première Constitution » : l’homme voudra répondre « oui », puisque la Déclaration été rédigée dans cet esprit. Olympe de Gouges le sait : jamais il ne reconnaîtra que c’est « non », et jamais il ne se risquera à répondre « peut-être ».

cf. phrase injonctive et interrogative à la fois : « Dis-moi ? »

=> sous-entend que le destinataire reste sans réponse, car attaque directe et inattendue + réponse capitale et difficile à donner

= injonction qui presse pourtant le destinataire de répondre : l’ « homme » est poussé dans

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