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Lecture analytique « Les animaux malades de la peste », Fables ( VII,1) La Fontaine

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Par   •  22 Mars 2020  •  Commentaire de texte  •  3 442 Mots (14 Pages)  •  887 Vues

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      Lecture analytique «  Les animaux malades de la peste », Fables ( VII,1) La Fontaine

  Le texte proposé à notre analyse est extrait du livre VII des Fables  de La Fontaine. Cette fable est issue du second recueil rédigé à partir de 1678. Il est dédié à Madame de Montespan, maîtresse de Louis XIV. Cette dédicace inscrit d’emblée les nouvelles fables dans une dimension plus « adulte » que celles éditées dans le premier recueil dédié au Dauphin , fils de Louis XIV. A l’époque de l’écriture du second recueil, La Fontaine est pensionnaire chez Madame de la Sablière, esprit ouvert et curieux et qui reçoit dans son salon , écrivains, savants, philosophes… Cette fable met en scène la société des animaux sur laquelle un fléau s’abat : la peste ! Nous nous demanderons en quoi cette fable dénonce l’iniquité d’un procès. D’une part, nous analyserons la mise en scène d’un jugement et , d’autre part, nous montrerons que ce jugement s’avère injuste.

   Les premiers vers de la fable constituent un prologue très solennel et impressionnant. C’est un spectacle de désolation qui est peint. La tonalité est tragique. En effet, la peste « dont la révélation du nom est retardée  au vers 4 « La Peste (puisqu’il faut l’appeler par son nom) » est un fléau divin dans l’ Antiquité, comme on le voit au début de la tragédie Œdipe- Roi de Sophocle : Apollon envoie le «  Mal » sur la ville de Thèbes car le meurtrier du Roi Laïos n’a pas été châtié. La Peste vient donc sanctionner une souillure, une faute. La maladie est le signe de la colère des Dieux, comme le souligne la périphrase « Le Ciel en sa fureur », et d’une faute humaine ainsi que le corrobore la proposition infinitive de but « pour  punir les crimes de la terre ». L’humanité entière , coupable sans que l’on sache de quoi, est confrontée à un « mal » venu d’une transcendance qui lui fait « la guerre », sans qu’elle puisse se défendre. Il s’agit donc de trouver un coupable, victime sacrificielle qui va expier la faute et préserver ainsi la collectivité. Le registre tragique est prégnant en ce début de fable. En effet, le champ lexical de la mort à travers le polyptote » mouraient, mourante » ainsi que « frappés », « l’ Achéron»(  fleuve des Enfers antiques) est omniprésent. De plus, comme dans toute tragédie, les hommes se montrent impuissants face aux décisions des Dieux. Cette idée est suggérée par l’emploi récurrent de la négation sous différentes formes «  On n’en voyait point « , « nul mets n’excitait leur envie », « Ni  Loups ni Renard n’épiaient », « Plus d’amour, plus de joie ».La Peste ôte à tous le goût de la vie, le désir ;l’appétit des animaux, des grands fauves disparaît. Les forts agonisent dans la mélancolie collective… En outre, on retrouve la présence de deux ressorts tragiques : la terreur et la pitié. La terreur se signale par l’horreur à prononcer le nom « Peste », remplacé par la périphrase anaphorique « Un mal »  et « Mal ». La pitié, quant à elle, est rendue sensible  par l’évocation  des tourterelles « Les Tourterelles se fuyaient/ Plus d’ amour, partant plus de joie ». Les tourterelles sont les oiseaux consacrés à Vénus ( déesse de l’ amour) et symbolisent donc ce sentiment. De surcroît, comme dans la tragédie, la rhétorique est ample et solennelle : la longueur de la première phrase de la fable avec retard du sujet « la Peste » ainsi que du verbe «  faisait la guerre » valide cette idée.  Pour finir, la majuscule au substantif «  Peste » en fait une allégorie du Mal ( personnification d’une idée abstraite). Il s’agit donc d’un tableau initial très sombre qui plonge le récit dans une atmosphère tragique , peu courante dans les Fables. On peut noter que l’on retrouvera cette tonalité avec un vocabulaire exacerbé de la faute à la fin du texte : » mal », « pendable », »crime abominable » , expier son forfait ». Le thème du « bouc-émissaire » rejoint encore Œdipe- Roi par la dimension religieuse du coupable qui devient « maudit » et qu’’il faut « dévouer » pour les autres.

   Ce qui nous est donné à lire est le récit d’un procès. Le récit s’organise ainsi : tout d’abord,

les vers 1à 14, présentent une situation initiale du fléau sur un ton tragique. Le texte est à l’imparfait « faisait », « mouraient » « étaient » « n’en voyait » , « n’excitait », « n’épiaient », « se fuyaient » ce qui souligne un état qui dure (imparfait duratif). Le premier vers est  au présent de narration « un Mal qui répand » pour remplacer le passé-simple puis au passé-simple » inventa », ce qui représente en fait , une seule scène. Ensuite des vers 15 à 34, on entend le discours du Lion , le premier  et le plus long. C’est cette prise de parole du Lion qui constitue l’élément moteur de l’action. Puis des vers 34 à 42, on assiste au discours du Renard commentant celui du Lion : il est présenté sans aucune transition, à la suite du précédent. Des vers 43 à 48, sommaire présentant les réactions des « gens querelleurs » , terme générique . Le discours de l’âne s’étale sur les vers 49 à 54. Ensuite des vers 55 à 62 les réactions au discours de l’ Ane vont bon train ; le « baudet » est condamné et exécuté immédiatement. Les derniers vers contiennent la moralité , rapide et lapidaire » Selon que vous serez puissant ou misérable/ Les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir ». Après un début étonnamment long, l’action procède très vite, quasiment en temps réel. La Fontaine insiste sur les deux premiers discours, modèles d’hypocrisie et de flatterie. Il passe sur les autres qui paraissent bien grossiers dans leurs mensonges » au dire de chacun étaient de petits saints ». Le narrateur n’explique pas en quoi consistent leurs fautes : quelle qu’en soit leur gravité, puisque ce sont des « puissances » qui avouent, elles ne pèsent pas. Pour finir, après le court discours de l’ Ane, l’action s’accélère pour souligner le caractère expéditif du procès et de l’exécution.

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