Le portrait de Vautrin dans Le Père Goriot d’Honoré de Balzac

Commentaire littéraire : Le portrait de Vautrin dans Le Père Goriot d’Honoré de Balzac

Vautrin est donc assimilé à un personnage séduisant, dégourdi et futé, mais c'est de manière rapide que ressort son côté énigmatique.

Derrière ses bonnes apparences physiques et morales se cache néanmoins le caractère d’un autre homme. En effet, Balzac, par le choix des mots, nous décrit ici le portait d'un personnage craint, mystérieux par ses habitudes, son expérience, son ébauche de réflexion. Il nous fait ainsi part de ses mœurs passées en donnant des indices.

C’est tout d’abord sa physionomie qui nous fait découvrir un passé énigmatique. En effet, « sa figure (est) rayée par des rides prématurées », celles-ci ne traduisant pas l’usure de l’âge, mais constituant la marque d’une vie intense, singulière, assez forte pour avoir laissé des traces. C’est, en somme, une face burinée d’un grand navigateur de la vie. Nous pourrions également interpréter ces « rides » comme une ressemblance à des barreaux, probablement ceux qui constituent la prison. Vautrin aurait donc passé une partie de sa vie au bagne où les conditions sont effroyables à l’époque et où la mort peut poursuivre certains des détenus. De plus, Vautrin à l’air de se cacher sous ses « favoris peints ». En effet, on constate un peu plus tard, que cet homme a des « poils touffus (…) d’un roux ardent » présents sur ses mains, traduisant son côté sauvage tel un renard. Cette métaphore indique son caractère rusé.

C’est ensuite dans un discours direct que Vautrin affirme tout savoir en disant « ça me connaît ». C’est par ce biais là qu’il nous fait part alors de son habileté. L’exemple de la dextérité manuelle, la remise en état des serrures, a été visiblement choisie en fonction de sa valeur prémonitoire très évidente. Le rythme enlevé de la phrase, construite en juxtaposition de participes passés, marque bien l’agilité dans la manipulation : « Si quelque serrure allait mal, il l’avait bientôt démontée, rafistolée, remontée… ». Au-delà du mouvement des mains, ces mains redoutables que l’on voit en action, on sent l’efficacité d’un homme qui règle vite les problèmes, qui tranche, agit et va de l’avant dans le concret et dans la vie. Mais cette capacité manuelle nous laisse également repenser à l’idée d’une expérience au cours de la période passée au bagne où il a pu s’échapper, d’où son habileté.

De plus, nous pouvons nous poser des questions sur son passé lorsque le narrateur explique qu’il « connaisait tout », « les vaisseaux, la mer, la France, l’étranger, les affaires, les hommes, les évènements, les lois, les hôtels et les prisons ». Nous pouvons alors classer ses différentes expériences dans trois différents registres. Tout d’abord, nous pouvons regrouper « les vaisseaux, la mer, la France (et) l’étranger » puisque ces termes marquent le mouvement. Vautrin n’est donc pas un sédentaire, il connaît des pays, il a couru le monde et a mené une vie aventureuse. Ensuite, nous pouvons rapprocher « les affaires, les hommes (et) les évènements » qui indiquent que ce n’est pas un contemplatif, ni un homme d’étude, mais un praticien : il a été mêlé aux choses et aux gens, en acteur fortement impliqué. Enfin, nous pouvons réunir « les lois, les hôtels et les prisons » car c’est ici qu’apparaît son originalité et sa personnalité peu commune. En effet, il a réfléchi à l’ordre social et

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