La laitière et le pot au lait

INTRODUCTION GÉNÉRALE

S’il a abordé presque tous les genres littéraires, c’est dans les contes et surtout dans les fables, dans

lesquels il manifeste son goût de l’hétérométrie, sa fantaisie et son souci de plaire, que La Fontaine trouve

véritablement sa voie. En effet, avec la fable, il réinvente un genre qui devient une forme littéraire appréciée.

Sans doute inspirée de la « Comparaison des alchimistes à la bonne femme qui portait une potée de

lait au marché », nouvelle de l’auteur de contes français du XVI° siècle Bonaventure des Periers, « La

Laitière et le pot au lait », fable 10 du livre VII met en scène un personnage humain, Perrette, jeune

paysanne, qui va vendre son lait au marché... Cette fable propose alors un court récit qui respecte les

étapes du schéma narratif et offre à La Fontaine, qui revient au présent de l’énonciation, la possibilité de

s’interroger sur le pouvoir de l’imagination.

LECTURE

PROJET DE LECTURE : Dans quelle mesure la mésaventure de Perrette permet-elle à La Fontaine

de proposer une réflexion sur les méfaits de l’imagination ?

EXPLICATION LINÉAIRE

Plan

I. Vers 1 à 29: la comédie humaine : un plaisant récit champêtre au schéma narratif

rigoureux.

1 - V. 1 à 6: situation initiale

2 - V. 7 à 21: élément perturbateur et péripéties

3 - V. 22 à 23: élément de résolution

4 - V. 24 à 29: situation finale

II. Vers 30 à 43: une réflexion sur les méfaits de l’imagination

1 - V. 30 à 37: une réflexion générale : La Fontaine moraliste véhicule une morale austère

2 - V. 38 à la fin: le point de vue plus nuancé de l’auteur : La Fontaine fabuliste

CONCLUSION GÉNÉRALE

La comédie humaine contenue dans ce plaisant récit champêtre permet à La Fontaine, au travers d’un

récit au schéma narratif rigoureux, d’exprimer une vision ambivalente de l’imagination dont, en bon

moraliste, il dénonce les méfaits ; mais le La Fontaine fabuliste ne peut, quant à lui, qu’en proposer une

approche plus nuancée.

SÉQUENCE II : Les Fables de Jean de la Fontaine (1678) ET n°5

« La laitière et le pot au lait » (VII, 10)

Projet de lecture :

Ainsi « La Laitière et le pot au lait » évoque l’illusion et le désir de pouvoir, comme la fable qui la précède,

« Le Coche et la Mouche », et celle qui la suit, « Le Curé et le Mort », fable avec laquelle elle constitue une

sorte de doublet -et qui la cite au dernier vers- et qui propose un traitement plus noir et négatif du même motif.

I. La comédie humaine : un plaisant récit champêtre (v.1 à 29)

1 –V. 1 à 6: Situation initiale: Perrette va joyeusement au marché vendre son lait. Dans un

contexte rustique, La Fontaine met en scène un personnage humain en pleine action de façon

plaisante.

• Contexte: L’intrigue se déroule dans un univers rustique lié au monde paysan comme le montre

le v.1 avec le «pot au lait» (expression plus « rurale » que « pot de lait ») sur la «tête» du personnage

unique qui n’est autre que la «laitière» identifiée dès le titre.

• Personnage: C’est une jeune femme, «Perrette», appelée par son seul prénom qui connote la

paysanne, d’autant plus qu’elle se rend «à la ville» (v.3), à pied («à grands pas» (v.4)). La Fontaine fait

avec réalisme son portrait

- physique, à travers des indications vestimentaires (v.4,5,6) qui présentent la Laitière comme une

jeune paysanne gracieuse.

- mais aussi moral, qui montre la vivacité et la détermination de Perrette à faire que son pot au lait

« arrive sans encombre à la ville » (v.3) : l’adverbe « Bien » et le mot « coussinet » (v.2) traduisent la

volonté de Perrette d’éviter les cahots et d’assurer sa démarche comme le montre le comparatif de

supériorité « plus agile » (v.5) et les précautions vestimentaires prise « ce jour-là ».

• Intrigue : elle est également mise en place de façon réaliste puisqu’elle s’inscrit dans la réalité

économique du monde paysan: une «laitière» qui va vendre son «lait» «à la ville». Cette histoire banale

est rendue plaisante par

• L’art du récit de La Fontaine: L’alternance des alexandrins et des octosyllabes ainsi que les

rythmes des vers 3 (3/3/3/3) ou 6 (4/4) semblent mimer la marche « légère », « agile », et assurée de

Perrette. De même, les allitérations en |t|, |p| et |l| (relire le vers 6) associent les éléments principaux

de la fable : Perrette, la «laitière» et son «pot au lait». Néanmoins, on observe d’emblée la présence

de certains termes qui laissent à penser que le dessein de Perrette peut présenter des risques : les

précautions qu’elle a pu prendre (pour son pot au lait ou dans sa tenue) ou au v.3 les compléments

que reçoit

...