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Huis Clos, scène d'exposition, Sartre

Commentaire de texte : Huis Clos, scène d'exposition, Sartre. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  24 Juin 2017  •  Commentaire de texte  •  1 456 Mots (6 Pages)  •  4 116 Vues

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Lecture analytique n°1 Huis Clos, scène d’exposition :

« -Où sont les pals ? » à « -tout recommence ! »

        Huis Clos apparaît comme la matérialisation de la philosophie sartrienne. Cette dernière par le biais du théâtre se voudra plus accessible que l’œuvre quelque peu fastidieuse L’Etre et le Néant. Elle n’en est pas moins l’exercice même de ce texte théorique. « La philosophie passe par l’image », disait Camus, Sartre l’a bien compris lui aussi, et souhaite faire prendre conscience au lecteur- spectateur de l’urgence d’agir tant que l’on peut, de l’urgence de prendre parti, de suivre une morale humaine, dénuée ici de toute religiosité.

        L’extrait proposé à l’étude ouvre le texte, et nous permet d’analyser la rupture avec les conventions. Le rideau se lève sur un salon second empire, où le garçon d’étage introduit un des trois personnages : Garcin. Le spectateur découvre ce dernier entrant en  enfer : il assiste à son installation sous le regard blasé du groom.

        Nous analyserons dans un premier temps la représentation originale de l’enfer que propose cette œuvre, pour nous pencher en deuxième lieu sur le portrait direct que nous offre Garcin, qui se définit à la fois par son discours, mais aussi par tout son être, ce que seul le théâtre peut offrir, où le corps peut trahir la parole. Enfin nous aborderons le registre particulier de Huis clos par le biais notamment de l’humour infernal.

1° AXE : Etat des lieux de l’enfer

L’enfer n’apparaît pas si insupportable à première vue : il s’agit d’un salon, offrant trois canapés et un bronze de Barbedienne. L’enfer va par conséquent se jouer en « huis clos », ce qui justifie le titre de la pièce. Enfermement physique certes, mais qui ne fait qu’annoncer un autre piège, bien pire, celui de l’esprit, condamné à rendre des comptes sur un passé révolu.

Les questions entre le groom et Garcin (à citer) mettent en scène les visions traditionnelles de l’enfer pour les nier instantanément. Cette pièce est l’art de la négation, de l’anéantissement. La souffrance physique révélée par le champ lexical de la torture : « pals, grils… » laisse place à une autre sorte de souffrance, pressentie par Garcin. P86

        L’enfer semble avant tout se définir ici comme une absence. Absence de sens, absence de pragmatisme, absence d’utilité…En effet, la brosse à dents n’a pas lieu d’être, ni tout ce qui sert aux vivants (à citer). Les objets sont donc traités sur le mode de l’absence, or, l’état de manque caractérise l’état de mort. Absence de miroir aussi, ce qui suggère l’importance du regard, que l’on se porte, que l’on a l’opportunité de se porter «  pas de glaces, pas de fenêtres, naturellement ». Double prison : enfermement physique, enfermement dans le regard de l’autre qui nous voit alors que nous ne maîtrisons plus du tout notre propre image. Les objets eux-mêmes ne tiennent pas leurs promesses : la sonnette ne sonne pas toujours, le bronze est un objet « en soi » par excellence, enfermé dans son apathie. Garcin en le voyant, réalise sa différence : sa conscience. Pierre Henri Simon écrira dans Théâtre et destin à ce propos : « Le bronze, immuable, c’est l’objet pur, l’en soi, ce que l’homme ne peut pas être puisqu’il est conscient, mais ce qu’il risque de devenir dans la conscience des autres qui l’immobilisent comme une chose ». L’enfer est annoncé par ce bronze : les personnages seront voués à passer du pour soi à l’en soi, totalement objectivé par le regard des autres. De même, l’inutilité est soulignée par l’anecdote de Garcin (à citer) lors d’une noyade, rien ne sera plus inefficace qu’un bronze ! L’action dans ce salon n’a plus d’intérêt, elle arriverait trop tard, elle n’a plus lieu d’être.

        Le châtiment infernal se veut non objectif, mais subjectif, autrement dit, il passera par la subjectivité d’un tiers qui nous rendra prisonnier de son regard ; le seul qui paradoxalement nous fera exister. Absence de sommeil aussi : condamnation éternelle au regard et à la présence de l’autre. Aussi la notion de mort apparaît-elle paradoxale : il s’agit d’une vie sans coupure : « il faut se frotter les yeux, se lever, et tout recommencer ».

        Le « pour soi » sartrien s’éteint dans cet enfer, pour glisser au « pour autrui », voire à l’ « en soi ».

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