Essai sur le Rapport de Brodeck
Commentaire d'oeuvre : Essai sur le Rapport de Brodeck. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar pautsch • 3 Décembre 2017 • Commentaire d'oeuvre • 1 308 Mots (6 Pages) • 1 144 Vues
« Il y a davantage de loups que d’agneaux »p.59. Cette affirmation du personnage principal de Brodeck dans Le rapport de Brodeck écrit par Philippe Claudel exprime le fait que beaucoup d’hommes sont rendus coupables et ne peuvent plus être considérés comme des proies mais seulement comme des prédateurs.
Par cette métaphore, P. Claudel décrit le ressenti de Brodeck sur les différents personnages qu’il rencontre au cours de sa vie. Il ne peut plus considérer beaucoup de gens comme des « agneaux », c’est-à-dire des personnes innocentes, car chacun s’est rendu coupable d’actions plus ou moins graves. Il utilise la métaphore du loup et de l’agneau car elle permet de voir les hommes comme des prédateurs et des proies. Il existe des types différents de loups, par exemple ceux qui chassent en meute, cette idée évoque la pression de groupe qui peut exister chez l’homme et qui touche certains villageois. Les villageois touchés par cette pression de groupe montrent une capacité à s’adapter et à se transformer, ils deviennent des loups par lâcheté et par peur de se faire « manger » eux-mêmes. Les personnages qui entrent dans cette catégorie sont par exemple Diodème, qui était l’ami de Brodeck et qui l’a trahi pour se sauver lui-même, ou alors Limmat, qui bien qu’il ait été un agneau et même une figure paternelle pour Brodeck quand il était enfant, participe à la scène de son jugement. Chez d’autres villageois on retrouve moins cette idée de trahison, mais tout de même le fait qu’ils soient manipulés, comme Schloss, Beckenfür ou encore Haushorn. Le maire Oschwir peut être considéré comme le loup qui dirige la meute, qui manipule ses villageois et qui en plus de se rendre coupable du meurtre de l’Anderer a rendu tout le reste des villageois qui le suivent aussi coupable qui lui. Il n’a aucun scrupule et se positionne dans une réelle position de supériorité. Par rapport à ces personnages Brodeck se sent comme une proie et il a peur pour sa vie. Certains personnages du roman, également considères comme des loups, sont purement cruels comme par exemple Göbbler qui écrase un escargot sans défense sans raison valable « Göbbler a levé son bâton et a l’a laissé retomber sur la petite bête qui a explosé comme une noix »p34, il menace Brodeck « Fais attention, il y a déjà eu assez de malheur… » p34. Dans cette situation le statut de proie de Brodeck et celui de prédateur de Göbbler est clairement exprimé. Göbbler est déshumanisé par sa situation de prédateur « Soudain les eux de Göbbler me firent peur. Ils n’avaient plus rien d’humain. » p253. Un autre personnage purement cruel est la Zeilenesseniss, qui prend plaisir à assister à des exécutions, comme elle prendrait plaisir à assister à une pièce de théâtre « Elle ne perdait rien des tressautements, des bruits de gorge, des pieds lancés dans le vide à la recherche du sol, des bruits goitreux des intestins qui se vidaient, de l’immobilité enfin, du grand silence » p.82, « (Elle) ne manquait jamais la pendaison du matin »p81. Elle est entièrement déshumanisée « d’une inhumaine beauté » p80, elle est comparée aux gardes du camp, qui eux-mêmes sont comparée à des corneilles « Les trois corneilles prenaient leurs places. Je ne sais pas si c’étaient les mêmes chaque jour. Elles se ressemblaient tant. Les gardiens aussi se ressemblaient tous, mais eux ne mangeaient pas les yeux, ils se contentaient de nos vies. Comme elle. » p82. La déshumanisation est effectuée ici d’une part par la comparaison avec des oiseaux et d’autre part avec le fait de ne plus donner d’identité aux gardes, de dire qu’ils sont tous les mêmes. Encore une fois l’idée de la meute de loup est à nouveau évoquée par les gardes. Par ces associations avec des prédateurs les personnages sont déshumanisés et semblent regagner leur instinct animal qui les rend dangereux. Cette idée qu’il existe différents types de loups qui sont capables de chasser pour survivre, mais aussi de chasser par pur plaisir, à cause de leur nature cruelle est décrite par une comparaison avec des renards, qui sont ici utilisés comme métaphore de l’espèce humaine « Les hommes l’ont toujours détesté, sans doutes parce qu’il leur ressemble un peu trop. Il chasse pour se nourri, mais il est aussi capable de tuer pour son seul plaisir. » p104. Ce rapprochement permet de représenter l’homme comme un prédateur pour sa propre espèce, comme l’auteur Plaute l’avait également dit « L’homme est un loup pour l’homme ». Dans le roman la comparaison des personnages avec des animaux n’est pas effectuée seulement avec des loups, les personnages sont également déshumanisés par la métaphore des porcs d’Orschwir, ou encore par Nösel qui dit « l’homme est un animal qui toujours recommence » p175. Une autre comparaison qui revient à plusieurs reprises dans le roman est la comparaison avec des renards. Les loups et les renards sont comparés, ce qui permet un premier rapprochement entre renards et hommes «Les loups et les renards, c’est un peu cousins et compagnie. Peut-être qu’il n’y a pas que les hommes qui pensent trop. » p120. Durant tout le roman (surtout le temps de la guerre) les personnages considérés comme des loups essaient de déshumaniser ceux qu’ils considèrent comme des « pourritures » p278 ou des « étrangers » p278. Au camp, Brodeck est déshumanisé par les gardes qui le font vivre comme un chien. Il se fait appeler « chien Brodeck », « Alors je me mis à aboyer (…) »p140 et à l’entrée du camp un panneau accroché autour du coup d’un pendu dit « Ich bin nichts », je ne suis rien p190. Bien que Brodeck considère que les loups ont pris le dessus « des agneaux, il n’y en a pas beaucoup ici, je veux dire parmi nous… » p130, il existe encore des agneaux, des personnages qui gardent leur innocence et ne changent pas de camp, comme par exemple Fédorine ou encore Emélia. Ces personnages n’agissent que par bienveillance et par altruisme, et non par intérêt. Ils soutiennent Brodeck et sont son point de repère. Quand Brodeck était au camp seul la pensée d’Emélia et de Fédorine l’aidait à survivre « Par contre, la pensée de la mort me devenait insupportable quand je l’associais à Emélia, et à Fédorine. » p190. C’est aussi Emélia qui incite Brodeck à finalement quitter le village à la fin du roman, celui-ci se sent de plus en plus oppressé par le nombre croissant de loups dans le village et ne veut pas se faire dévorer par ces prédateurs. Certains personnages sont considérés comme des agneaux surtout à cause du fait qu’ils se fassent «sacrifier », comme Brodeck et Fripmann, que le village dénonce aux Fratergekeime pour se protéger, ou alors un personnages est considéré comme une proie à cause de son statut de victime des loups, comme l’Anderer qui finit par se faire « dévorer ». Cette idée du sacrifice d’un agneau offre une image biblique, qui permet d’associer les agneaux au « christ innocent et pur », cette association offre un encore plus grand contraste entre les loups qui sont mauvais et cruels et les agneaux qui sont innocents et purs.
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