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Cendrillon, Giambattista Basile

Commentaire d'oeuvre : Cendrillon, Giambattista Basile. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  10 Février 2019  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 547 Mots (7 Pages)  •  1 084 Vues

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        Giambattista Basile, un auteur napolitain, a fixé les contes populaires de la tradition orale dans un recueil : sa version plus brutale a été épurée par Perrault, auteur classique, qui, selon sa préface, destinait ses contes aux enfants (fin XVII siècle).

        Dans la querelle des Modernes contre les Anciens, Perrault affirme la valeur des contes populaires, s'opposant aux Anciens qui s’inspirent de textes de l’Antiquité.

« Cendrillon » 

        Le surnom de l’héroïne fait référence aux cendres du foyer de la cheminée.

Symbolique de ce sobriquet :

        Cendrillon est ainsi nommée par ses sœurs. Chez Perrault, Javotte, cruelle, la baptise «Cucendron», mais la cadette adoucit le sobriquet par les sonorités moins rudes de «Cendrillon».

        La position de la jeune fille dans les cendres ne dit pas que sa saleté, mais aussi, sans doute, le deuil de la mère, dont l’auteur-metteur en scène Joël Pommerat fait la clé du conte dans son adaptation. La pièce de Joël Pommerat a pour titre titre «Cendrillon», bien que l’héroïne s’appelle «Sandra» mais les sonorités renvoient de la même manière au mot « cendres », comme dans le conte ; d’ailleurs, dans la pièce, la méchante sœur surnomme Sandra «cendrier» parce qu’elle sent le tabac à cause de son père qui fume en présence de sa fille, en cachette de sa femme.

        Cette position en fait également la gardienne du foyer, et la rapproche aussi du Phoenix. Comme l’oiseau mythique, elle pourra renaître de ses cendres et surmonter deuil, malheur et brimades. Comme Peau d’Âne, l’héroïne cache sa beauté sous la crasse avant de resplendir. Comme la Belle au bois dormant, elle attend d’être tirée de cette mort symbolique par l’amour, qui la réveillera et la ramènera vers la vie.

        Dans ce conte, Perrault multiplie les manifestations du merveilleux. Ce qui est magique conserve cependant un semblant de rationalité et le conteur associe constamment le merveilleux à l’humour. Les éléments merveilleux du conte coïncident avec l’apparition de la fée marraine, qui, à l’aide de sa baguette magique, permet à Cendrillon de se rendre au bal: le carrosse doré est fait à partir d’une belle citrouille creusée; les souris deviennent des chevaux d’un «gris de souris pommelé»; un rat «à la maîtresse barbe» est transformé en cocher doté des «plus belles moustaches qu’on ait jamais vues»; et des lézards sont changés en laquais, s’agrippant au carrosse «comme s’ils n’eussent fait autre chose toute leur vie». On voit donc que le merveilleux garde une cohérence logique et conserve certains aspects de la réalité. On peut noter, par ailleurs, que ce sont des animaux qui deviennent des hommes. Quant au merveilleux de la pantoufle de verre, sa symbolique est claire: il est un matériau rare et cher au XVIIe siècle, et il signale la transparence, la sincérité. Seul le pied menu de l’héroïne peut se glisser dans la pantoufle sans risquer de la briser, et toute tentative de fraude est rendue impossible, comme celle des sœurs de Cendrillon qui vont jusqu’à se mutiler dans la version des frères Grimm (1812). Notons qu’au XIXe siècle, un débat s’élève pour savoir si les pantoufles de Cendrillon sont de verre ou de vair, c’est-à-dire de fourrure d’écureuil. Évidemment, le verre constitue un matériau qui paraît inadapté à la marche. Cependant, le XIXe siècle était sans doute trop rationnel à vouloir ainsi refuser le merveilleux: le verre invite à une riche symbolique interprétative, contrairement au vair. Comme l’écrit  Anatole France en 1885 dans Le Livre de mon ami: «Ces pantoufles étaient fées; on vous l’a dit, et cela seul lève toute difficulté».

        Cendrillon est l’un des contes les plus populaires; il a d’ailleurs inspiré de nombreuses réécritures. Cendrillon est un conte fondateur et particulièrement représentatif du genre: on y trouve ainsi la détresse d’une l’héroïne sauvée par une fée protectrice; l’intervention merveilleuse d’une fée, qui fait disparaître un quotidien morose et génère les espoirs les plus fous; la morale consensuelle selon laquelle la bonté est récompensée et amène en retour le pardon; la rencontre d’un prince charmant au bal, topos qui sera constamment repris et retravaillé par des siècles de littérature; la reconnaissance d’un couple unique par le biais d’un objet magique… Tous ces aspects concourent à faire de ce conte un réservoir de variations et de réflexions.

        Joël Pommerat est probablement le plus marquant, parce qu’il réussit à donner une interprétation très personnelle du conte. Pour lui, l’origine de l’histoire de Cendrillon se trouve dans l’impossibilité du deuil de la toute jeune fille: écrivant, comme Charles Perrault, pour tous les âges, il s’est surtout intéressé à l’idée de parler avec sérieux et sans détour de la mort aux enfants.

On comprend que si Sandra accepte les pires corvées, allant jusqu’à réclamer ce qui suscite le plus de dégoût, c’est pour se punir de ne pas penser suffisamment à sa mère: «je crois que je vais bien aimer ça, de nettoyer le gras de la cuisinière […] Ça va me faire du bien de faire ça […] C’est vraiment dégoûtant» (l. 64-68). L’apparent paradoxe dit le sentiment de culpabilité de la toute jeune fille qui se sent responsable d’avoir oublié de penser quelques instants à sa mère.

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