Acide sulfurique, Amélie Notnomb, Incipit

Acide sulfurique, A. Nothomb (2005)

Lecture analytique texte 1 : incipit

Introduction :

Amélie Nothomb a fait une entrée fracassante en littérature en 1992 à l’âge de vingt-quatre ans avec son premier roman, Hygiène de l’assassin. Depuis elle publie un livre par an mais elle écrit aussi pour elle et avoue conserver une trentaine de manuscrits qu’elle ne publiera jamais. Acide sulfurique est paru en 2005 et a suscité une polémique en raison de son sujet, puisqu’elle réunit dans une fiction la téléréalité, le pire de la télévision selon elle et le pire de ce qu’a connu l’histoire, la shoah.

Dans cet extrait, l’incipit du roman, nous découvrons le concept de l’émission ainsi que les personnages principaux. Comment l’intrigue se met-telle en place ? Quels sont les principes de ce nouveau jeu ?

Tout d’abord, nous verrons quelles informations nous révèle cet incipit avant d’analyser les particularités de cette émission.

I. Un incipit de roman

1. Un univers concentrationnaire

L’action se passe à Paris au « Jardin des plantes »

Champ lexical de la déportation (voir texte)

Références précises à la seconde guerre mondiale (texte)

Incompréhension de ce qui est en train de se passer : anonymat des acteurs et des actions comme le montrent les tournures impersonnelles « on emportait tout le monde » ; « les gens ne savaient pas encore … » ; « on les entassa … », « on les débarqua … » = tournures déshumanisantes

Caractère arbitraire de ce qui est décidé : « aucune qualification n’était nécessaire pour être arrêté » ; « rafles … n’importe où, sans dérogation possible » ; « vinrent et passèrent au peigne fin » + « être humain était le seul critère ».

Aucune échappatoire, « leur révolte ne servirait à rien »

Cet univers nous renvoie donc a un passé historique abominable, le registre est dramatique en raison de l’action terrible qui se met en place. Nous allons voir qu’au milieu de la foule quelques acteurs du récit apparaissent.

2. Les deux protagonistes, des personnages opposés

Pannonique :jnomjétrange,joriginalj(Pannonique, rarement employé en français, désignejlajPlainejdejPannonie à l’est de l'Europe vers le Danube. Il fait également penser au terme cinématographique « panoramique : mouvement de caméra (= cf contexte de l’histoire).

Zdena est un prénom traditionnel féminin tchèque, diminutif de Zdenka. Il a une connotation guerrière avec ses deux consonnes très dures.

Pannonique : jeune femme qui se promène lorsqu’elle est prise dans une rafle au « Jardin des Plantes ». C’est une victime (l. 10) ; esprit vif, observateur : « elle vit qu’on les filmait » ; « elle comprit alors que leur révolte ne servirait à rien mais serait télégénique » = elle perçoit immédiatement les enjeux dans ce qui se passe ; elle va entrer en résistance : « elle resta donc de marbre » = la conjonction donc montre qu’elle adopte une attitude en conséquence de ce qu’elle observe. Pannonique est du côté du Bien, une allégorie du Bien.

Zdena : son portrait est peu élogieux. On sait que comme d’autres elle a été choisie pour « son visage significatif » = euphémisme = grossier, laid, disgracieux. Puis on évoque sa réussite à un examen mais pour la dévaloriser, elle n’en a jamais réussi un seul (L. 32-33), on comprend qu’elle est peu éduquée. L’adverbe « jamais » montre aussi qu’elle n’a connu que des échecs. D’où sa fierté, c’est une revanche (L. 34-35). Implicitement on sait qu’elle a connu beaucoup d’humiliations : « son entourage allait enfin cesser de se moquer d’elle », d’où sa sauvagerie à venir, comme une vengeance. Après le physique, le psychologique, on découvre ses « qualités » morales et physiques. Elle n’a aucun problème avec le concept immoral de l’émission. A la question « si cela la choquait », elle répond que « Non. C’est fort ». Elle n’a pas de morale, de notion du bien et du mal. Quant à ses « exploits », ils relèvent de sa

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