Les ingénus de Verlaine
Commentaire d'oeuvre : Les ingénus de Verlaine. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar talel • 20 Décembre 2018 • Commentaire d'oeuvre • 1 108 Mots (5 Pages) • 1 952 Vues
LES INGENUS Paul Verlaine (1844 – 1896)
Vocabulaire
Spécieux :
Se dit de ce qui n'a qu'une apparence de vérité mais est susceptible de tromper. Syn : fallacieux.
Ingénu :
Qui agit, parle avec une innocente franchise, sans rien dissimuler de ses pensées ou de ses sentiments. Syn : candide.
Introduction
- Paul Verlaine est avant tout le peintre des clairs obscurs. L’emploi fait par Verlaine des rythmes impairs, d’assonances, de paysages en demi-teintes(En peinture et en gravure, valeur moyenne entre l'ombre et la pleine lumière.) le confirme bien. Verlaine est le poète de l’ambigüité, du vaporeux. Le « prince des poètes » écrit par touches impressionnistes c’est le poète du tremblement. Comme « le rideau de ma voisine », de Musset qui se déclare inspiré de Goethe, Les ingénus appartient à l’univers pictural de Watteau. Les fêtes galantes ont d’abord été publiées en journaux puis publiées à compte d’auteur. Les personnages sont empruntés à la comédie italienne. Verlaine n’écrit pas ce que Watteau peint. Les paysages évoqués correspondent à un état d’âme, à une rêverie. Il s’agit d’un texte singulier ou les éléments naturels s’associent à la sensualité pour donner l’idée d’un paysage intérieur.
- I) Un paysage intérieur
Il s’agit d’un texte singulier ou les éléments du cadre naturel sont peu précis : « le terrain » « le vent » « l’insecte » ; les personnages sont désignés anonymement « nous » « les belles » et dans un temps qui est lui aussi indéterminé : « le soir » impression globale d’imprécision « les ingénus » jeunes gens candides, qui font on ne sait pas ou ni quand l’expérience de l’ambigüité du sentiment amoureux. La présence des imparfaits à valeur durative( L'imparfait duratif pour des actions qui durent : Elle demeurait rue de la Pépinière depuis trois ans. ) nous embarque seulement dans une sorte de promenade amoureuse. Mais les adverbes « parfois » « alors » « depuis » ponctuent une chronologie qui donne aussi au tableau la valeur de récit. Il y a donc une sorte d’opposition entre description et narration le poème est
(Diviser (un texte) au moyen de la ponctuation) développé sur une structure thématique : car les quatrains 1 et 2 constituent une unité qui se rompt à la 3ème strophe. Cette rêverie est donc troublée d’une manière presque imperceptible ce qui peut laisser le lecteur dans une certaine perplexité.
- II) La sensualité
- Elle est au contraire identifiable du v1 à 8 ; l’évocation se construit à partir de sensations visuelles « luisaient » « clairs » « blanches » les rimes féminines s’expriment à travers le champ lexical du corps « longue jupe » le corps est esthétisé par le vêtement « haut tallons » « longue jupe » « col des belles » le corps est entrevu et désiré « nous aimions ce jeu de dupes ». La synecdoque(Figure de rhétorique qui consiste à prendre le plus pour le moins, la partie pour le tout (ex. une voile pour un navire), le singulier pour le pluriel (ex. l'ennemi pour les ennemis)… ou inversement.) systématique nous indique qu’il n’y a de tentations charnelles(Qui a trait aux choses du corps, de la chair (opposé à spirituel) que du corps partiel « jambes » « nuques » ou que le corps est occulté(Cacher ou rendre peu visible (une source lumineuse) : le désir des ingénus ne se nourrit donc que de la promesse du fugace(Qui disparaît vite, dure très peu) « interceptés » « éclairs soudains » mais ici le désir des ingénus ne nait pas du manque ou de la frustration puisqu’il reste un plaisir « nous aimions ce jeu » et une plénitude(Ampleur, épanouissement) « ce regard nous comblait » : tout passe par le regard « nos jeunes yeux de fous » en dehors de toute sexualité. Les jeunes filles étant presque intouchables.
- III) La rupture thématique
Un changement de registre va faire basculer le poème de la gaité à la mélancolie. De ce passage entre deux états d’âme, il n’y a pas d’antithèse (Opposition de deux pensées, de deux expressions que l'on rapproche dans le discours pour en faire mieux ressortir le contraste.) mais une série de glissements subtils(Qui a de la finesse, qui est habile à percevoir des nuances ou à trouver des moyens ingénieux synonyme :adroit.) Le thème de la lumière est succédé par celui de l’obscurité qui semble par la répétition dans le même vers du mot « soin » gagner progressivement le tableau. La fêlure (fissure) s’installe avec l’adjectif « équivoque » qui connote l’ambigüité. Le corps presque irréel se substitue au corps palpable (Dont on peut s'assurer par le toucher) des jeunes gens « se pendant rêveuses à nos bras ». La rupture temporelle qu’introduit le passé simple à l’initiale du v11 souligne l’initiative des jeunes filles. L’idylle (Petit poème à sujet pastoral et amoureux) passe du plan sentimental au plan d’un désir plus réel, plus concret. Les notations visuelles se font auditives : « dire alors des mots » la rupture temporelle est encore crée par le passage du passé au présent « tremble » « s’étonne ». Mais l’aspect duratif de ces verbes « depuis ce temps » nous laisse une imprécision d’indécision :est-ce un souvenir personnel ? Car le poète n’utilise pas le jeu confidentiel mais un pronom collectif « nous » la scène sensuelle passe donc du coté de l’intériorisation (Fait d'intérioriser ; aptitude mentale à s'isoler du monde extérieur). Qu’est ce qui fut dit pour que ces jeunes gens soient si troublés ? Tout est suggestion, tremblement, flou. Comment expliquer en effet cette progression du désir qui comble à a ce sentiment indéfinissable d’une âme qui s’étonne ? Il y a donc une sorte de dissonance (Réunion de sons dont la simultanéité ou la succession est désagréable.) sentimentale qui fait que les êtres comblés semblent reculer devant le bonheur. Cette dissonance ne prend pas la forme violente d’une opposition radicale, au contraire c’est par un glissement furtif et quelque chose de presque imperceptible (Qu'il est impossible de percevoir par les seuls organes des sens) que s’opère la discordance (Défaut d'accord, d'harmonie.). La transposition (Déplacement ou interversion dans l'ordre des éléments de la langue) musicale d’un système léger (allitérations en « l » qui reproduisent les penchements du rêve) en une déchirure « dire des mots si spécieux » nous donne la dimension de ce changement. Enfin la tonalité du dernier quatrain rend compte du parti pris d’ambigüité de Verlaine, l’indécision du langage est au service de la confusion des sentiments.+
...