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Le cheval rouge, de Jacques Prévert

Commentaire de texte : Le cheval rouge, de Jacques Prévert. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  18 Avril 2022  •  Commentaire de texte  •  1 271 Mots (6 Pages)  •  2 559 Vues

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Le cheval rouge

Dans les manèges du mensonge

Le cheval rouge de ton sourire

Tourne

Et je suis là, debout, planté

Avec le triste fouet de la réalité

Et je n’ai rien à dire

Ton sourire est aussi vrai

Que mes quatre vérités

Jacques Prévert

Nous constatons de prime abord, sans même l’avoir lu, que toute ponctuation (ou presque) a disparu de ce poème, assez court au demeurant : cela lui donne une certaine unité, comme s’il ne s’agissait que d’une strophe, que d’une phrase. En outre, si le rythme et la musique des mots y semblent essentiels (ainsi, le troisième vers n’est constitué que d’un seul mot), les règles de la versification classique (mètre, rimes, etc.) ont disparu : cette plus grande liberté doit avoir sa raison, ou du moins son effet.

Déjà le titre étonne : où trouver un « cheval rouge », si ce n’est dans la fiction (contes, mythes, légendes) ? L’article défini, pourtant, laisse à penser que l’auteur le connaît, qu’il existe pour lui, et de façon unique.

Les premiers mots du texte, installant une circonstance spatiale, confirment le champ lexical équestre (« Dans les manèges ») ; mais ce début de cohérence est aussitôt malmené : « du mensonge », en effet, n’invite pas à lire « manèges » dans son sens équestre, mais comme des manigances, sens que le pluriel (« manèges ») conforte et qu’une possible métonymie (mensonge pour menteur) rendrait plus vraisemblable encore.

Un groupe sujet constitue le vers 2 tout entier. Au centre de celui-ci, ce sont les mots du titre qui réapparaissent. Outre l’effet d’insistance et de confirmation, ces mots-là prennent à nouveau le lecteur à contre-pied, en imposant du mot « manèges » une lecture équestre. Cet attelage, figure de style de la polysémie, est déroutant, et sans doute à la fois très riche. Comme dans le vers 1, ce centre est complété par un autre groupe nominal : « de ton sourire ». Ce sourire est celui d’un « tu », qu’il représente métonymiquement : le texte devient tête-à-tête, aparté (le tutoiement indique une familiarité) entre un « je » qui s’exprime et un « tu », - ce « tu » que, métaphoriquement, le « cheval rouge » incarne. Au-delà du lien grammatical, en effet, l’hypallage qui permet de garder associés les mots du titre, donc de ménager les effets de la répétition (cfr supra), invite à comprendre que le sourire est rouge : symbole de bonheur, de plaisir, celui-ci devient séduction, suggérant tous les atouts, tous les attraits de la féminité. Soulignons encore que le parallélisme de construction des vers 1 et 2, que la présence, ici et là, d’une métonymie dans le complément, que la cohérence dans laquelle s’inscrivent les centres des groupes nominaux (« manèges » et « cheval ») autorisent à associer le « tu », l’interlocutrice, au menteur, et donc à y voir, plutôt, une menteuse.

Attendu (le vers 2 n’était qu’un groupe sujet), le vers 3 surprend par sa brièveté : un mot, une syllabe. Seule sa forme étonne cependant, car son sens s’accorde avec ce qui précède, dans sa polysémie : qu’un cheval tourne dans un manège ne décontenancera personne ; et les circonvolutions appartiennent quasiment au cliché du mensonge.

Le début du vers 4 laisse à penser qu’une nouvelle phrase commence, invitant à reconsidérer les trois premiers vers dans leur unité sémantique et syntaxique, et à mieux prendre la mesure du vers 3, dont la brièveté, sans doute, annonçait ce changement. Y apparaît un « je », première trace tangible de l’émetteur, qu’une accumulation d’attributs (là, debout, planté), par une sorte de crescendo dans l’immobilisme,

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