De Succo à Zucco : du fait divers au théâtre
Fiche de lecture : De Succo à Zucco : du fait divers au théâtre. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar yassine1093 • 25 Novembre 2018 • Fiche de lecture • 896 Mots (4 Pages) • 750 Vues
De Succo à Zucco : du fait divers au théâtre :
Introduction :
Qu’est-ce qu’est le fait divers ? D’après le critique Roland Barthes, le fait divers est défini comme étant l’intrusion du prodigieux et de l’inexplicable dans le quotidien. L’histoire de Roberto Succo ne déroge pas à cette définition, puisque qu’il tue sans motif et ses actes échappent à toute rationalité. Ce sont précisément cette histoire et cette personnalité monstrueuses qui vont fasciner Koltès et le pousser à écrire cette pièce. Ce qui l’intéressait lui, ce n’est pas la réalité des faits et la reconstitution rigoureuse des meurtres commis par Succo mais plutôt la légende qui s’attache au personnage. « Je ne savais pas grand-chose de cet homme, j’avais quatre articles de journaux. Je n’ai pas fait de recherches. Pour moi c’est un mythe et cela doit rester un mythe. »
1/À la croisée d’autre mythe :
Cependant, Koltès n’invente pas une histoire différente. En métamorphosant les épisodes majeurs du fait divers, il en souligne le caractère prodigieux. L’évasion, l’assassinat de la mère, le viol de la Gamine, le meurtre de l’inspecteur on encore la trahison de la Gamine sont autant d’épisodes du fait divers, mais la façon dont Koltès les évoque leur confère une dimension surnaturelle (tirade du tableau IV, ou la pute affolée qualifie Zucco de « démon », p.31). L’intrigue de Roberto Zucco est détachée de tout réalisme. Elle s’inscrit dans la tradition des grands mythes dont elle reprend la logique fabuleuse. Koltès fait de Zucco le double et la version contemporaine des grands héros mythiques. Ainsi, comme le héros biblique Samson perdu par Dalila, Zucco est trahi par la Gamine. Zucco participe également de la figure du Minotaure dans sa puissance de « bête sauvage » (p.12) et dans son rôle de gardien de labyrinthe (« Métro », p.39). Sa force fragilisée (p.61) l’apparente aussi à Goliath ou encore au Colosse de Rhodes (p.45, il cite les vers du poème éponyme de Victor Hugo). Pour qu’ils puissent être identifiés comme mythiques. Koltès met en place un système et un traitement particuliers des personnages.
2/ Le traitement mythique des personnages :
De la Gamine à la Pute en passant par la patronne ou encore le Grand Frère, aucun des personnages qui entourent Zucco n’est doté d’un nom ou d’un prénom : « Moi je n’ai plus de nom », dit la Gamine (p.24). Ils sont désignés par le lien filial (la mère de Zucco et les membres de la famille de la Gamine) ou par leur fonction (l’inspecteur, les gardiens, la patronne, etc.). Cet anonymat sort l’histoire du cadre particulier du fait divers et l’installe dans un cadre général. Chaque personnage devient le symbole et le représentant d’une catégorie de l’humanité. Ce traitement aboutit à faire des personnages, une sorte d’essences émotionnelles chargées de transmettre la constante de la condition humaine à travers les âges. Pour Koltès, l’histoire de Roberto Zucco revêt une portée symbolique qui, au-delà des simples faits, s’avère révélatrice d’une facette de l’humanité. C’est pourquoi, au milieu des divers échantillons de la société représentés dans la pièce, Roberto Zucco est le seul personnage à avoir un nom et un prénom. Ces derniers donnent à son parcours une valeur exemplaire et le font accéder au statut de figure mythique. De même que Samson représente la force trahie, le Minotaure la monstruosité ou Rimbaud la fuite et la révolte, Roberto Zucco symbolise une particularité propre à l’homme contemporain : l’irresponsabilité.
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