Corpus sur le lyrisme
Commentaire de texte : Corpus sur le lyrisme. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Lucile Legrat • 19 Mai 2019 • Commentaire de texte • 1 476 Mots (6 Pages) • 516 Vues
COMMENTAIRE – Lecture analytique
C’est en 1949que Robert Merle publie son premier roman Week-end à Zuydcoote inspiré de son expérience personnelle et de la seconde guerre mondiale durant laquelle il est fait prisonnier sur les plages de Dunkerque. C’est également cette période marquante de l’histoire qui l’inspire pour son deuxième roman La Mort est mon métier publié en 1952. Ce roman est une autobiographie fictive de Rudolf Hoess que Robert Merle nomme Rudolf Lang, le tristement célèbre commandant d’Auschwitz, de son enfance à son exécution en 1947. Rudolf Lang grandit dans une famille bourgeoise austère et catholique, sous l’autorité d’un père glaçant, et il fait le choix très tôt de s’engager dans l’armée. Après sa démobilisation et ses faits d’arme héroïques durant la guerre de 1914-1918, il est désespéré, sans argent et se met alors aux services du groupe nazi des Sections d’Assaut. Condamné à une peine de dix ans après avoir exécuté sur ordre un traître aux S.A., Rudolf est convoqué, parce qu’il a refusé l’aide de son tuteur pour être libéré plus tôt, par le directeur de la prison où il purge sa peine. Nous nous demanderons comment la scène entre le directeur de la prison et Rudolf Lang révèle la personnalité du bourreau d’Auschwitz. Nous analyserons tout d’abord en quoi cet entretien ressemble à une scène de comédie et ensuite comment le directeur de la prison perce à jour la vraie personnalité du héros de ce roman.
Cet entretien entre le directeur de la prison et Rudolf Lang pourrait s’apparenter à une scène de comédie.
Tout d’abord l’extrait du roman de Robert Merle présente toutes les caractéristiques d’une scène de théâtre. Ce texte est en effet en majeure partie un dialogue. Ainsi les paroles rapportées au discours direct s’assimilent à des répliques de théâtre courtes et rapides, comme des stichomythies. L’extrait est également rythmé par des précisions sur les mouvements du directeur indiqués entre parenthèses : « (coup de règle sur le bureau) » (l.15) ou dans des phrases verbales « qui frappait un objet mou avec sa règle » (l.3-4). Ces indications remplissent le rôle des didascalies dans un texte dramatique. Le décor de la pièce est lui aussi représenté par différents objets « fenêtres » (l.31), « rayonnage de livres » (l.42), « table » (l.84), « fauteuil » (l.155)laissant imaginer précisément le lieu : le bureau du directeur. Enfin la dernière phrase de l'extrait : « on sortit presque en courant » représente la sortie de scène des personnages ou la fin de la pièce. Ainsi ce passage a bien les aspects d'une scène de théâtre et d’une scène comique.
C’est le directeur, avec sa gestuelle, ses mimiques et ses cris qui assureessentiellement le comique de la scène. Ainsi le comique de geste est la principale source de comique, avec la répétition des coups de règle (l.15-16-18-24-31) et l’indication de ses mimiques à trois reprises : « grimaces » (l.10-40-91). Ses déplacements incessants renforcent ce comique, avec la reprise du verbe « sautiller » (l.25-94-162) ou le nom « sautillement » (l.40-70). On imagine un personnage bougeant sans cesse, il est d'ailleurs comparé à un singe : « vivacité d'un singe » (l.166-167). Le complément circonstanciel de manière : « à toute vitesse » (l.94) complète ce portrait d'un personnage hyperactif qui prête donc à rire. Au comique de geste s’ajoute un comique de mots avec la répétition des exclamatives : « Ah ! Ah ! » (l.24-51-82) ou la répétition de : « intéressant » (l.53-59). Il faut également noter également la présence d'indications concernant sa voix : « très aigus » (l.51), « en criant fort » (l.52), « d'un ton aigu et triomphant » (l.136) et « il cria d'une voix aigüe » (l.168). La tonalité aigüe rompt avec l’image posée d’un homme dans sa position et vient accentuer l’image d’excitation qui se dégage du personnage. Sa nervosité, ses changements d’humeur imprévisibles, du sourire à l’air furieux: « et tout d’un coup » (L.52), « subitement » (l.167), « sans transition » (l.175) sont la marque d’un comique de caractère, dernière source de comique dans cet extrait.
Le directeur assure ainsi dans cette scène de roman qui prend des allures de scène de théâtre, la présence d’un registre comique. Mais pour être drôle le directeur n’en est pas moins efficace car il va, grâce à son questionnement mettre à jour de la vraie personnalité de Rudolf Lang.
Il va ainsi s’appuyer sur plusieurs stratégies argumentatives pour obtenir les réponses qu’il souhaite et pousser Lang à se dévoiler. Il va d’abord s’appuyer sur la raison et poser une série de questions pour pousser le prisonnier à parler, quelques rares questions ouvertes : « pourquoi ? » (l.21, 109,131) et des questions fermées : « Vous n’avez pas répondu à sa lettre ? » (l.11-12)afin de déterminer avec précision la personnalité de Lang. Mais le directeur n’hésite pas non plus à jouer de la persuasion en essayant d’établir une complicité avec son prisonnier, quand, par exemple, il prend sa défense et « jette un regard furieux » (l.92) au gardien qui somme Lang de répondre aux questions ou encore lorsqu’il se montre méprisant à l’égard du chantage exercé par Vogel sur Lang. Le questionnement du directeur montreaussi sa fascination pour le prisonnier. La dénomination « cas » (l.159) prouve qu’il s’intéresse particulièrement à l’histoire de Rudolf Lang. La phrase déclarative : « Vous êtes un homme dangereux » (l.139)contraste avec la phrase qui suit : « Parce que vous êtes honnête » (l.145). Le rapport de cause à conséquence qui est établi est paradoxal. Le directeur est donc intrigué. La fin de l’interrogatoire est sonnée par une phrase déclarative, au présent de vérité générale qui prend la forme d’une maxime : « tous les hommes honnêtes sont dangereux ». Le directeur formule cette sentence pour mettre fin à l’interrogatoire. Le champ lexical de la satisfaction : « satisfait » (l.156),«heureux» (l.157)marque qu’il se réjouit de sa découverte. Il est déterminé, et l’exclamation appuie l’affirmation, à venir en aide au prisonnier : « Et je le ferai !» (l.169). Ainsi la stratégie du directeur a fonctionné. Il a réussi à faire parler Rudolf Lang qui le fascine.
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