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Commentaire Montaigne l'éducation des filles

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Par   •  2 Novembre 2019  •  Commentaire de texte  •  3 494 Mots (14 Pages)  •  1 915 Vues

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Guesmi                                                                                                                                                              Fayçal                                                                                                                                                                     Travail à rendre pour le : 07/05/2019

Commentaire sur l’Education des filles Selon  Montaigne

                « Toute l’éducation des femmes doit être relative aux hommes. Leur plaire, leur être utiles, se faire aimer et honorer d’eux »  (Rousseau)  telle fut la mentalité concernant l’éducation des jeunes filles jusqu’au 19ème siècle mais aussi le sujet qu’aborde Montaigne dans cet extrait du chapitre V intitulé « Sur les vers de Virgile » des Essais III. En effet, ce chapitre traite essentiellement de l’amour et en particulier de l’amour physique. Amour que Montaigne n’hésite pas à mettre en exergue, puisque, comme il dit si bien, « ces choses » sont « naturelles ». Et c’est dans cette optique que ce dernier écrit cet extrait sur l’éducation des filles…

               Ainsi, il serait intéressant de dévoiler comment Montaigne se démarque des autres humanistes en remettant en question l’éducation des jeunes filles.

               Pour ce faire, nous allons voir dans une première partie en quoi Montaigne fait une critique de l’éducation des jeunes filles avant de poursuivre avec en quoi Montaigne est un humaniste bien singulier.

                 Dans cet extrait, il s’agit tout d’abord pour Montaigne de nous dévoiler la vision de la société du XVIème siècle sur l’éducation des jeunes filles. Ainsi, dès le début, ceci nous est donné à lire par la phrase inaugurale du texte « Nous les dressons dès l’enfance, aux entremises de l’amour » où l’essayiste nous apprend que l’ultime but de l’éducation des jeunes filles est le mariage, ce qui est souligné par la périphrase « aux entremises de l’amour » utilisée pour désigner le mariage, mais aussi par une longue énumération crescendo « leur grâce, leur attifure, leur science, leur parole, toute leur instruction.. » qui en partant du plus superficiel au plus important renforce l’idée que l’éducation à l’époque était entièrement tournée vers la préparation au mariage. Enfin, cette idée est encore une fois réaffirmée par la phrase « Les gouvernantes ne leur impriment autre chose que le visage de l’amour » où la tournure syntaxique restrictive associée au présent d’actualisation vient montrer l’étendue de la focalisation des familles et de la société sur le mariage et l’importance que revêt cet évènement à leurs yeux. En outre, il serait intéressant de noter que dans cette même première phrase, l’utilisation de la première personne du pluriel « Nous » par Montaigne apprend aux lecteurs que ce dernier ne fait pas exception à la règle et que par conséquent il approuve le but actuel de cette éducation.

                 Tout d'abord, dans la courte introduction qu'il nous adresse dans « Au lecteur », Montaigne  dit: « C'est ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t'avertit dès l'entrée que je ne m'y suis proposé aucune fin, que domestique et privée... Je veux qu'on m'y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans étude et artifice : car c'est moi que je peins... Je suis moi-même la matière de mon livre...» : cette citation s’illustre ici parfaitement dans la mesure  où c’est en parlant d’une observation d’une expérience personnelle, celle de sa fille en train d’étudier aux cotés de sa gouvernante que Montaigne nous parle implicitement de sa vision de l’éducation des filles. Dans cette optique, l’essayiste commence alors dans un premier temps par dresser un portrait physique de sa fille : il en fait alors une description « simple, naturelle, sans étude et artifice », il l’a décrit telle qu’elle est à ses yeux et n’hésite pas à utiliser des termes à connotation dépréciatif pour la caractériser comme le groupe nominal à la ligne 5 construit autour de 3 adjectives épithètes « complexion tardive, mince et molle ». De même,  il en fait aussi le portrait moral et écrit « qu’elle commence encore qu’à se déniaiser de la naïveté de l’enfance » : ainsi, il semble voir sa fille encore comme une enfant, comme quelqu’un d’encore puéril, qui n’a pas encore la maturité nécessaire pour affronter les aléas de la vie. Ceci est davantage mis en relief par l’utilisation de la figure de la redondance dans la mesure où Montaigne en disant que sa fille «se déniaise de la naïveté »  vient renforcer chez le lecteur l’idée de la fragilité et de la jeunesse de Léonore. Ainsi, ce portrait physique et moral qui donne à voir la fille de Montaigne comme une enfant naïve et molle, semble entrer en opposition avec le fait que la société autorise certaines de ces « filles-enfants » à se marier et de facto une première critique sociétale semble se dessiner….  

                   Si au fil de notre lecture, nous en venons à remarquer plusieurs dissonances et paradoxes autour de l’éducation des jeunes filles, cela veut dire que c’est bel et bien une argumentation indirecte que nous offre ici Montaigne. En effet, ce dernier se sert d’un récit où l’argumentation est en partie implicite pour appuyer ses idées et ainsi, dès la ligne 6, ce texte prend des allures de récit, ce qui est mis en évidence par le passage du présent de l’indicatif à l’oscillation entre l’imparfait à valeur d’action secondaire et le passé simple à valeur d’action brève. Tout d’abord, Montaigne nous présente la gouvernante de sa fille et déploie autour d’elle un large champ lexical de la sévérité avec les mots « rudement »-« réprimande »-« interdiction ». Selon l’auteur, cette dernière de par son intransigeance et son inflexibilité semble avoir beaucoup d’influence sur sa fille ce qui est souligné par la longue phrase «  Mais si je me trompe, ….sa réprimande et son interdiction » (l.11-13 ) où l’essayiste compare hyperboliquement le travail de 20 hommes pendant 6 mois à la réprimande que fait la gouvernante et dans cette optique souhaite montrer l’étendue des conséquences psychologiques et mentales de la censure sur les jeunes filles lorsque celle-ci vient d’une personne qu’elles respectent et en qui elles ont confiance. Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait croire lors d’une première lecture de ce passage, Montaigne désapprouve les méthodes de la gouvernante et cela est mis en lumière dès la première fois qu’il la mentionne : en effet, en utilisant la périphrase « La femme qu’elle a pour sa conduite » pour la désigner, ce dernier parait vouloir se distancier d’elle. L’auteur semble douter du bienfondé de la censure que subit sa fille comme le donne à lire la phrase « Je la laissai faire, pour ne pas troubler leurs règles….leur quitter » (l.9-10) où il a l’air de vouloir intervenir mais que les seules raisons qui l’en empêche sont les règles de la société à son époque. En outre, nous pouvons remarquer dans la ligne 12 quand Montaigne dit « les conséquences du son de ces syllabes scélérées » de l’ironie car par définition un nom d’un arbre ne peut pas être « criminel » et ainsi le lecteur voit clairement que c’est avec beaucoup d’humour et un ton éminemment moqueur et ironique que l’auteur écrit ces mots et regarde la gouvernante et sa censure exagérée. Et donc, là où réside sa critique la plus véhémente est justement dans le paradoxe qu’il dénonce, entre d’une part, une éducation ayant pour ultime but de préparer les filles au mariage et d’autre part, la censure sévère et rude qu’elles subissent pour des  mots qui auraient plus ou moins une connotation sexuelle. En effet, dans cet extrait, à l’entente du mot « Fouteau », la gouvernante censure violemment la jeune fille car elle pensait, à tort qui plus est, que ce mot était issu du mot « foutre » qui est un mot considéré comme grossier car voulant dire posséder charnellement une personne. La gouvernante refuse donc d’apprendre quoique ce soit concernant la sexualité à la jeune fille tout en ayant pour but de la préparer « aux entremises de l’amour » : ce qui est ridicule pour l’auteur. Ainsi, après avoir compris et assimilé les intentions de Montaigne, nous pouvons voir que dès le début du texte, il critique implicitement cette éducation paradoxale et les méthodes de ces gouvernantes qui le sont tout autant ; et ce dès la troisième phrase où l’antithèse utilisée pour caractériser ces éducatrices et formée par la tournure restrictive « ne fut que » et l’adverbe « continuellement » mime déjà ce paradoxe comportemental. Au demeurant, le fait que ce raisonnement basé sur la censure parvient à «  dégouter » les jeunes filles de l’amour et du mariage comme cela est dit à la ligne 3 vient renforcer l’idée que cette censure est une mauvaise méthode et que au contraire elle vient œuvrer contre leur but. Enfin, c’est par la citation d’Horace que s’imbrique la dernière pièce du grand puzzle que constitue la critique de l’éducation des jeunes filles : en effet, par « motus …..ungui » (l.14-17)  Montaigne nous apprend que dès leur plus tendre enfance, les filles ont une inclinaison naturelle pour la sexualité et la sensualité et que par conséquent, au vu du fait que cette sexualité fait partie intégrante de ce qui est inné, alors il serait de l’inconcevable et de l’absurde de tenter de réprimer cette partie « naturelle » d’elles. En outre, Montaigne s’impose en s’appuyant sur une référence connue et respectée de tous, Horace dont les propos apparaissent comme des vérités générales.

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