Analyse linéaire savetier financier Lafontaine
Commentaire de texte : Analyse linéaire savetier financier Lafontaine. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar OHDIVL • 8 Avril 2021 • Commentaire de texte • 2 020 Mots (9 Pages) • 972 Vues
Cette seconde fable du Livre 8 est inspirée de l'épître I, 7 d'Horace (publiée en 19 ou 18 avant JC)
qui conte la manière que Philippe (grand orateur du barreau et assez âgé) a utilisé pour détourner
Vulteius Mena un crieur public , de son bonheur simple en lui versant de l'argent.Inspiré aussi de
l'esprit satirique d'Horace , La Fontaine met en scène une petite comédie, à la manière de Molière
dans l'Avare(inspirée d'ailleurs d'Horace) afin de dénoncer certains travers humains dont la cupidité.
Forme : 49 vers hétérométriques (irréguliers) en une strophe.
Plan :
vers 1 à 13 : longue exposition qui présente les caractéristiques opposées des deux voisins.
vers 14 à 33 : la démarche du financier et son stratagème perçus au travers d'une scène dialoguée.
vers 34 à 46 : Une scène décrite avec pittoresque : l'émerveillement et les angoisses du savetier.
vers 47 à 49 : Un dénouement très rapide.
I) L'exposition : la présentation des deux voisins (v .1 à 13)
Les deux hommes , forts différents, sont présentés en contraste comme l'indique la locution
adverbiale « au contraire » (v.5).
Vers 1-4 : Le savetier est caractérisé presque uniquement par l'attribut à partir duquel sera
construite toute l'anecdote : « Le savetier chantait du matin jusqu'au soir ».Par cette entrée dans
la fable « in medias res », le lecteur découvre d'emblée son caractère: le savetier chante pour
accompagner son travail dès « le point du jour » (v.8).L'imparfait duratif et d'habitude insiste sur la
plénitude ressentie par le cordonnier.
Vers 1 et vers 2-3 : Ce contentement exprimé au vers 1 et la facilité de son chant dans la reprise
lyrique aux vers 2-3 «C'était merveilles de le voir
Merveilles de l'ouïr »
soulignent le bonheur absolu de cet homme pauvre (la suite le confirmera) qui n'est pas aigri par sa
condition modeste, et il a d'autant plus de mérite qu'il a sous les yeux le luxe du financier.
Le terme « merveilles » (étymologie latine « mirabilia » = chose admirable ou qui frappe
d'étonnement) évoque l'aspect visuel et spectaculaire du comportement du savetier (théâtralité de
la scène) : on imagine volontiers les badauds (les spectateurs) « s'émerveiller » devant son échoppe.
L'évocation du plaisir des sens, la vue et l'ouïe, met en évidence la sensibilité épicurienne du
personnage. C'est un homme qui vit du plaisir de chanter en éloignant de lui toute souffrance (il ne
convoite pas les richesses de son voisin).
Vers 4 : Suggestion d'une leçon de morale (qui complète l'approche épicurienne) : le bonheur que
les « sept sages » avaient atteints,en philosophe, par la voie de la science, ce savetier l'atteint mieux
qu'eux → superlatif « plus content » par la grâce d'un tempérament optimiste.
(les sept sages : Les Sept sages (en grec ancien οἱ ἑπτά σοφοί, vers 620-550 av. J.-C.) étaient le titre
donné par la tradition grecque à sept anciens hommes politiques, législateurs ou philosophes
présocratiques de la Grèce antique. Ils étaient sept, comme les Sept Merveilles du monde ou les
Sept contre Thèbes. La liste date de -586. source:wikipédia)
Vers 5 : « Son voisin, au contraire était tout cousu d'or », l'explication de cette expression
pittoresque est différente selon les philologues : « Avoir en ornements beaucoup d'or sur ses
habits »(Littré) ; « On appelle un homme tout cousu de pistoles celui qui en a beaucoup, par
allusion à la manière des avares qui cousent leur argent dans leurs habits pour le mieux cacher et
garder » (Dictionnaire de Furetière).
Vers 6 : Ce riche n'est pas joyeux comme le savetier-> parallélisme de construction + superlatif
« chanter peu, dormait moins encor » => La Fontaine s'amuse à établir une relation logique entre sa
richesse et son impuissance à vivre heureux-> valeur causale de « étant »(v.5)+ gradation
descendante avec double négation.
Vers 7 : « C'était un homme de finance », après avoir évoqué l'absence de joie de vivre du financier,
le fabuliste précise sa condition en l'assimilant à ces manieurs d'argent que La Bruyère nous décrit
de façon sombre et antipathique (« N’envions point à une sorte de gens leurs grandes richesses ; ils
les ont à titre onéreux, et qui ne nous accommoderait point : ils ont mis leur repos, leur santé, leur
honneur et leur conscience pour les avoir ; cela est trop cher, et il n’y a rien à gagner à un tel
marché. » La Bruyère , Les Caractères, « Des biens de fortune »)
+ rupture rythmique (2 octosyllabes au lieu d'une alternance alexandrin/octosyllabe => souligne
que c'est le métier du financier et son rapport à l'argent qui va bouleverser la situation initiale.
Vers 8-9 : L'origine du débat.
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