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Lecture Analytique du texte Ils sont tombés

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Par   •  8 Mai 2019  •  Cours  •  1 272 Mots (6 Pages)  •  1 710 Vues

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Lecture analytique 7 Ils sont tombés de Charles Aznavour (1924-2018)

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Introduction [contexte et repères biographiques] Ils sont tombés a été écrit dès 1972 par Charles Aznavour (1924-2018). Chanteur, acteur et écrivain de langue française d’origine arménienne, ce dernier s’était rendu pour la première fois en Arménie en 1963. Le peuple caucasien, heureux de cette visite, avait néanmoins été déçu car l’artiste avait désavoué alors ses origines. Pour se dédouaner, il compose le texte d’Ils sont tombés figurant sur plusieurs albums et également récité par Robert Hossein. [brefs mots sur le texte] Le poème a pour objet le génocide arménien, ses nombreuses pertes humaines et le manque d’intérêt de la communauté internationale. [Problématique] Il sera donc intéressant d’étudier en quoi la chanson, plus encore qu’un hommage, est la voix des sans-voix c’est-à-dire les victimes du génocide arménien. [Annonce du plan] Dans un premier temps, nous travaillerons la description du génocide dans ce texte et, dans un second temps nous verrons en quoi ce texte constitue un hommage personnel au peuple arménien.

  1. La description du génocide

  1. Un génocide évoqué sans fard
  • De nombreuses allitérations émaillent le texte notamment celle en f (« terrassés par le froid, la faim, le fer, le feu »). Cette sonorité, sifflante, permet de dénoncer la violence de l’arsenal utilisé pour réduire le peuple arménien à néant. De même, la sifflante dans « croupissait dans son sang » insiste sur la violence de la disparition du peuple tué. On note aussi une allitération avec la palatale v (« ils ne voulaient que vivre ») insistant sur l’injustice et l’absurdité du massacre.
  • L’anaphore Ils sont tombés est aussi un choix du poète qui permet de parler encore et encore d’un massacre caché, renié par les hommes et l’histoire. Il est aussi intéressant de remarquer le temps dans la phrase ils sont tombés (passé composé) et son aspect accompli mettant en lumière les résultats d’une action passée se prolongeant dans le présent. La chute du peuple arménien est donc toujours en cours.
  • La proximité lexicale de « tombés » avec le mot « tombe » n’est pas fortuite. Rappelons que l’extermination des Arméniens, c’est environ 1 million de pertes humaines.
  • Au sujet de cette perte, de son importance, il est intéressant de relever l’épanorthose (= figure de style consistant à dire quelque chose puis d’y revenir afin d’apporter des précisions, des corrections) dans « par milliers, par millions ». Le génocide étant peu évoqué, Charles Aznavour se veut la voix des sans-voix.
  • L’emploi de l’hypotypose « mutilés, massacrés les yeux ouverts d’effroi » permet de mettre en lumière les horribles scènes de massacre en dénonçant tout en mettant les responsables face à la vérité/
  • On note une alternance de décasyllabes et d’alexandrins. Ce dernier, plus noble est peu utilisé dans les chansons où sont privilégiés les octosyllabes. La longueur du poète, sa précision dans l’image montre bien le désir du poète de ne pas enterrer la mémoire de ceux sacrifiés par ce génocide.
  1. Et pourtant, une dénonciation parfois moins abrupte
  • Dans le mode opératoire de ce génocide il y a, entre autres, la mort par arme blanche ou à feu. Charles Aznavour choisit de ne pas nécessairement dire les choses, il n’écrit pas un documentaire mais une chanson. Aussi il emploie des métonymies (« le fer », « le feu »).
  • L’emploi du pronom « nul » dans « Nul n’éleva la voix… » démontre que le poète a choisi de ne pas nommer explicitement ceux qui ont choisi le silence.
  • Le champ lexical de la musique et du bruit (jazz, trompette, musique, bruit, cris, plaint) s’oppose à celui du silence (sans bruit, nul n’éleva la voix, sans laisser de trace) montre la dichotomie entre ce qui ce passe dans l’autre monde (naissance de la musique jazz) et dans le Caucase (massacre d’un peuple dans la quasi indifférence).
  • Parce qu’il s’agit d’un poème, l’auteur utilise aussi des figures d’atténuation. Ces dernières n’ont pas pour effet de minimiser le massacre subi mais au contraire de donner une dimension poétique, de rendre hommage aux personnes assassinées. On le voit dans les métaphores « fleurs rouges » (sang) ou encore les yeux pleins de soleil (désigne les morts qui gardent les yeux ouverts).
  1. Un hommage personnel au peuple arménien
  1. Un poème contre l’oubli
  • Plus qu’une prescription contre l’oubli, le poème cherche à rendre hommage au peuple massacré. Les métaphores et comparaisons permettent d’évoquer la grandeur, la liberté au-delà de la mort du peuple arménien. À ce titre, le vers « comme un oiseau qu’en vol une balle fracasse » rappelle le poème de Baudelaire L’albatros.
  • L’euphémisme « dernier sommeil » ne permet pas de mesurer la portée du massacre mais montre que la mémoire du génocide, si elle est endormie, pourra être dévoilée un jour.
  • Sans dénoncer ouvertement, le poète parle de cet oubli, du manque de considération de la communauté internationale avec une polyptote telle que « que leurs enfants pourraient continuer leur enfance », il montre que les besoins fondamentaux n’ont pas été vus. Cet effet de répétition donne la mesure des conséquences de l’oubli.
  • Le poète insiste sur le nombre de pertes humaines dès le début de la chanson : « hommes, femmes et enfants », les pertes civiles ont été conséquentes tel qu’il l’exprime par « par milliers, par millions ».
  • Le zeugme « recouverts par un vent de sable puis d’oubli » démontre bien l’inexorable oubli face à ce génocide. L’oubli, le silence est aussi nettement marqué par des tournures négatives « sans que le monde bouge », « pour mourir n’importe où » montre encore l’indifférence mais aussi la nécessité de réparer cet oubli.
  • Les rejets et contre-rejets (« ingénus », « dans la nuit éternelle… ») manifestent l’impuissance mais surtout l’innocence de ce peuple souvent.
  1. Aznavour, enfant d’Arménie
  • On ne sait pas au début du texte de quel peuple, quel crime contre l’humanité il est question. La dénonciation d’un peuple frappé dans sa foi religieuse et jusqu’à sa porte, siège de l’intime (« au seuil de l’église ou le pas de sa porte ») peut nous amener à penser que le poète a une proximité, un lien avec le peuple.
  • Le texte joue sur l’effet de surprise, la chute : « moi, je suis de ce peuple sans sépulture ». Aznavour dévoile ainsi ses origines, affirmant ce qu’il avait rejeté lors de son premier voyage en Arménie (cf. introduction). L’allitération avec l’occlusive p (peuple, sépulture) montre bien son attachement mais aussi sa volonté, son devoir de s’identifier à ce peuple.
  • Le peuple arménien est néanmoins peu nommé et lorsqu’il l’est c’est souvent par le biais de pronoms (« qu’a choisi de mourir », « qui n’a jamais baissé la tête », « qui survit… »)
  • Le dernier vers permet de comprendre de quel peuple il est question et de montrer, outre, leur légitimité et surtout la connaissance de son histoire, qu’il est un peuple comme un autre. L’allitération en f (« fautifs d’être enfants d’Arménie »). Cette chute, révélation sur le peuple permet de le mettre en avant et pour le poète de s’identifier à eux car il « [est] de ce peuple.

Conclusion [réponse à la question posée] Cette chanson/poème est un hommage au peuple arménien sacrifié en 1915 lors du génocide perpétré dans l’empire ottoman. Le poète fait tantôt le choix de dénoncer avec virulence tantôt de rendre hommage aux victimes. Sa singularité est que l’auteur nous révèle ses origines dans sa chute, l’identification rendant le texte plus poignant. [Ouverture] Ce texte peut rappeler celui des Fusillés de Châteaubriant car il dénonce la barbarie sans nommer les victimes et les bourreaux tout en permettant une identification.

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