L'abstention n'est-elle que le résultat d'un désintérêt pour la politique ?
Commentaire de texte : L'abstention n'est-elle que le résultat d'un désintérêt pour la politique ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar jbazemm • 19 Février 2024 • Commentaire de texte • 3 202 Mots (13 Pages) • 112 Vues
L’abstention électorale
Problématique : L’abstention n’est-elle que le résultat d’un désintérêt pour la politique ?
« Dictature : pays où les citoyens veulent voter mais ne peuvent pas. Démocratie : pays où les citoyens peuvent voter mais ne veulent pas ». A travers cette citation l’écrivain belge Paul Carvel dénonce l'abstention électorale qui est un phénomène préoccupant.
En effet, à chaque échéance électorale, certains citoyens choisissent de ne pas exercer leur droit de vote, laissant ainsi vacant leur pouvoir de décision politique. C’est cet acte que l’on appelle abstention électorale.
En France, bien que le suffrage universel masculin n’ait été accordé avant, il a fallu attendre le 21 avril 1944 pour que soit consacré le droit de vote des femmes. A partir de cette date tous les citoyens majeurs peuvent voter lors des différentes élections. Ils forment le corps électoral. Cela est prévu par la constitution à l’article 3 qui dispose que :
« Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. Alinéa 4 »
Le droit de vote est ainsi un droit fondamental garantie par la constitution mais il n’est cependant pas obligatoire. Des citoyens décident donc de s’abstenir et ce alors qu’ils sont bien inscrits sur les listes électorales.
En France, le taux d’abstention est calculé en rapportant le nombre des citoyens s'étant abstenu, au nombre de ceux inscrits sur les listes électorales à la date du scrutin. Les personnes n'étant pas inscrites ne sont donc pas comptées dans le taux d’abstention, tout comme les votes blancs et nuls.
Ce taux est en constante augmentation depuis 1958. Pour se rendre compte de ce phénomène, l’élection présidentielle est le scrutin le plus révélateur puisqu’il s’agit traditionnellement de celui avec le taux d’abstention le plus faible.
Par exemple, aux élections présidentielles de 1965, ce taux était de 15,2% et 15,7% respectivement au premier et second tour, alors qu’à celles de 2022 l’abstentionnisme était de 26,31% au premier tour et 28% au second. Cela est encore plus marquant pour les autres élections, qu’elles soient municipales départementales, régionales ou européenne avec des taux d’abstention allant parfois jusqu’à 50% et plus.
C’est ce dont traite l’article du monde, « Législative 2022 : l’abstention reste le premier parti de France » publié en 2022 suite aux élections législatives. Lors de ce scrutin, l’abstention a compté plus de voie que toutes les listes des candidats.
Des taux d’abstentions aussi élevés posent de graves problèmes en démocratie, quand à la représentation des citoyens et de l’intérêt général.
On pensait auparavant que l’abstention n’était que le résultat d’un sentiment de désintérêt pour la politique, de la part d’une minorité de citoyens non-inscrits sur les listes. Cependant des taux aussi élevés laissent penser que ce phénomène est plus complexe que ça et plus grave, il y aurait d’autres explications, et l’abstention ayant des conséquences graves il est important de la comprendre pour la réduire.
Ainsi, nous allons nous demander si l’abstention n’est que le résultat d’un désintérêt pour la politique.
Nous verrons donc dans un premier temps l’abstention comme la conséquence des divisions dans la société (I), puis dans un second temps l’abstention comme un acte volontaire traduisant un choix politique.
I. Le reflet d’une société divisée
Nous allons voir d’une part que l’abstention s’explique par la situation économique des individus (A), puis d’autre part que cela s’explique par un sentiment d’abandon des citoyens (B).
A) L’impact de la situation économique des citoyens
Dans l’article, nous pouvons lire que lors de ces élections législatives de 2022, les territoires les plus pauvres sont ceux avec le taux d’abstention les plus élevés. Ainsi le territoire avec l’abstention la plus importante était Saint Barthélémy, COD connaissant beaucoup d’inégalités, avec 75,44% d’abstentions au second tour. En métropole, c’est la Seine-Saint-Denis où les gens ont le moins voté avec 63,4% d’abstention.
Les inégalités économiques ont en effet un impact sur le vote, et sur le fait d’aller voter ou non. Selon l’INSEE sur l’année 2022, élections présidentielles et législatives confondues, l’abstention était 3 fois plus élevées chez les ouvriers que chez les cadres.
Les individus en situation de précarité économique sont en effet souvent confrontés à des contraintes qui les empêchent de participer pleinement au processus politique. Ce sont par exemple des contraintes de temps dues à des emplois instables ou à des horaires de travail irréguliers qui rendent difficile la participation aux événements politiques et donc à la création d’une opinion politique, ainsi que la capacité même à se déplacer jusqu'aux bureaux de vote. Cela aboutit à un sentiment de désillusion ou de désengagement par rapport au système politique en raison de l'impression que leurs préoccupations ne sont pas prises en compte, ou bien que le vote ne changera pas leur situation. Ils ne sont donc pas motivés et incités à aller voter. Comme le disait l’humouriste Coluche non sans ironie : si voter servait à quelque chose, il y a longtemps que ce serait interdit.
Mais au-delà de l’aspect économique, ce sont des contraintes sociales qui en découlent qui démotivent les citoyens et les poussent à l’abstention.
B) Un phénomène renforcé par un sentiment d’exclusion sociale
Ainsi, au-delà du salaire et de la catégorie professionnelle, le manque d’intégration de l’individu à la société qui en dépend impact sa probabilité d’aller voter ou non.
Lors de l’éducation des individus se déroule un processus de socialisation politique durant lequel un individu apprend et intériorise les normes et valeurs de la société, construit son identité sociale, et développe ses opinions et attitudes politiques. Or selon Pierre Bourdieu, la famille est un organe important de socialisation politique et cela entraine selon lui une reproduction quant au vote, les enfants votent généralement comme leurs parents avant eux. La sociologue Anne Muxel, le vote à l’opposé des parents est très rare. Il n’y a pas plus de 10 à 12 % de la population qui se positionne dans camp politique opposé à celui de leurs parents. Il y a une forme de continuité idéologique pour la droite ou la gauche, mais aussi pour l’abstention.
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