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Peut-on parler d'un confinement de classes ?

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Par   •  27 Avril 2020  •  Dissertation  •  1 881 Mots (8 Pages)  •  691 Vues

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Licence Science Politique/ AEI – Année 2019-2020- Semestre 2

Sociologie Générale

Anne de Rugy

Haton Benjamin

Devoir Maison facultatif : à remettre pour le 26 avril 2020

Peut-on parler d’un confinement de classe ?

Le découpage en « classes » d’une société reflète une hiérarchie de différents groupes. Nous héritons de ce système depuis bien avant notre époque, que l’on peut illustrer par la dialectique du maître et de l’esclave. L’esclave, qui ne peut s’affranchir de sa liberté, est dominé par le maître, qui lui est supérieur. De là découlent la plupart des relations entre hommes depuis des millénaires, où nobles dominent le tiers-état, où patrons dominent les ouvriers et où grands entrepreneurs dominent les salariés.

Pour Max Weber, ces classes sont d'ordre économique, où l’on observe les revenus et le patrimoine, d’ordre social, en fonction du prestige des uns et aussi d’ordre politique, en se référant à l’influence dans la politique du pays. Il y a près d’un siècle, les délimitations entre différentes classes sociales commençaient déjà à s’estomper. Il n’y avait plus des riches, voire très riches, et au contraire des pauvres, voire des très pauvres : la (ou plutôt les) classe(s) moyenne(s) apparaissai(en)t.

C’est pourquoi si nous parlons de classes sociales en France aujourd’hui, on se doit de préciser quelles sont ces classes. En se basant sur les idées de Karl Marx, nous pouvons proposer un modèle assez empirique du type :

  • classes populaires : ouvriers et artisans entre autres, salaire proche du SMIC ;
  • classes moyennes : fonctionnaires ou petits autoentrepreneurs, salaire correct, pas de problèmes pour vivre normalement ;
  • classes supérieures / classes dirigeantes : (petite) bourgeoisie, propriétaires fonciers, travailleurs qualifiés tels que des cadres, politiciens, bon voire très bon salaire, mode de vie qui peut permettre une consommation ostentatoire / personnalités les plus riches du pays, grands chefs ou propriétaires d’entreprises, salaire bien au-dessus de la moyenne, mode de vie détaché de celui des autres français.

La pandémie actuelle de Covid-19 a non seulement bouleversé les Etats à l’échelle mondiale, elle a également transformé nos rapports au sein de la société. Des mesures de protection sont mises en place, au premier rang desquelles le confinement. « Restez chez vous et évitez le contact des autres », cela paraît simple : tout le monde se doit de faire la même chose.

Le contexte inédit de crise sanitaire que nous traversons intervient à une époque où la France est toujours et encore divisée en classes sociales et où les inégalités sont bien présentes. Cela nous amène à nous demander si ce confinement touche de la même façon tout le paysage social français. Nous allons y répondre en nous penchant sur ses effets au sein des différentes couches de la société, et en observant si le confinement touche toutes les classes sans distinction ou si au contraire ce dernier divise encore plus notre société.

Tout d’abord, le confinement touche de la même façon l’ensemble des classes sociales, sans exception. Les restrictions imposées par le confinement sont les mêmes pour tous, et la sanction en cas de non-respect des règles est la même.

De cette façon, la vie de famille est affectée. Rester chez soi c’est cohabiter jour et nuit avec l’ensemble de la famille qui habite avec nous. Il n’y a que les parents qui peuvent s’occuper des enfants, même pour les plus aisés d’entre nous. Et si ces derniers pouvaient avoir une « nounou » afin de partir seuls en vacances, ils doivent rester avec leurs enfants tout le temps. Est-ce que cela permet de resserrer les liens familiaux et conjugaux ? En France, le nombre de violences conjugales ont augmenté de 30% depuis la fin du confinement. Des études montrent peu de différences du nombre de violences faites aux femmes au sein des différentes classes sociales : cette hausse terrible du nombre de violences conjugales montre un effet « global » du confinement, qui affecte tous niveaux de notre société.

De plus, le confinement réduit infiniment le champ des possibilités. En nous empêchant de sortir dehors trop loin et trop longtemps, on assiste à une uniformisation des loisirs. Il n’est plus possible de sortir faire du golf, ni du parapente et les activités nautiques, telles que faire des promenades en yacht ou faire du wakeboard à l’arrière de son bateau ne sont plus possibles. De la même façon, nous ne pouvons plus nous réunir avec les amis du quartier pour un match de pétanque. Il ne nous reste que la possibilité d’aller courir un peu dehors, se promener à pied ou de faire du sport chez soi, où l’équipement change tout de même beaucoup des salles de sport de luxe. Les voyages ou les sports plutôt réservés aux riches ne sont pas disponibles, tout comme le sont les loisirs des classes populaires. Ce confinement nous donne pourtant plus de temps libre, mais les façons de s’occuper ne varient pas tant que ça entre classes inférieures et classes supérieures.

Enfin, cette crise a eu de nombreux impacts sur l’activité économique à l’échelle nationale. Seuls sont ouverts les magasins de première nécessité, ce qui met fin aux séances interminables de shopping le samedi. Et bien que certaines boutiques en ligne restent ouvertes, le trafic a été forcé de largement diminuer, sachant en plus que les services postaux ont eux aussi considérablement baissé leur activité. Résultat, plus de consommation de luxe, la consommation se réduit essentiellement au domaine du besoin. De toutes façons il serait impossible d’afficher en public sa nouvelle acquisition d’un pull à trois zéros. Que nous reste-t-il ? Que nous bénéficions d’un important capital économique ou non, nous pouvons consommer les mêmes choses : nourriture et produits essentiels pour l’entretien de la maison, produits pharmaceutiques et tabac. D’ailleurs, fermeture de tous les commerces oblige, les restaurants et bars sont eux aussi fermés. Il est donc impossible aux plus riches de fréquenter ses collègues dans une table au Ritz, tout comme les plus démunis de rejoindre ses amis au bar du quartier.

En bref, le confinement force des changements radicaux dans le comportement des français, et on observe une uniformisation des pratiques chez l’ensemble des classes sociales. Que ce soit pour les loisirs ou la consommation, nous avons à peu près tous accès aux mêmes activités et aux mêmes denrées. Néanmoins, certaines habitudes se retrouvent plus transformées que d’autres : tandis que les classes sociales les plus aisées qui avaient l’habitude de beaucoup consommer et de raffoler des objets de luxe doivent « redescendre sur Terre », les personnes plus modestes n’auront pas tant besoin de se retenir à acheter plus que nécessaire.

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