La Mort Est Il Un Objet Sociologique
Note de Recherches : La Mort Est Il Un Objet Sociologique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar milalola • 26 Mars 2013 • 4 462 Mots (18 Pages) • 1 317 Vues
La mort a subi un traitement inégal dans l’histoire des sciences humaines, tour à tour absente, sujet tabou, hors d’atteinte de nos modes de connaissance ou sujet d’intenses débats.
Le questionnement autour de la mort après avoir décliné entre les années 50 et les années70, retrouve une vive actualité dans les débats intellectuels dans les années 70- 80, puis un nouvel élan des publications sur la mort apparaît à partir de la fin des années 1990 .Nous pouvons citer de nombreux travaux ; en histoire l’incoutournable ouvrage L’homme devant la mort Philipe Ariès en 1977, la réédition en 1982 de l’ouvrage d’Edgar Morin passé inaperçu en 1951, les ouvrages d’A. Strauss awareness of dying 1965, time for dying 1970, l’ouvrage de Norbert Elias la solitude des mourants 1982, réed. 1998, J-H Déchaux, Le souvenir des morts, 1997 ; Magali Molinié, soigner les morts pour guérir les vivants, 2006 ;Gaëlle Clavandier, sociologie de la mort,2009 ; les nombreux ouvrages de l’anthropologue Louis-Vincent Thomas sur la mort, dont La mort,1988- réed.2003, de nombreuses conférences sur ce thème et de nombreux articles dans la revue française de sociologie, gérontologie et société…
L’actualité de la mort dans la sphère scientifique, est concomitante de débats sur la mort dans l’espace public : Débats concernant la légalisation de l’euthanasie qui ressurgissent à chaque fait divers, occasion pour les médecins de revendiquer ce « droit » pour une mort qui se voudrait plus « digne » ; débats sur l’insuffisance des unités de soins palliatifs ; débats autour de la retraite que l’on retarde comme pour faire reculer ou disparaître la vieillesse , de la même manière que l’adolescence n’a cessé de reculer. Et surtout, avec le vieillissement démographique, l’on est confronté à la question de la prise en charge des vieillards ; les cas massifs de décès vont s’accroître et selon les calculs de G. Clavandier (Sociologie de la mort) chacun de nous sera souvent confronté à l’épreuve de la mort, et chacun de nous connaîtra selon elle, entre 8 à 13 décès par ascendance directe, sans compter les collatéraux et ceux liées aux familles recomposées.
L’on voit ici l’ambigüité de question de la mort, mort que l’on veut d’un côté anticiper et de l’autre éloigner. D’ailleurs aujourd’hui la mort est présentée de façon télévisuelle plus que réelle. Ne parle-t-on pas de disparition plutôt que de mort ?
La mort est-elle une disparition ? Comment peut-on la définir ? Tout d’abord, la mort n’est pas propre à l’homme. Les animaux, les plantes, les choses, les cultures, les langues meurent. La mort est en ce sens un rapport au temps qui implique un vieillissement et une disparition.
On peut distinguer la mort des animaux et celle des hommes dans le sens oùl’animal a une conscience instinctive de la mort biologique. Il est capable d’adopter un comportement très spécifique face à la mort (voir les cimetières d’éléphants). Mais l’instinct de mort chez les animaux relève avant tout de la régulation de son espèce, alors que l’homme s’identifie d’abord à son individualité : il dit « moi ». Selon Heidegger « seul l’Homme meurt, l’animal périt ».
L’homme se différencie des animaux par la conscience de sa mort , par le fait qu’il peut aller au devant de la mort, pas tant par le suicide que l’on trouve chez certaines espèces animales, mais par le fait de vouloir mourir pour quelque chose.
La mort ne se laisse pas facilement facilement, parce qu’elle est une expérience unique, dont on ne revient pas ; c’est pourquoi elle est souvent définie par antonymie : la mort est la fin de la vie.
Trois définitions de la mort peuvent être retenues (G. Clavandier):
- la mort en tant que phénomène biologique fût caractérisée par l’arrêt respiratoire et circulatoire ; définition rejetée par l’académie de médecine en 1966 qui propose l’arrêt de l’activité cérébrale comme définition de la mort clinique. L’idée serait que l’homme est plus dans le cerveau que dans son cœur et que l’on est mort lorsque le cerveau ne fonctionne plus alors que tout le corps est « vivant » (question des prélèvements d’organes) Ainsi même biologiquement la mort ne se laisse pas facilement appréhendée. Notons que cette dernière définition est récusée au Japon et dans les pays musulmans qui ne veulent pas que l’on prélève des organes sur un corps le « cœur battant ». en outre 39% des français considèrent que ce n’est pas une mort véritable.
- La mort est un phénomène administratif et juridique constatée par la délivrance d’un certificat de décès qui suppose 3 conditions : des signes fondamentaux comme abolition contrôlée des la respiration, perte totale de l’état de conscience …, élimination des étiologies simulatrices comme l’intoxication, hypothermie…, un délai d’observation minimum mais variable selon l’étiologie, où ces signes sont constants. Temps passé de 3 à 30 mn d’électroencéphalogramme plat.
- La mort est aussi un phénomène social car perçue à travers l’ensemble des rituels qui lui sont associées.
Donc la mort est non seulement un rapport au temps, mais un rapport à l’autre.
C’est dans ce rapport à l’autre notamment que le sociologue peut avoir son mot à dire. En d’autres termes la mort , où plutôt le rapport à la mort est –il vécu partout et en tout temps de la même façon ?
Pour répondre à cette question, nous verrons dans une première partie que la mort est un fait social total qui a d’abord intéressé les philosophes, les historiens et les ethnologues, dimensions importantes pour nous aider à mieux prendre la mesure du caractère sociologique de la mort.
La multiplicité de ces regards pluridisciplinaires va nous aider à démontrer que la façon de vivre et de penser la mort évolue selon le contexte social et qu’en ce sens elle est un fait social au sens de Durkheim.( partie 2)
La troisième partie nous permettra à travers trois exemples de champs d’étude, qui constituent autant d’enjeux sociaux, de voir comment on peut sociologiquement réfléchir la question de la mort.
I. La mort, un fait social total.
L’objet de cette première partie sera de montrer que la mort est aux frontières de plusieurs disciplines des sciences humaines et sociales. En ce sens elle ne peut être saisie par un seul regard. Jean-Marie Brohm rappelle que les savoirs essentiels sur la mort, ou plus exactement autour
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