Tailler sa pierre

Tailler sa pierre brute

D'Agadir à Essaouira la "Rochelaise" ou bien en traversant les contrées arides et sèches de

Tafraout à Iznit, je contemple ces pierres inertes au milieu de nul par !!! Là, en cheminant dans

ces immensités désertiques, au volant de ma Logan marocaine, je pense à notre parcours

initiatique. Les images, gravées à jamais dans ma mémoire, défilent et je revois l'un de mes

jumeaux attaquer son premier travail, d’une forte ardeur, la pierre brute au pied de l'Orient.

Tout jeune impétrant, je me disais, bien innocemment voir légèrement inconscient, "Ici, c'est

comme dehors !!! On se fond dans le moule, je taille ma pierre en essayant ou tentant d'être

votre semblable !!!"

A quoi travaillent les Apprentis?

A dégrossir la Pierre brute afin de la dépouiller de ses aspérités et à la rapprocher d’une forme

en rapport avec sa destination, répond le mémento.

S'identifier à une pierre, c'est lourd, dur, obscur mais au moins c'est solide, précis, durable !

Au septentrion, dans le silence des apprentis, j'ai pu développer l'écoute, la méditation, lors des

travaux de mes FF∴ pour essayer de comprendre, et ce n'est pas toujours facile, leurs travaux,

leurs différences. Comme le dit si justement notre F∴ José : "Ah si nous avions toujours le bon

décodeur..."

Je pense que le jeune apprenti que je suis avait besoin d’une bonne méthodologie, base même de

l’apprentissage, pour dégrossir et tailler la pierre, sa propre pierre.

Au fil des tenues et de nos réunions d'apprentis avec nos seconds SS∴∴ José puis Daniel, j'ai

compris que les différences, nos diversités n’étaient pas la marque de notre faiblesse, mais bien

au contraire constituaient notre richesse, notre force, notre complémentarité. Chaque pierre

apporté au pied de l'édifice le renforce, nous construit et pérennise notre action.

Et au fond, qu'elle tristesse, cela serait de tous nous ressembler dans une mono pensée, unitaire

où, tout vaut tout !

Alors que la méthode nous demande de tailler notre pierre, tout en laissant nos métaux à la porte

du temple. Dégrossir cette Pierre Brute, la dépouiller de ses aspérités n’est-ce pas la rendre

lisse, presque comme une peau du nouveau-né, que nous sommes redevenus après le passage de la

vie de profane à celle d'initié.

Comment tailler ma pierre ?

Comment ma pierre va-t-elle s'imbriquer avec les autres pour devenir une dans l'édifice?

Ma pierre a-t-elle sa place ?

Ce long travail commence sans que l'on s'en rende vraiment compte, au fil des mois et des

échanges au cours des tenues et surtout lors de nos réunions d’apprentis sous la haute

bienveillance de nos FF∴ Surveillants. Avec humilité, nous nous débarrassons progressivement de

notre formatage profane en redevenant autrement. Du moins j’ai la faiblesse de le croire.

Par nos échanges, j'ai appris à me servir, à comprendre l'usage de nos outils.

Avec le fil à plomb, j'ai trouvé, au moyen d’une introspection, la possibilité de descendre au plus

profond de mon nadir et de me découvrir tel que je suis et d’accepter le fruit de cette

découverte. J'ai acquis la rectitude, d'être un homme debout et en mouvement ce qui me permet

de commencer à chercher la lumière éclairante en levant la tête vers le zénith.

Avec le maillet, le ciseau, la règle à 24 divisions, nos outils d'apprentis, j'ai commencé le long

travail sur ma pierre de midi à minuit sans relâche. Chaque matin, j'ai mis mon tablier et j'ai

essayé de tailler, avec beaucoup de peine, cette pierre brute récalcitrante au burinage. La

maîtrise des outils n'est pas chose facile et je ne suis pas sur que seul on puisse y parvenir.

En me débarrassant du superflu, en retirant les aspérités acquises dans le monde sociétal selon

les canevas établis, je me retrouve ni nu, ni vêtu pour commencer un travail

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