La Vie De Dom Juan
Mémoire : La Vie De Dom Juan. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar tutu97 • 3 Juin 2014 • 737 Mots (3 Pages) • 931 Vues
marquons dans un premier temps que le narrateur ne présente pas l’ouvrage proprement comme un récit, mais il lui confère en réalité le statut de « chronique » qui, par définition, relate objectivement des événements historiques dans un ordre chronologique. Ainsi, comme il le dit lui-même, le locuteur s’appuiera sur une documentation riche et précise car il fait œuvre d’historien, et non d’écrivain : « Bien entendu, un historien, même s’il est amateur, a toujours ses documents. Le narrateur de cette histoire a donc les siens : son témoignage d’abord, celui des autres ensuite, puisque par son rôle, il fut amené à recueillir les confidences de tous les personnages de cette chronique, et, en dernier lieu, les textes qui finirent par lui tomber entre les mains. » D’ailleurs, la vision se veut réaliste dès les premières pages : la description de la ville est soumise à un regard aiguisé, lequel parvient à la fois à retranscrire une atmosphère mais aussi et surtout à exposer progressivement les points de vue de tous ceux qui vont subir l’épidémie. En somme, Camus cherche dans une certaine mesure à juxtaposer les documents les plus divers, afin de créer une suite de « journaux-carnets-notes-prêches-traités », dans l’optique de rendre compte de l’épaisseur multiple du réel, qu’un point de vue unique et constant aurait risqué d’aplanir, et sans doute d’affadir. Le narrateur opte en effet pour une focalisation complexe : il est à la fois individualisé en la personne du docteur Rieux, mais reste anonyme tout au long du récit : il incarne la « voix de la ville », et peut de fait être perçu comme une sorte de coryphée. Et c’est cet assemblage des multiples points de vue qui invite à croire en la neutralité du détenteur de parole.
II. Le récit bascule sensiblement dans le fantastique
Le réalisme, ou tout du moins la vraisemblance du récit est incontestable, mais au fil des pages, on note l’apparition d’une dimension tout à fait différente qui supplée à cette impression de réalité : il s’agit du registre fantastique. C’était d’ailleurs très tentant pour l’écrivain de basculer dans un traitement quelque peu chimérique, voire mythique puisque le sujet, essence même de l’œuvre, s’inscrit par nature dans le fantastique ; le fléau, en tant que rupture concrète avec l’ordre habituel des choses, devient une véritable intrusion surnaturelle, invraisemblable dans l’ordinaire des habitants : « Le fléau n’est pas à la mesure de l’homme, on se dit donc que le fléau est irréel, c’est un mauvais rêve qui va passer. » (I,4) Qu’on ne s’y trompe pas, relater la peste sur une tonalité fantastique n’est pas, pour l’auteur, faire preuve d’originalité ; Camus s’inscrit au contraire dans une tradition littéraire, en s’inspirant notamment de récits épiques provenant de la Guerre du Péloponnèse. En outre, la construction même de l’œuvre n’est pas sans rappeler celle de la tragédie classique, dont les cinq actes évoquent clairement les cinq tableaux qui parcourent la « chronique ». Tout y est : ouverture, montée du drame, crise et retombée. Là encore, l’écrivain, par ce jeu d’intertextualité, s’efforce de se situer par rapport à ses prédécesseurs. D’ailleurs, dans la continuité de cette parenté théâtrale, on peut mettre en évidence un travail
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