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Lettre 101 Montesquieu

Dissertation : Lettre 101 Montesquieu. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  19 Février 2015  •  382 Mots (2 Pages)  •  764 Vues

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Rica au même.

Je te parlais l’autre jour de l’inconstance prodigieuse des Français sur leurs modes. Cependant il est inconcevable à quel point ils en sont entêtés : ils y rappellent tout ; c’est la règle avec laquelle ils jugent de tout ce qui se fait chez les autres nations : ce qui est étranger leur paraît toujours ridicule. Je t’avoue que je ne saurais guère ajuster cette fureur pour leurs coutumes avec l’inconstance avec laquelle ils en changeant tous les jours.

Quand je te dis qu’ils méprisent tout ce qui est étranger, je ne parle que des bagatelles : car, sur les choses importantes, ils semblent s’être méfiés d’eux-mêmes jusqu’à se dégrader. Ils avouent de bon cœur que les autres peuples sont plus sages, pourvu qu’on convienne qu’ils sont mieux vêtus. Ils veulent bien s’assujettir aux lois d’une nation rivale, pourvu que les perruquiers français décident en législateurs sur la forme des perruques étrangères. Rien ne leur paraît si beau que de VOIR le goût de leurs cuisiniers régner du septentrion au midi, et les ordonnances de leurs coiffeuses portées dans toutes les toilettes de l’Europe.

Avec ces nobles avantages, que leur importe que le bon sens leur vienne d’ailleurs et qu’ils aient pris de leurs voisins tout ce qui concerne le gouvernement politique et civil ?

Qui peut penser qu’un royaume, le plus ancien et le plus puissant de l’Europe, soit gouverné, depuis plus de dix siècles, par des lois qui ne sont pas faites pour lui ? Si les Français avaient été conquis, ceci ne serait pas difficile à comprendre ; mais ils sont les conquérants.

Ils ont abandonné les lois anciennes, faites par leurs premiers rois dans les assemblées générales de la nation ; et ce qu’il y a de singulier, c’est que les lois romaines, qu’ils ont prises à la place, étaient en partie faites et en partie rédigées par des empereurs contemporains de leurs législateurs.

Et, afin que l’acquisition fût entière, et que tout le bon sens leur vint d’ailleurs, ils ont adopté toutes les constitutions des papes et en ont fait une nouvelle partie de leur droit : NOUVEAU genre de servitude.

Il est vrai que, dans les derniers temps, on a rédigé par écrit quelques statuts des villes et des provinces ; mais ils sont presque tous pris du droit romain.

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