Éduquer - Sémiologie

I. EDUQ UER

1. Introduction

1. La première entrée que l’on prendra en charge est liée à la question de l’éducation,

plus particulièrement à la question de l’éducation et de l’enseignement artistique qui va

subir une série de modifications radicales de la fin XIX siècle jusqu’à la seconde moitié du

XX siècle. Trois remarques préalables portant sur la notion, sur le développement des

pédagogies alternatives, et sur la nécessité d’une adaptation de l’enseignement artistique

face aux modifications sociales, culturelles, politiques, de manière parallèle à la dimension

inachevée de la modernité :

a. Le verbe éduquer et la notion d’éducation sont particulières, proviennent

étymologiquement de ex-ducere, ces notions contiennent en elles-mêmes quelque

chose de particulier, d’instable, d’inquiétant. Elles ne se réfèrent pas directement à

une question de règle, à la compréhension, à la connaissance, mais ont un rapport

de déplacement. Eduquer ne revient pas en effet dans son sens étymologique à

conduire (ducere) dans une direction donnée, mais bien hors d’une direction

donnée (dimension d’étrangeté).

b. Les XIX et XX siècles voient également une modification importante des structures

de l’enseignement et un développement important des pédagogies alternatives, sur

lesquelles se basera entre un autre une refonte de certaines structures

d’enseignement : avec Thoreau, Montessori, Steiner, la réflexion se porte sur le

statut de l’enseignement dans un rapport plus intégral à la société voir également à

une forme de réflexion cosmogonique. Rudolf Steiner, par exemple, développe une

conception de l’enseignement singulière basée sur un mode de pensée particulier,

l’anthroposophie.

c. Les XIX et XX siècles voient une modification des structures d’apprentissages

artistiques traditionnelles fondées sur les principes hérités de l’Académie royale de

peinture et de sculpture fondée en France, Paris, au XVII siècle : division par

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spécialités (peinture, sculpture, etc.) et mise en place d’une forme de

hiérarchisation des sujets et des genres au sein d’une discipline (ex. peinture

religieuse, d’histoire, mythologique, de paysage, etc.), mais aussi et surtout division

de l’enseignement entre pratique et théorie, la théorie prenant le pas sur la

pratique (selon une conception héritée de la Renaissance : le manuel est indexé à

la théorie, travail manuel au travail libéral). Le développement de mouvements

éducatifs utopiques vont radicaliser cette problématique de l’apprentissage au sein

d’un cadre artistique, que ce soit par exemple la Ferrer Modern School à laquelle

participa le photographe Man Ray et qui était influencée par les théories

anarchistes de Ferrer où les étudiants apprenaient autant de leur professeur que

des élèves, ou encore avec le cas de Monte Vérità, Ascona, Suisse, où au sein

d’une communauté basée sur les principes de socialisme primitif (où le rapport à

l’environnement conduit à repenser le rapport au social) entre 1913 et 1918 sera

monté une école d’art par Rudolf Laban (fig. 1-4).

On assiste à la mise en évidence de figures importantes dans les paysages

de l’enseignement artistique, que ce soit par exemple Joseph Beuys, qui au sein de

l’académie des beaux arts de Dusseldorf va initier un renouvellement radicale de la

question de l’apprentissage et de l’autorité, faisant de son enseignement une forme

de « sculpture sociale », comme lieu d’apprentissage non plus uniquement de

techniques, de compétences, mais de mise en place possible de structure de

coopération et de collaboration entre individus (fig. 5-11).

Ce contexte dit « scolaire » sera également mis en abyme, interrogé,

inquiété chez un artiste tel que Mike Kelley dans Educational Complex, présentant

en maquette les différents lieux d’éducation suivis par Mike Kelley (fig. 12-16). Elle

fut présentée pour la première dans l’exposition Vers un complexe utopique

artistique, et réalisée de mémoire avant d’être complété par l’appui de

photographies.

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