Commentaire Hume enquête sur l'entendement humain
Commentaire de texte : Commentaire Hume enquête sur l'entendement humain. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar aurelie_bct • 30 Mars 2021 • Commentaire de texte • 3 924 Mots (16 Pages) • 2 719 Vues
Philosophie morale
« Commentaire de texte extrait de Enquête sur l’entendement humain de Hume »
Le texte qui s’offre à notre étude est un extrait du livre Enquête sur l’entendement humain de Hume paru en 1748. L’extrait étudié est issu de sa section VIII et plus précisément de la première partie de cette section. Ce passage intervient après que deux problèmes aient étés reconnus dans la section VII concernant l’absence de maîtrise que nous avons sur notre corps mais également l’absence de maîtrise que nous avons sur notre esprit. Il nous est impossible de comprendre le commandement de nos idées par notre volonté et la manière dont elles parviennent à notre esprit. Hume aborde également le lien de causalité dans cette partie. Ecrivain empiriste, Hume considère que la connaissance se fonde sur l’habitude et la coutume et qu’elle est accessible par l’expérience. Par cela Hume s’oppose au dogmatisme qui croît en la préexistence d’idées en notre esprit qui sont la clé d’accessibilité à la connaissance. La causalité selon Hume n’est donc que l’association d’idées par l’habitude et perd ainsi toute valeur objective.
Cet extrait se penche sur le lien de causalité et admet que ce lien existe de la même manière dans les mouvements de l’esprit (« évidence morale ») que dans les phénomènes physiques constituant le réel (« évidence naturelle »). Il s’intéresse également à la prétention que l’homme a d’admettre une connaissance du réel juste et avérée, fondée sur un lien de causalité intrinsèque à l’homme, et donc absout de toute valeur objective. Notre connaissance par cela n’est qu’illusoire, et donc à dissocier de toute maîtrise de lois universelles (données par l’explication logique et évidente de phénomènes, eux-mêmes découverts par les facultés limitées de l’homme).
Hume dans ce texte se confronte donc au paradoxe suivant : les hommes ont tendance à appliquer leur croyance en des connexions nécessaires aussi bien dans le domaine physique que dans le domaine moral tout en continuant d’attribuer à la volonté la liberté. Hume souligne ici une certaine incohérence des humains qui agissent comme s'il existait des connexions nécessaires dans la nature et dans l’esprit, et pourtant qui ne parviennent pas à abandonner l'idée que les hommes sont libres.
Nous pouvons donc nous poser la problématique suivante : « Pourquoi les hommes malgré une incohérence aspectuelle évidente continuent-ils de penser que leur esprit est libre tout en reconnaissant l’existence de connexions nécessaires aussi bien dans le domaine physique que dans le domaine moral ? »
Dans une première partie, Hume évoque les représentations que supposent certaines de nos attitudes et pose ainsi l’analogie entre l’évidence naturelle et l’évidence morale en leur déploiement dans les phénomènes nous entourant, puis dans une seconde partie, il insiste sur le fait que ces évidences ne peuvent faire l’objet d’une distinction dans l’esprit de l’homme. En effet, confronté à certaines situations, l’homme perçoit les événements dans leur ensemble et établit des liens de causalité entre eux. Ces connexions nécessaires existent donc aussi bien dans le domaine moral que dans le domaine physique. Enfin, dans une dernière partie, Hume s’attarde sur la préexistence de ce lien de causalité dans l’esprit humain ce qui l’amène à critiquer les fondements de la connaissance humaine, mais aussi a requestionner le principe de liberté de l’esprit de l’homme.
Ce texte en abordant ces différents points soulève des enjeux d’ordre épistémologique, confronte des courants opposés qui sont l’empirisme et le dogmatisme, étudie le fonctionnement de l’esprit humain, s’interroge sur le lien de causalité unissant les événements, et requestionne la liberté spirituelle de l’homme.
La première partie délimitée commence par exposer la thèse de Hume. En effet, l’auteur admet l’existence de deux évidences distinctes, une « évidence naturelle » mais également une « évidence morale ». Ce qui est entendu par l’évidence naturelle est notre capacité à percevoir et à comprendre des phénomènes physiques observables pouvant se dérouler autour de nous alors que l’évidence morale est entendue comme l’évidence relative à l’esprit et caractérisée par l’exercice de la volonté, celle-ci pouvant notamment engendrer une action ou bien une conséquence percevable par l’esprit de la personne. L’évidence morale s’exprime davantage par le langage, par la pensée, par la volonté, le jugement, et est le fruit d’une réflexion qui peut bien évidemment aboutir à des manifestations physiques. Hume poursuit son argumentation en affirmant que ces deux évidences distinctes théoriquement peuvent quand elles « se lient l’une à l’autre, et ne forment qu’une seule chaîne d’argumentation » se révéler similaires, complémentaires et conjointes. Il faut pour cela que leur intention converge vers la même finalité comme l’indique la formulation « et ne forment plus qu’une seule chaîne d’argumentation ». Leur objectif est alors le même et c'est pour cela que ces deux évidences deviennent indissociables. L’évidence naturelle et l’évidence morale disposent alors et évidemment de la même essence : « elles sont de même nature et dérivent des mêmes principes ». Hume cherche à décrire et à analyser les représentations que supposent certaines de nos attitudes. Pour étayer cette thèse Hume se concentre sur l’exemple d’un prisonnier qui souhaitant s’échapper de sa cellule se voit bloqué par la réunion des deux évidences et les place alors sur un même plan. D’une part l’évidence morale est exercée par le gardien qui par sa volonté empêche la libération du prisonnier et d’une autre part l’évidence physique pose des barrières matérielles à l’évasion du prisonnier par la cellule « les murs et les barreaux ». Il est important de préciser que c'est grâce à la réunion de ces deux évidences que l’emprisonnement du détenu est possible et que si les deux évidences étaient exercées distinctement cela ne serait pas possible. En effet un prisonnier qui serait uniquement confronté à une évidence morale pourrait très facilement s’échapper étant donné qu’il pourrait défier l’autorité de son gardien et le même scénario se déroulerait si le prisonnier était seulement confronté à des barrières matérielles, l’évasion serait alors facile et légitime pour lui étant donné qu’il aurait juste à demander la permission au gardien pour retrouver sa liberté. C'est par la réunion de ces deux évidences que le prisonnier comprend qu’il ne pourra pas s’échapper et qu’il est condamné à l’emprisonnement, il « découvre l’impossibilité de son évasion ». Hume précise que cette évasion est d’autant plus irréalisable que le prisonnier « n’a ni argent ni influence ». L’évidence morale est donc plus flexible si le prisonnier peut satisfaire les intérêts de son gardien. Sinon, si le prisonnier ne dispose d’aucune richesse et d’aucune notoriété, il aura meilleur temps de se concentrer sur l’évidence matérielle pour retrouver sa liberté. L’évidence morale désigne alors dans cette situation l’entêtement et la volonté du gardien et dispose par ce fait d’une nature « inflexible », donc inviolable. C'est pour cela qu’il sera plus judicieux pour le prisonnier de s’attaquer aux barrières matérielles auxquelles il est confronté et ainsi de braver l’évidence naturelle « il préfère s’attaquer à la pierre et au fer des uns plutôt qu’à l’inflexible nature de l’autre ». Il est notable que c'est par la perturbation de la cohésion de l’évidence naturelle et de l’évidence morale que la liberté devient possible pour le prisonnier. C'est même la modification de leur orientation et de leur objectif, donc de leur dissociation qui rend impossible leur exercice conjoint. Ces deux évidences ne disposent alors d’aucune force concrète individuelle étant donné qu’elles sont l’une et l’autre bloquées par l’intention contraire de l’autre, elles se gênent mutuellement et ces deux évidences finissent par se rattraper. Par exemple un prisonnier qui réussit à s’échapper de sa cellule sera rattrapé par les services de police qui partiront à sa recherche (donc par l’évidence morale) et qui le réemprisonneront. Cela montre bien que ces deux évidences doivent s’exercer ensemble et converger vers la même finalité mais aussi qu’elles sont interdépendantes. Leur interdépendance ne permet cependant pas l’établissement d’une situation stable et logique. Ce développement permet à Hume d’insister sur la perception d’événements par l’esprit humain. On remarque que l’auteur ne pose pas de distinction entre ces deux évidences et les place sur un même plan, leur force de raisonnement est similaire. L’évidence naturelle et l’évidence morale disposent ainsi des mêmes moyens mais également d’une force et d’une influence égales sur l’esprit humain.
Hume dans cette première partie de texte semble distinguer l’évidence naturelle de l’évidence morale. Il affirme cependant que ces deux évidences doivent s’exercer conjointement pour que la similarité de leur essence apparaisse et que c'est leur réunion qui permet à une action d’être menée à terme et de perdurer. Hume précise également que ces deux évidences sont perçues de la même manière par notre esprit. Comment expliquer le lien qui unie ces deux évidences et de la perception de celles-ci par notre esprit ?
Ensuite, Hume insiste sur la manière dont notre esprit perçoit ces deux évidences. En effet ce dernier dans sa compréhension des événements ne dissocie pas l’évidence naturelle de l’évidence morale et inversement. Il perçoit les événements dans leur caractère global et établit le lien unissant ces deux évidences instinctivement. Pour justifier ces propos, Hume se concentre cette fois-ci sur l’exemple d’un condamné à mort. Un condamné à mort n’aura pas besoin d’établir la distinction entre l’évidence morale « la constance et la fidélité de ses gardiens » et l’évidence naturelle « l’opération de la hache et de la roue » pour avoir la certitude qu’il va mourir « il prévoit sa mort aussi certainement d‘après la constance et la fidélité de ses gardiens que de l’opération de la hache et de la roue ». L’esprit de l’homme comprend alors l’événement dans son ensemble et rassemble les pièces de cet événement qu’elles soient d’évidence naturelle ou d’évidence morale sans opérer de distinction entre elles. Le lien de causalité qui les unie et évident à l’esprit humain. Si le condamné va mourir, c'est par la volonté de son gardien et le phénomène physique qui va faire que la lame de la hache va trancher la tête du condamné et le conduire au décès. Le condamné a cependant conscience de l’articulation des événements qui vont le conduire au décès c’est-à-dire « du refus des soldats de consentir à son évasion, l’action du bourreau, la séparation de la tête et du corps, le saignement, les mouvements convulsifs et la mort ». L’esprit opère donc la distinction entre ces différents événements mais ne les classifie pas pour autant en tant que « causes naturelles » ou d’actions volontaires » « l’esprit ne sent aucune différence entre elles en passant d’un chaînon à l’autre ». Il existe donc un réel lien inconscient qui s’opère dans notre rapport entre les différentes actions et évidences et c'est ainsi que nous subissons la réalité et que nous lions les choses entre elles. Ce lien nous permet de jongler entre ces différentes évidences et d’en établir avec exactitude leur finalité. La continuité et l’intention des actions sont alors possible et nous permettent d’éviter toute confusion. L’évidence naturelle et l’évidence morale sont donc uniquement dotées d’une valeur théorique étant donné qu’elles ne sont pas distinguées par notre esprit dans leur déploiement concret. Hume précise cependant que la connaissance de ce lien unissant les actions et leur distinction entre elles ne donne pas plus de certitude à l’événement qui se profile que s’il n’était pas établi. En effet, la « nécessité physique » que nous cherchons à établir entre les choses est entendue comme le lien de cause à effet que nous établissons entre les choses et qui nous permet de clarifier et de donner une valeur objective et certaine aux événements. Ce lien est établi par la reconnaissance d’objets et de leur association à des propriétés spécifiques mais aussi par « par une suite de causes cimentées ensemble » et c'est la reconnaissance de certains événements associés à certains objets dotés de certaines propriétés qui va permettre à l’individu en s’appuyant sur sa connaissance et en faisant appel à sa mémoire de réactiver des schémas connus. Cette réflexion pousse Hume à évoquer le courant empiriste qui fait de l’expérience sensible l’origine de toute connaissance et de toute croyance et qui prend l’expérience et l’habitude comme critère du savoir. Il compare alors l’empiriste au dogmatisme et considère alors que le lien inconscient s’opérant en nous et nous permettant d’établir avec justesse le lien entre les phénomènes a la même valeur que la « nécessité physique » c’est-à-dire la connaissance d’actions futures par la décomposition et la classification de phénomènes « la même union empirique le même effet sur l’esprit, que les objets unis soient des motifs, des volitions et des actions ou qu’ils soient des figures et des mouvements ». Il considère même que « la nécessité physique » s’applique aux mouvements de l’esprit, elle a donc un pouvoir sur des corps matériels mais également sur la substance pensante. Elle se voit donc dotée d’un caractère limitatif pour l’esprit de l’homme dans le sens où elle est opposée au caractère libre de l’esprit humain et induit une forme de déterminisme par la préorganisation de la pensée humaine. Il finit par évoquer le fait que le « nom des choses » le sens théorique que nous donnons aux choses qui nous entourent ne change pas leur valeur concrète ni le rapport qu’elles entretiennent avec notre esprit, notre compréhension des événements nous entourant sera identique « nous pouvons changer le nom des choses, mais leur nature et leur opération sur l’entendement ne changent jamais ». Le principe de « nécessité » s’opérant sur le sujet pensant est donc complètement libéré du langage et de la connaissance.
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